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Centrafrique: 1.300 musulmans fuient Bangui

Des membres des ex-Séléka quittent Bangui, le 4 avril, escortés par des militaires tchadiens de la Misca.

Des membres des ex-Séléka quittent Bangui, le 4 avril, escortés par des militaires tchadiens de la Misca. - -

Environ 1.300 musulmans ont quitté Bangui dimanche sous la protection de soldats africains de maintien de la paix et leur quartier a été pillé par des centaines de chrétiens après leur départ.

Quelque 1.300 musulmans qui se terraient en périphérie de Bangui, fréquemment attaqués par des milices à majorité chrétienne, sont partis dimanche dans un imposant convoi, escortés par la force africaine Misca à destination du nord de la Centrafrique.

Dix-huit camions chargés à plein se sont mis en branle vers 12h locales (13h françaises). Les déplacés étaient assis sur leurs ballots, planches de bois, motos, frigos... Des centaines de bidons multicolores ornaient les flancs du convoi.

Un imposant dispositif de la Misca était mobilisé pour assurer la sécurité des partants. La sortie de Bangui et la traversée des villes de Sibut et Dékoa, dans le centre du pays, constituent notamment les points chauds de l'opération, a expliqué un cadre de la mission africaine.

Un imposant dispositif de la Misca

La mise en route, attendue depuis des semaines, s'est faite finalement sans heurts. Les déplacés, juchés dans sur remorques depuis de longues heures, lèvent les bras en signe de victoire à mesure que leurs véhicules prennent de la vitesse.

Au sol, des dizaines, puis des centaines de chrétiens, aux anges, s'affairent à dépecer méthodiquement tout ce que les précédents occupants des lieux ont abandonné. Bouts de bois, chambranles de portes, tôles de toiture, vêtements... Hormis un cercueil abandonné devant la mosquée, tout ou presque disparaît en un petit quart d'heure.

L'allégresse générale est à la mesure du soulagement pour les deux communautés, après cinq mois d'une infernale pression enserrant le PK-12, Point kilométrique 12, sorte d'étroit corridor en proche périphérie de Bangui, sur la route menant au nord du pays.

Les 1.300 déplacés, qui avaient déjà fui leurs domiciles pour occuper le PK-12, s'y étaient retrouvés piégés alors qu'ils souhaitaient déjà monter dans des convois humanitaires à destination du Tchad. Ils étaient depuis lors régulièrement victimes d'attaques d'anti-balaka (milices majoritairement chrétiennes).

Venger les chrétiens

Ces groupes de jeunes s'en prennent surtout aux musulmans pour, disent-ils, venger les chrétiens, majoritaires dans le pays (environ 80%), des graves exactions infligées par l'ex-rébellion Séléka, à dominante musulmane, lorsqu'elle était au pouvoir de mars 2013 à janvier 2014.

Les exactions commises par anti-balaka et Séléka illustrent les difficultés qu'ont désormais les deux communautés à vivre ensemble, alors qu'elles ont coexisté en harmonie pendant des décennies.

La question d'un déplacement massif de la communauté musulmane a provoqué cette semaine un intense débat politico-humanitaire en Centrafrique. Une ministre a dénoncé une opération qui accentue la partition religieuse du pays et met à mal la réconciliation. Le monde humanitaire affirme que ces populations ne pouvaient rester davantage, leurs vies étant menacées.

Les déplacés iront vivre à proximité de la frontière tchadienne. Quelques milliers de musulmans survivent au PK-5 de Bangui, un quartier anciennement reconnu pour sa mixité, et désormais protégé par les soldats burundais de la Misca.

C.P. avec AFP