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Transports publics: le casse-tête du déconfinement

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- - Lionel BONAVENTURE / AFP

C’est officiel depuis ce mardi: les transports publics devront appliquer des règles de distanciation strictes au déconfinement, et donc prendre drastiquement moins de passagers.

Le déconfinement s'annonce particulièrement compliqué pour les transports publics: ils vont devoir appliquer de strictes règles de distanciation après le 11 mai, ce qui réduira drastiquement leur capacité au moment où la fréquentation devrait reprendre.

En présentant la stratégie de déconfinement du gouvernement, mardi à l'Assemblée nationale, le Premier ministre Edouard Philippe a annoncé que le port du masque serait obligatoire pour tous les voyageurs, au moins pour les trois semaines de période de transition post-confinement envisagée jusqu'au 2 juin. Ce point n'est pas une surprise, il faisait consensus.

Condamner un siège sur deux

Mais contrairement à ce que demandaient les opérateurs de transports -SNCF, RATP, Transdev, Keolis, les indépendants d'Agir et leur fédération l'UTP-, Edouard Philippe a suivi l'avis du Conseil scientifique: porter un masque ne saurait affranchir du respect d'une distance d'un mètre au moins autour de chaque passager.

"Les opérateurs devront s'organiser pour permettre, même dans le métro, de respecter les gestes barrières", a déclaré Edouard Philippe. "Cela veut dire, par exemple, que la capacité du métro parisien sera drastiquement réduite par rapport à sa capacité normale. Qu'il faudra condamner un siège sur deux, favoriser, par des marquages au sol la bonne répartition sur les quais, se préparer à limiter les flux en cas d'affluence", a-t-il précisé.

Les pouvoirs publics vont en contrepartie s'employer à faire "remonter au maximum l'offre de transports urbains" à partir du 11 mai. A Paris par exemple, l'offre de la RATP devrait remonter de 30% de véhicules en circulation aujourd'hui à 70%, avant de revenir "rapidement" à son niveau habituel.

15% de métros au 11 mai?

Or, obliger les passagers à garder leurs distances dans un métro, un tramway ou un bus de la capitale et de sa banlieue en réduirait le nombre d'"au moins 80%", selon la RATP. Mathématiquement, celle-ci devrait donc fonctionner à moins de 15% de sa capacité le 11 mai, alors que bureaux et commerces rouvriront. 

Edouard Philippe veut aussi "faire baisser la demande", en favorisant le télétravail, en étalant les horaires et "en demandant aux Français de considérer que les transports aux heures de pointe doivent être réservés à ceux qui travaillent". 

Des concertations doivent s'engager très rapidement au niveau local entre les autorités organisatrices, les usagers et les opérateurs de transport pour régler les détails techniques.

Des attestations pour prendre les transports

"S'il faut organiser les flux, réserver les transports à certaines heures à certaines populations, nous accompagnerons les autorités organisatrices de transport", a-t-il précisé.

En Ile-de-France, la patronne des transports régionaux Valérie Pécresse a déjà envisagé de les réserver aux travailleurs dûment munis d'une attestation de leur employeur.

La RATP a indiqué mardi qu'elle s'emploierait avec sa tutelle et ses partenaires à "réadapter l'offre et limiter les flux afin de rendre possible la distanciation sociale, en particulier aux heures de pointe".

Dans la pratique, un certain nombre de questions vont se poser: comment faire respecter les règles de distanciation? Faudra-t-il filtrer les gens à l'entrée des rames et des stations, au risque de les entasser sur un quai ou un trottoir? Pourra-t-on empêcher quelqu'un de monter dans un bus? Que faire si un passager n'a pas de masque?

Des contrôles de port du masque

"S'agissant du port du masque, nous organiserons des contrôles avec les forces de l'ordre, avec les opérateurs de sûreté de la SNCF et de la RATP, et pour cela le cadre est bien posé", a indiqué sur France 5 le secrétaire d'Etat aux Transports Jean-Baptiste Djebbari.

Pour les autres sujets pratiques, "nos allons cheminer les jours prochains, pour mettre en place le meilleur niveau de régulation", a-t-il dit. "Ceux qui connaissent le mieux ces sujets, ce sont évidemment les opérateurs de transport et ceux qui en sont coresponsables, l'Etat et les régions."

Sur les longues distances, les déplacements interdépartementaux ou interrégionaux seront toujours réduits après le 11 mai "aux seuls motifs professionnels ou familiaux impérieux, pour des raisons évidentes de limitation de la circulation du virus", a annoncé Edouard Philippe.

"Nous allons continuer à réduire l'offre, à exiger une réservation obligatoire dans tous les trains -TGV ou non-, à décourager les déplacements entre départements", a-t-il relevé, ajoutant que des attestations seraient toujours nécessaires pour les voyages dépassant 100 kilomètres.
N.G. avec AFP