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Séismes en Alsace: deux "écarts" ont été commis par l'exploitant d'une centrale géothermique

La préfecture du Bas-Rhin a présenté mercredi les conclusions d'une enquête diligentée après les séismes provoqués par l'activité d'une centrale de l'entreprise Fonroche Géothermie, révélant des "écarts importants" commis par l'exploitant.

La préfecture du Bas-Rhin a présenté mercredi les conclusions d'une enquête administrative diligentée après les séismes provoqués par l'activité d'une centrale géothermique, faisant état "d'écarts importants" commis par l'exploitant, qui a contesté ces conclusions.

Réalisée à la demande de la préfecture après les séismes qui ont ébranlé l'agglomération strasbourgeoise le 4 décembre, dont l'un de magnitude 3,5, l'enquête "montre qu'il y a eu des écarts importants par rapport à l'autorisation" accordée à l'entreprise Fonroche Géothermie, a annoncé la préfète Josiane Chevalier lors d'une conférence de presse.

Deux non-conformités découvertes

"Cette analyse a mis en évidence deux non-conformités, a détaillé Hervé Vanlaer, directeur de la Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal) du Grand Est. La première est un forage plus profond que prévu", réalisé jusqu'à 5000 mètres, contre une autorisation à "4200 mètres, avec une tolérance de 600 mètres".

"On est pleinement rentré dans le massif cristallin, le granit", a précisé Hervé Vanlaer, "et on sait que le granit peut avoir des réactions sismiques plus importantes".

Le deuxième "écart" relevé concerne la pression à laquelle l'eau prélevée en profondeur était ensuite réinjectée vers le sous-sol.

"Il était prévu de ne pas dépasser 100 bars de pression en tête de puits, mais en novembre 2019 et août 2020, il a été constaté des pressions supérieures, de 150 et 140 bars" respectivement, a exposé Hervé Vanlaer. En novembre 2019, un séisme de magnitude 3,1 avait déjà été enregistré à 5 kilomètres du site de géothermie, dont l'origine, naturelle ou liée à l'activité humaine, n'est pas définie avec certitude.

La préfecture et la Dreal ont cependant souligné que le lien de cause à effet entre ces "écarts" et les séismes n'était pas établi. Un "comité d'expert" sera mis en place "en début d'année" 2021 pour se pencher sur cette question.

L'"hypothèse" des poursuites

"L'entreprise ne respecte pas ce qui est prévu dans un arrêté préfectoral, c'est une faute", a conclu la préfète, indiquant que des poursuites étaient "une hypothèse à ne pas exclure".

Jean-Philippe Soulé, le directeur de Fonroche Géothermie, a fermement contesté ces conclusions. Initialement, "on a foré jusqu'à 4700 mètres de profondeur", a-t-il assuré. La prolongation du forage, jusqu'à 5.000 mètres, a été réalisée ensuite, à partir de fin janvier 2020.

"Cette extension, ce n'est pas pour nous permettre de produire, c'est une extension à des fins de recherche de données scientifiques, réalisée dans le cadre d'une expertise mandatée par la préfecture elle-même", pour déterminer les causes du séismes de novembre 2019, selon lui.

Jean-Philippe Soulé assure également que la limite des 100 bars s'applique à la pression mesurée à l'extrémité basse du puits injecteur et non en tête de puits, autorisant des surpressions en surface.

Ce projet de centrale géothermique, implantée à Vendenheim, dans l'agglomération strasbourgeoise, a été définitivement arrêté après les séismes du 4 décembre. Il représentait un investissement de près de 100 millions d'euros.

Sur place, afin de limiter les risques sismiques, les opérations de mise à l'arrêt se poursuivent progressivement. "On a fait à peu près la moitié du chemin" a précisé Hervé Vanlaer, rappelant qu'une secousse de magnitude 2,5 avait encore été enregistrée le jour de Noël.

Pour l'heure, les trois autres projets de développement de centrales géothermiques dans le département, portés par Fonroche Géothermie et Electricité de Strasbourg, sont suspendus.

"Je doute fort qu'en 2021 on puisse redémarrer quelque chose, il faudra du temps, a prévenu la préfète. L'acceptabilité sociale de la géothermie est devenue très faible".
P.D. avec AFP