Marron Rouge: le pneu à la mode

L'Institut de l'économie circulaire a vu le jour au début du mois de février. Entreprises, experts, collectivités, responsables politiques, chercheurs, fédérations, associations, institutionnels, juristes. Tous vont réfléchir à comment créer autrement: récupérer des déchets pour en faire une seconde vie ou miser sur l'éco-conception. Certains n'attendent pas et s'engage comme Jean-Marc Attia et sa marque Marron rouge.

"J'aime les déchets". Cette phrase a de quoi surprendre mais quand elle s'accompagne d'un grand sourire, l'interlocuteur comprend vite que Jean-Marc Attia est animé par une passion. Celle de donner du sens à ce qu'il fait. Quand il voit une chambre à air, une ceinture de sécurité ou un pneu son esprit se met en ébullition. Et c'est ainsi que naissent les sacs, les trousses, les housses pour Ipad... et la marque Marron Rouge.

Rien ne semblait prédestiner cet homme à la création d'objets déco-design et accessoires de mode équitables et bien plus. A part peut-être l'inspiration léguée par son papa tailleur. Le profil type du "jeune cadre dynamique". Une jeunesse à sillonner le monde entre 2 avions. Numéro 2 d'une société informatique. Un premier break quand même en 2001 au sein du comité International de la Croix Rouge et une mission humanitaire en République Démocratique du Congo. Jean-Marc Attia en revient mais il n'est plus le même.

"Marre de faire des plans sociaux tous les jours". Un retour sur les bancs de l'école à l'INSEAD de Fontainebleau. En 2008, il décide alors d'arrêter sans trop savoir où il va. Et puis lors d'un voyage en Inde en janvier 2009, qu'il connait bien car il y retourne souvent, l'évidence. Lui qui accompagne une association qui aide des femmes et surtout finance la scolarité de leurs enfants, il se dit qu'il peut faire davantage pour ses femmes seules. Et créer un atelier de fabrication de linge de maison et les former. Pourquoi donc ne pas financer un business éthique entre l'Inde et la France ? Jean-Marc Attia qui habite Lyon va voir le Village des créateurs qui l'accueille. L'aventure "Marron Rouge" commence.

Lance à incendie

L'homme connaît bien le business et il a la sensibilité d'un designer. Il crée donc des accessoires mais aussi des meubles, des poufs, des tapis, des tabourets et des doudous en coton bio aux couleurs acidulées. Avec les matières les plus surprenantes. Chambre à air, ceinture de sécurité ou pneu mais aussi papier journal, sac de parachute ( surtout quand l'armée indienne a besoin de renouveler son équipement).

Comme rien ne l'arrête il souhaite désormais utiliser les lances à incendie des pompiers. Un prototype est déjà créé. Tout est fabriqué par des ONG indiennes qui luttent contre la pauvreté ou nourrissent les gamins des rues. Pas question pour autant de "proposer des ponchos ou du macramé". Avec son langage imagé, Jean-Marc Attia a des idées très arrêtées. Il peaufine les finitions. Les clients ont beau apprécier la démarche, c'est avant tout avec les yeux qu'ils choisissent. Les prix restent très raisonnables. Des sacs de 45 à 80 euros, des meubles jusqu'à 150 euros et des doudous autour d'une vingtaine d'euros. Il a commencé à tisser son réseau dans certains magasins. C'est aussi un fan des réseaux sociaux.

Semelle en pneu

Jean-Marc Attia voit avec plaisir sa petite entreprise grandir. Pas encore de rentabilité. Mais un chiffre d'affaires en hausse de 40 % l'an dernier. Jean-Marc Attia a envie d'avancer mais avec des valeurs humaines. "On sera plus rentable en faisant attention aux êtres humains." Sa stratégie est globale puisque sa plateforme logistique est celle créée par les frères Mérieux, Bioport, destinée au départ aux associations humanitaires.

Il ne cesse de fourmiller d'idées. Il quitte le Village des créateurs après deux ans. Peut-être bientôt son showroom à Lyon. Et maintenant les sandales. Stimulé par une connaissance sur Facebook, il est allé demander des conseils à un designer de chaussures également présent sur les réseaux sociaux. Et donc bientôt la mule avec une semelle en pneu, recouverte de toile de parachute avec des lanières en chambre à air.

Jean-Marc Attia lorgne aussi l'étranger. L'aventure 'Marron Rouge" n'en est qu'au tout début.

Nathalie Croisé de BFM Business