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Le tribunal de Lille étudie les conséquences environnementales d'un trafic de déchets

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/Photo d'archives - REUTERS/Stéphane Mahé

Neuf prévenus soupçonnés d'avoir organisé des transports illégaux de déchets sont jugés par le tribunal de Lille depuis lundi 18 décembre pour trafic illégal de déchets. Ce mardi 19 décembre, le tribunal s'est intéressé aux conséquences environnementales.

Pollution et "autocombustion": le tribunal de Lille s'est intéressé mardi 19 décembre aux conséquences environnementales du déversement illégal de déchets belges, au second jour du procès d'un vaste trafic transfrontalier, alors que des tonnes de détritus jonchent toujours le sol français.

Près de 10.000 tonnes de déchets provenant de Belgique ont été déversés illégalement en France entre 2018 et 2021, soit un préjudice estimé à plus d'1,5 million d'euros pour des communes et des entreprises du nord et de l'est de la France.

Neuf personnes comparaissent jusqu'à vendredi

Neuf hommes, dont cinq de la même famille, comparaissent jusqu'à vendredi devant la Juridiction interrégionale spécialisée (JIRS), en charge de la criminalité organisée, une première pour une affaire de trafic de déchets. Ils sont tous de nationalité française, sauf un Croate.

"Les déchets fermentent et dégagent du gaz, du méthane, et des phénomènes d'autocombustion peuvent se former", entraînant des risques d'incendie, a indiqué à la barre Erwan Pinvidic, expert et responsable au sein du Pôle français des transferts transfrontaliers de déchets, organisme chargé d'autoriser ces transferts.

Ce phénomène a notamment été observé à Hautcourt-Moulaine (Meurthe-et-Moselle), l'un des quatre sites de dépôt "illicite" expertisés par ce pôle en 2020, près de la frontière luxembourgeoise.

Trois de ces terrains ont depuis été débarrassés de leurs ordures par les propriétaires abusés, qui ont du débourser 126.000 euros, selon ce témoin.

Des déchets encore à même le sol

Sur le quatrième site, à Rédange (Moselle), 200 tonnes d'ordures gisent encore, quatre ans après les faits, la petite commune mosellane propriétaire des lieux n'ayant pas pu prendre en charge le nettoyage coûteux.

Cartons, plastiques, textiles, métaux... Le danger provient de la nature des détritus entassés: un mélange de déchets ménagers, industriels et de gravats provenant du bâtiment, non triés.

Des avocats s'étonnent que les sociétés qui ont émis les déchets ou les autorités n'aient pu être contraintes à récupérer les détritus entreposés illégalement.

"On est un peu coincés, malheureusement", a concédé Erwan Pinvidic, dont l'organisme est rattaché au ministère de la Transition écologique, indiquant que la réglementation ne lui donne "aucun pouvoir" en la matière.

Que ces déchets soient encore à même le sol est "une honte absolue", s'indigne auprès de l'AFP Muriel Ruef, avocate de plusieurs associations de défense de l'environnement, qui pointe par ailleurs "une certaine défaillance" de l'Etat français "dans la gestion de cette pollution".

"Dans l'attente de la reprise (des déchets), les autorités sont normalement tenues d'assurer leur conservation dans des conditions sûres", a-t-elle précisé, citant des textes européens.

A l'ouverture du procès, l'avocate avait évoqué un "scandale" écologique "à la mesure des territoires" impactés, inquiète notamment que certains dépôts aient eu lieu à proximité d'une rivière.

A.F avec AFP