BFM Patrimoine
Placements

L’appétence des épargnants pour les actifs risqués sera-t-elle durable?

Le regain d'appétit des particuliers pour la Bourse et les actifs risqués peut-il durer?

Le regain d'appétit des particuliers pour la Bourse et les actifs risqués peut-il durer? - Pixabay

[AVIS D'EXPERT] Depuis le début de la pandémie, les épargnants se sont massivement tournés vers des actifs risqués. Décryptage avec notre expert Guillaume Almeras, fondateur du site de veille et de conseils Score Advisor.

C’est un phénomène désormais patent et l’effet sans doute le plus inattendu de la crise sanitaire de 2020-2021: les épargnants ont de plus en plus d’appétence pour les actifs risqués. Portée par l’entrée sur le marché d’investisseurs de plus en plus jeunes (ceux qu’on a nommés les "Robinhood"), cette tendance touche aussi bien les Etats-Unis que l’Europe et profite à la Bourse et aux cryptos, tout du moins jusqu'à cette année. L’assurance-vie en représente en France un exemple frappant.

Selon les chiffres publiés par l’ACPR, après une baisse marquée de la collecte nette en 2020, l’assurance-vie a connu un fort rebond en 2021. Pourtant comme en 2020, la collecte nette sur les supports en euros a été nettement négative (-12,3 milliards €), tandis que la collecte nette sur les supports en unités de compte (UC) a été particulièrement dynamique et a atteint un niveau inédit depuis 10 ans (30,6 milliards d’euros).

Dans ce contexte et, comme c’est son rôle, l’ACPR appelle les établissements financiers à "un devoir de conseil accru à l’égard des assurés, de sorte que ces derniers soient bien conscients des risques de pertes de capital auxquels ils sont exposés en cas de retournement des marchés boursiers et qu’ils conservent leur confiance dans ce produit".

Collecte record au premier trimestre

Depuis le début de l’année, cette appétence pour les risques des épargnants ne s’est pas démentie. Selon les chiffres publiés par France Assureurs, l'appétit des épargnants pour les unités de compte est toujours vif. Celles-ci compensent une collecte nette négative sur les fonds en euros en mars. Cet engouement a permis à l'assurance vie de réaliser sa meilleure collecte nette depuis dix ans pour un mois de mars (+2,2 milliards d'euros) comme pour un premier trimestre (+8,4 milliards d'euros).

Malgré tout, faut-il vraiment parler d’appétence "pour le risque" derrière ces comportements? Depuis deux ans, il est davantage probable que le public aura constaté l’étonnante santé des marchés financiers. Et il a entendu dire que tout cela reposait sur les liquidités déversées par les Banques centrales. Ainsi, alors que la rémunération des supports classiques d’épargne est quasi inexistante du fait de la faiblesse des taux, il est très probable que beaucoup se disent que les marchés actions offrent des possibilités de gains incomparables tout en étant finalement très peu risqués.

Certes, les craintes liées à l’inflation et aux récessions sont de plus en plus fortes mais cela ne change pas les comportements. Au contraire ! Cela pousse à valoriser le plus possible son épargne sur des marchés qu’on imagine immunisés du fait du soutien des banques centrales. Et ceci, dans la mesure où les conséquences macroéconomiques et monétaires d’une inflation vive ne sont ni comprises, ni aperçues. On peut ainsi se demander si, plutôt que de plus en plus tentés de prendre des risques, on n’a pas en réalité affaire à des épargnants qui ne les voient pas. Il faudra voir comment les comportements d'épargne évoluent dans les prochains mois, alors que les taux remontent et que la plupart des actifs plongent depuis le début de l'année, à l'instar du CAC 40 qui enregistre un repli de près de 15% depuis janvier.

Par Guillaume Almeras, fondateur du site de veille et de conseils Score Advisor