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Nord: 12 ans après la mort de Vincent Delory, tué au Mali, sa famille attend toujours des réponses

Vincent Delory et son ami Antoine de Léocour avaient été pris en otage au Niger et tués le lendemain au Mali lors d'une intervention de l'armée française pour stopper le convoi des ravisseurs.

Douze ans après la mort des nordistes Vincent Delory et Antoine de Léocour, tués au Mali lors d'une opération militaire après avoir été pris en otage au Niger, les familles des deux victimes attendent encore des réponses.

"Il reste beaucoup de zones d'ombre", déclare Annabelle Delory, sœur de Vincent, invitée ce lundi matin sur le plateau de BFM Grand Lille. "Sachant qu'on a eu, en douze ans, un nombre impressionnant de versions différentes de ce qu'il s'était passé."

Une intervention menée "dans l'urgence"?

Le 7 janvier 2011, Vincent Delory et Antoine de Léocour, originaires de Linselles, ont été pris en otage au Niger par les membres d'une organisation djihadiste. Les deux hommes ont été tués le lendemain, dans une opération militaire française ayant pour but de stopper le convoi des ravisseurs.

Mais douze ans après les faits, de nombreuses incertitudes planent encore sur les circonstances exactes de l'intervention des militaires français. Les familles des victimes dénoncent une opération précipitée et réalisée dans des conditions dangereuses pour toutes les personnes impliquées.

"Avant eux, on a toujours pris le temps de négocier, de prendre les renseignements nécessaires", rappelle Annabelle Delory. "Là, de toutes les informations qu'on a pu avoir, on voit que l'intervention s'est faite dans l'urgence. Elle s'est faite dans des conditions qui n'étaient pas bonnes pour les militaires qui sont intervenus et qui ont aussi mis leurs vies en danger pour les sauver."

Annabelle Delory dénonce une décision qui avait pour but d'"envoyer un message fort aux terroristes", mais que la France n'a par la suite "pas assumé". "C'est la décision qui a été prise d'intervenir qui les sacrifiés."

"À quoi ça a servi?"

Aujourd'hui, les familles de Vincent Delory et Antoine de Léocour espèrent encore obtenir des réponses sur le déroulé exact de l'opération. Un an après les faits, des éléments déclassifiés ont permis à la famille de Vincent de formuler l'hypothèse qu'un tir depuis un hélicoptère français aurait entraîné l'explosion du véhicule où se trouvait Vincent, rapportait RFI en 2014.

"Aujourd'hui, on s'est fait à l'idée de ne pas avoir de réponse exacte par rapport à ça", déclare Annabelle Delory. Elle dénonce en revanche une armée française qui n'a pas, selon elle, appris de ses erreurs.

"Derrière, il ne s'est rien passé. On a oublié ce qu'il s'est passé, on ne le commémore pas comme il se doit, et puis on a recommencé à payer des rançons, à négocier. Il y a encore eu des otages après eux. À quoi ça a servi?"

Ce dimanche a eu lieu une commémoration en hommage à Vincent et Antoine, qui s'est tenu en présence seulement de leurs familles et amis, sans représentant officiel de l'armée et de l'État. "C'est souvent nous qui devons initier les choses, qui devons réclamer. Cette année, on a dit 'on ne réclame pas, on fait nous-mêmes'."

Et même si Annabelle Delory reconnaît qu'il sera désormais "compliqué de savoir exactement ce qu'il s'est passé", elle compte bien continuer à attirer l'attention sur la situation, et pointer du doigt les responsabilités de l'État dans la mort de son frère.

"C'est que comme ça qu'ils peuvent continuer à vivre, que comme ça que ça pourra un minimum servir", déclare-t-elle.

Laurène Rocheteau