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Prix immobilier

Pourquoi louer un appartement coûte de plus en plus cher alors qu'à l'achat les prix baissent

Les prix des biens à vendre ont tendance à baisser. Mais ce n'est pas le cas pour les appartements et les maisons mises en location. Une bonne partie de ce paradoxe s'explique par la hausse des taux et l'interdiction de louer des passoires thermiques.

Sur le marché immobilier, les baisses de prix sont la règle dans la plupart des villes mais les loyers, eux, continuent à augmenter allègrement. A tel point que la situation devient très tendue dans certaines villes où les appartements proposés à la location nécessitent d’afficher des revenus que de moins en moins de locataires sont en mesure d'avoir.

Selon le site spécialisé Beanstock, le loyer moyen à Paris est passé pour un studio de 900 à 950 euros entre 2021 et 2022 (soit +5,5%). L’envolée est encore plus forte à Marseille (+12% sur un an) et à Lille (+10%). Alors certes dans la cité phocéenne, le prix moyen du mètre carré a augmenté en 2022. Mais à Lille, les prix baissent.

+13% à Perpignan et + 12% à Nîmes pour un studio

Par ailleurs, la tendance vaut aussi dans les villes un peu moins grandes. Le loyer moyen demandé pour un studio a, par exemple, progressé de 12% à Nîmes et de 13% Perpignan. Même au Havre, la hausse atteint 6%.

L’explication est simple. Sur ce marché, la loi de l’offre et de la demande joue à plein. Avec, d’abord, une tendance de fond: la France compte de plus en plus de ménages, notamment du fait des divorces. Autrement dit, chaque année, le nombre de familles monoparentales, d’étudiants ne logeant plus chez leurs parents ou encore de personnes seules augmente.

Des locataires qui ne peuvent plus acheter

Or, face à cette hausse "naturelle", l’offre ne suit pas. Elle ne suit pas parce qu’on ne construit pas assez de logements mais également parce que deux phénomènes nouveaux sont venus perturber ce marché locatif déjà tendu: le coût des crédits immobilier et la loi qui interdit de mettre en location des passoires thermiques.

La hausse des taux a réduit la capacité d’un nombre croissant de primo-accédants d’aller au bout de leur projet. Ces locataires qui voulaient acheter et ne le peuvent plus, restent sur le marché locatif, faisant grimper la demande.

Passoires thermiques interdites à la location

Quant aux logements classés F et G interdits de location, leurs propriétaires ont très majoritairement préféré les mettre en vente plutôt que de financer les travaux nécessaires, ce qui, mécaniquement, a réduit le nombre de biens disponibles sur le marché locatif. Donc si les loyers augmentent autant c’est avant tout parce que la demande augmente plus qu’à l’ordinaire alors que l’offre a fondu.

Dans ce contexte, le plafonnement des loyers imposé par certaines municipalités, est-il salvateur pour les locataires? En partie seulement. D’abord parce que ce plafonnement ne concerne que cinq très grandes villes (Paris, Lille, Lyon, Bordeaux et Montpellier) ainsi que quelques communes limitrophes.

Le plafonnement des loyers contourné

Mais même dans ces villes, les loyers ont tendance à augmenter. D’abord, parce qu’une part non négligeable de propriétaires ne respecte pas le plafonnement. Il faut aussi faire avec tous ceux qui parviennent à le contourner en utilisant ce qu’on appelle dans le jargon immobilier des "compléments de loyer".

En clair, des propriétaires justifient que le loyer dépasse les limites fixées par les municipalités en arguant que leur appartement bénéficie d’une "vue exceptionnelle", qu’il a été "refait à neuf" ou que la cuisine est "tout équipée". Des arguments pas toujours recevables.

Des propriétaires moins enclins à louer si les loyers ne leur rapportent pas assez

C’est d’ailleurs pour lutter contre ces abus que la ville de Paris a mis en début d’année un nouveau site sur lequel les locataires peuvent vérifier que leur loyer est bien dans les clous. Et pour les aider à obtenir des baisses de loyer, elle s’engage à faire toutes les démarches nécessaires.

Mais cela n’ôte rien à l’autre conséquence du blocage des loyers. Cette mesure peut amener des propriétaires à ne plus mettre leur(s) bien(s) en location, car le rendement locatif n’est plus à la hauteur de leurs espérances. De quoi réduire un peu plus l’offre.

Pierre Kupferman
https://twitter.com/PierreKupferman Pierre Kupferman Rédacteur en chef BFM Éco