BFM Business
Bourse

200.000 livres gagnées grâce à un pays imaginaire: l’escroquerie de Gregor MacGregor

Portrait du soldat Gregor MacGregor

Portrait du soldat Gregor MacGregor - wikipedia

Gregor MacGregor, un soldat Écossais, vend du rêve... et surtout des terrains d'un pays inexistant. La base de cette escroquerie? Poyais, une nation fictive qui a piégé des centaines d'investisseurs entre 1817 et 1831.

Il est le plus grand escroc de son époque. Gregor MacGregor, issu d'une famille noble mais désargentée, se fait d'abord un nom dans l'armée britannique avant de s’embarquer en Amérique du Sud.

Peu investi dans les luttes indépendantistes sud-américaines, il se lance ensuite dans une aventure sur le point de devenir l'une des plus grandes supercheries du XIXe siècle. Son objectif: tirer profit de 32.000 kilomètres carrés de territoire sous l'emprise britannique.

Voici son plan. Après avoir passé plusieurs années en Amérique du Sud, où il dit avoir reçu le territoire du Poyais, MacGregor retourne en Grande-Bretagne. Armé de cartes détaillées et promesses de terres fertiles, MacGregor s'autoproclame en 1822 "cacique du Poyais", un pays qu'il invente de toutes pièces.

Plus précisément, il s’agit d’un État indépendant situé dans la baie du Honduras, avec comme capitale St Joseph. Pour renforcer sa supercherie, MacGregor conçoit un blason et introduit la propre monnaie de Poyais.

Le subterfuge fonctionne

Surfant sur la bulle spéculative d’une Amérique du Sud en pleine croissance, il retient l’attention des investisseurs pour les actifs latino-américains.

Ainsi débute une campagne publicitaire sans égale, ponctuée d'entretiens dans les journaux et de diffusion d’annonces. Il fait même composer et chanter des ballades en rapport avec Poyais dans les rues de Londres, d’Édimbourg et de Glasgow.

Ça y est, les investisseurs mordent à l'hameçon. Au total, environ 500 personnes achètent des terres de Poyais au début de l’année 1823. Beaucoup y investissent toutes leurs économies.

MacGregor vend des centaines d'actions, promettant un retour rapide sur investissement. En un an, pas moins de 200.000 livres sont empochées par l’escroc écossais. Des acheteurs signent des contrats de travail prêts à s’envoler vers Poyais. D’autres vendent leurs biens pour pouvoir s’offrir un morceau de terre du pays afin de l’exploiter.

Trop beau pour être vrai

L'illusion du Poyais se maintient jusqu'à l'arrivée des premiers colons. Attirés par les récits d'une terre d'abondance, ils découvrent à leurs dépens une jungle inhospitalière, sans trace de la civilisation promise. La désillusion est brutale. Beaucoup ne survivent pas à l'environnement sauvage, à la maladie et à la faim.

Pendant ce temps là, MacGregor s'enrichit. Il émet 200.000 livres d'obligations du Poyais, au taux de 6%.

Les survivants, une fois rentrés en Grande-Bretagne, exposent à la presse la vérité derrière le prétendu paradis. Si naturellement on s'attendait à une vague d'indignation contre le stratagème meurtrier de MacGregor, c’est tout le contraire qui se produit.

Incroyablement, certains le défendent, arguant qu'il est lui-même une victime de circonstances plus larges. Les médias britanniques s'emparent de l'affaire, mais MacGregor parvient à échapper à des conséquences sévères. Il continue ses escroqueries à une échelle réduite avant de quitter définitivement le Royaume-Uni pour le Venezuela.

Romy Azoulay