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Néonicotinoïdes: Barbara Pompili justifie la réautorisation de l'insecticide pour la betterave

La ministre de la Transition écologique a répondu ce matin sur BFMTV aux critiques adressées au gouvernement après l'autorisation du recours temporaire à l'insecticide dans les champs de betteraves à sucre.

"Le moins longtemps possible". Invitée de la matinale de BFMTV, la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili a répondu aux critiques adressées au gouvernement après la ré-autorisation des néonicotinoïdes pour les semances de betteraves.

Un recours temporaire mais un pas de côté qu'ont déploré des élus et des associations écologistes, d'autant que la ministre qui a annoncé la ré-autorisation est celle qui en avait obtenu la suppression.

"Les néonicotinoïdes sont quasiment tous interdits, on a un problème sur les betteraves, on a perdu 4 ans", se défend Barbara Pompili. "On avait le temps de faire. La FNSEA nous dit aujourd'hui qu'il nous faut 2-3 ans pour trouver des solutions, on avait le temps sauf que ça n'a pas été fait".

"La filière n'a pas bougé ce qu'il fallait, la recherche n'a pas avancé suffisamment et l'Etat n'a pas assez piloté", a déploré la ministre. "Lorsque j'arrive aux responsabilités, je me rends compte que ce qui aurait dû être fait n'a pas été fait", constate Barbara Pompili.

"On doit trouver des alternatives"

La ministre de la Transition écologique a assuré sur BFMTV que l'utilisation de l'insecticide tueur d'abeilles se fera "le moins longtemps possible".

"Les filières vont devoir travailler très vite à trouver les alternatives parce qu'après ça sera terminé. Si on veut encore avoir de la betterave sucrière et une industrie du sucre en France dans les années qui viennent, on doit trouver des alernatives là maintenant et on n'attend plus et on ne laisse plus traîner comme cela a été fait depuis quatre ans", a ajouté Barbara Pompili.

Ce jeudi, jour de présentation des détails du plan de relance de 100 milliards d'euros sur deux ans censé accélérer la transition verte et préparer la France de 2030, le gouvernement a aussi présenté conseil des ministres un projet de loi permettant la réintroduction de semences de betteraves enrobées avec des néonicotinoïdes afin de protéger les rendements sucriers en France.

Le texte s'appuie sur l'article 53 du règlement européen sur les phytosanitaires permettant de déroger à l'interdiction de certains produits "en cas de circonstances particulières non maîtrisables, telles que celles qui affectent la culture de betterave sucrière en 2020".

Dans de nombreuses régions, les betteraves issues de semences non enrobées d'insecticide sont atteintes de "jaunisse", en raison d'un puceron vert vecteur de la maladie qui affaiblit les plantes.

Un revirement encadré

Sous le feu des critiques des écologistes et apiculteurs, le gouvernement, qui avait interdit ce type de pesticide en 2018, a détaillé une liste de mesures pour "encadrer" son revirement afin de tenter de limiter les effets néfastes sur l'environnement.

La ré-autorisation est temporaire jusqu'en 2023 et devra être accordée chacune des trois années par arrêté conjoint des ministères de l'Agriculture et de l'Environnement. Elle sera réservée à la filière betteraves et ne devrait pas être étendue à d'autres cultures comme le maïs, qui souhaitait aussi en bénéficier, ont indiqué des sources gouvernementales.

"A l'image du renoncement emblématique sur les néonicotinoïdes, pour Emmanuel Macron et son gouvernement l'environnement reste une variable d'ajustement" a estimé jeudi Jean-François Juilliard, directeur général de Greenpeace France.

Génération Ecologie a lancé une campagne pour s'y opposer, sa présidente et ancienne ministre de l'Ecologie Delphine Batho estimant qu'il avait été pris "sous pression des lobbys de l'industrie du sucre" avec des conséquences "monstrueuses" pour "les insectes, les oiseaux et l'ensemble du vivant". Europe Ecologie Les Verts (EELV) a demandé "un plan de soutien financier et d'accompagnement des agriculteurs de la filière betteravière".

5 millions d'euros débloqués dans les recherches agronomiques

Pour protéger les pollinisateurs, l'agence sanitaire Anses établira une liste de cultures de plantes mellifères qui ne pourront pas être cultivées derrière les betteraves, pour ne pas exposer les insectes l'année suivante à des résidus de produits enfouis dans les sols et remontés par la sève des végétaux.

Un plan de protection plus global des pollinisateurs est en cours de discussion pour la fin de l'année. Le gouvernement a par ailleurs débloqué 5 millions d'euros, dont une partie vient du plan de relance, pour accélérer les recherches agronomiques des semenciers afin de se passer de ces produits.

Hugues Garnier avec AFP Journaliste BFMTV