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à nagoya, les enjeux économiques de la biodiversité

LA BIODIVERSITÉ DANS LE MONDE

LA BIODIVERSITÉ DANS LE MONDE - -

par David Fogarty SINGAPOUR (Reuters) - Des représentants du monde entier se réunissent à partir de lundi au Japon pour lutter contre la destruction...

par David Fogarty

SINGAPOUR (Reuters) - Des représentants du monde entier se réunissent à partir de lundi au Japon pour lutter contre la destruction des écosystèmes et tenter de donner une "juste valeur" aux bénéfices tirés des forêts, des barrières de corail et des océans qui sous-tendent l'activité humaine.

Selon les Nations unies, qui organisent la "conférence des parties" de Nagoya, les ressources naturelles, ou "capital naturel", disparaissent à un rythme alarmant, sans précédent depuis l'extinction des dinosaures, il y a 65 millions d'années.

L'objectif de Nagoya, où les représentants de plus de 190 pays liés par la Convention sur la biodiversité biologique seront réunis du 18 au 29 octobre, est de définir les moyens de lutter contre la destruction d'espèces animales et végétales qui sont vitales à la survie de l'humanité.

Un traité sur le partage des richesses génétiques de la nature entre les nations et le monde industriel, en discussion depuis des années, est aussi au centre des négociations.

Les nations en développement veulent un partage plus juste des ressources tirées des écosystèmes qu'elles abritent. Les plantes médicinales en fournissent l'un des exemples les plus spectaculaires: des pays comme la Colombie, le Brésil ou l'Inde veulent pouvoir profiter des revenus tirés par l'industrie pharmaceutique de l'exploitation de ces plantes.

Mais les discussions sur ce nouveau régime international d'accès et de partage des avantages (dit ABS) avancent lentement. Les groupes pharmaceutiques et les entreprises de l'agroalimentaire s'inquiètent de ses modalités pratiques.

"Des sommes massives sont déjà consacrées à la recherche et au développement des produits pharmaceutiques. Des coûts additionnels, sous la forme de royalties par exemple, modifieraient radicalement la base de profitabilité des entreprises. Cela pourrait affaiblir la recherche de nouveaux médicaments plus efficaces", explique Yuji Watanabe, chargé des questions de propriété intellectuelle chez Astellas Pharma, le numéro deux du secteur pharmaceutique au Japon.

"UN INVESTISSEMENT, PAS UN COÛT"

"Nagoya est une étape cruciale", souligne Achim Steiner, directeur du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE). "C'est la tentative la plus importante en une décennie pour régler la question de la biodiversité et des services rendus par les écosystèmes", a-t-il dit à Reuters.

Les Nations unies estiment que les pays doivent apprécier à leur juste valeur les bénéfices que les économies tirent des écosystèmes (eau, nourriture, air ou médicaments).

"Il faut cesser de concevoir la protection de l'environnement comme étant un coût, c'est un investissement", insistait le mois dernier le secrétaire général de l'Onu, Ban Ki-moon, devant l'Assemblée générale des Nations unies.

En 2002, les pays participant à la Convention sur la biodiversité biologique s'étaient engagés à "parvenir d'ici à 2010, à une réduction significative du rythme actuel d'appauvrissement de la biodiversité".

L'objectif ne sera pas atteint. L'Onu estime dans ses dernières Perspectives mondiales de la diversité biologique que "de multiples signes indiquent que le déclin se poursuit".

A Nagoya, les pays participants pourraient se fixer un nouvel objectif, à l'horizon 2020 cette fois. Selon sa dernière version de travail, le texte n'a pas encore défini l'ambition de la communauté internationale. Les Européens, notamment, plaident pour un "arrêt de la perte de la biodiversité"; d'autres pays veulent plus modestement que le monde ait pris d'ici là des mesures "vers un arrêt" de la perte de biodiversité.

Protection des stocks de poissons, protection des habitats naturels, extension des réserves maritimes et terrestres: un plan d'action en vingt points pourrait être adopté à Nagoya.

Les pays en développement, où sont concentrées la plupart des espèces naturelles, plaideront, eux, en faveur d'une aide financière accrue. Actuellement, le budget consacré dans le monde à la préservation de la biodiversité est de trois milliards de dollars. Certains pays en développement estiment qu'il en faudrait 100 fois plus d'ici 2020.

Achim Steiner s'attend à des discussions difficiles. Mais le directeur du PNUE juge que les pays riches, parce qu'ils bénéficient des richesses de la nature, devraient supporter une part des coûts liés à sa protection.

"Sinon, ce serait un accord inéquitable pour sauver la biodiversité de la planète, les pays en développement devant supporter le plus fort de ces coûts", a-t-il dit.

Avec Chisa Fujioka à Tokyo, Henri-Pierre André pour le service français, édité par Gilles Trequesser