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Le géant américain de "l'hyper-consommation" Costco peut-il s'imposer en France?

Quatre ans après l'ouverture de son premier magasin, Costco s'apprête à en ouvrir un second en Ile-de-France. Un rythme plus lent que prévu malgré l'engouement des clients pour ce concept de club-entrepôt avec abonnement.

Des jeans Levi's, des Karcher, du papier toilette, des énormes paquets de pâtes et de riz ou encore du champagne Cristal Roederer et même un collier de diamants de 40 carats à 300.000 euros... Voilà le type de produits que vous pouvez trouver au magasin Costco de Villebon-sur-Yvette (Essonne).

Ouvert depuis 2017, ce premier magasin dans l'Hexagone du géant américain de la grande distribution (Costco est le numéro 2 mondial du secteur avec 192 milliards de dollars de chiffre d'affaires) a réussi à s'imposer dans sa zone de chalandise.

Malgré la pandémie, l'activité n'a pas faiblie et cet entrepôt de 10.500 m² devrait réaliser 140 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel (exercice clos à fin septembre), soit une progression de plus de 16% en un an. Le panier chez Costco est très élevé avec 165 euros d'achats par client en moyenne.

"En 2020, ça a été les montagnes russes, reconnaît Gary Swindells, le président de la filiale française. Le début a été très fort et après, ça a été plus difficile avec les restrictions de transports, les couvre-feux qui nous ont obligé à fermer à 17h30, la fermeture des rayons non-essentiels... Mais malgré ça, nous avons continuer de progresser. Depuis que nous avons ouvert en 2017, chaque année est meilleure que la précédente."

Pour faire ses courses chez Costco, il faut être membre du club, c'est à dire souscrire un abonnement de 36 euros par an. Comme dans un magasin Metro, seuls les porteurs de cartes peuvent entrer et faire leurs courses. En contrepartie, les clients bénéficient de prix très attractifs (entre 5 et 35% de réduction) souvent plus bas que dans le e-commerce. Et ce sur des produits alimentaires de base autant que sur des produits d'équipement (télés, électroménager) voire des produits de luxe comme la bijouterie, le champagne millésimé ou le caviar.

Deux magasins en 10 ans

Le secret de Costco: peu de produits (3500 références, 10 à 20 fois moins que dans un hypermarché), elle achète de très gros volumes et ne marge quasiment pas sur les produits vendus. Ce sont les abonnements payés par les clients qui permettent à Costco de faire des bénéfices.

Ce concept qui fait fureur aux Etats-Unis n'a semble-t-il pas rebuté les Français. En quatre ans, Costco a réussi grâce au bouche à oreille (elle ne fait aucune publicité) à convaincre 102.000 clients hexagonaux de souscrire un abonnement. En comptant les membre de la famille et les collaborateurs des entreprises, cela fait 165.000 cartes Costco qui sont en circulation en France. Principalement auprès des particuliers.

"85 à 90% de nos membres sont des particuliers, assure Gary Swindells. Dans nos ventes, nous constatons que la clientèle pro est un peu plus importante (aux alentours de 25%) mais le grand public reste très majoritaire."

Le concept séduit donc mais son déploiement reste très lent dans l'Hexagone. Costco France a été créée en 2012, le premier magasin est sorti de terre en 2017 et il faudra quatre ans de plus pour qu'un second Costco voit le jour. En novembre, le groupe va inaugurer un nouvel entrepôt à Pontault-Combault, en Seine-et-Marne. Une décennie de présence en France pour deux magasins ouverts.

L'enseigne qui visait une quinzaine d'ouvertures d'ici 2027 aura du mal à y parvenir.

La faute aux nombreux recours de la part des concurrents de la grande distribution française et à une réglementation très contraignante en matière d'implantation commerciale.

"On espérait aller plus vite, reconnaît le patron de Costco France. On n'est pas contre les recours mais les délais très longs retardent les projets, déplore le patron de lafiliale. Ca nous a cependant aussi permis de mieux comprendre le marché, d'améliorer nos relations avec nos fourniseurs."

La loi Climat qui fixe un gel des nouvelles surfaces commerciales est de plus une nouvelle contrainte pour le groupe américain.

"Reproduire le schéma de Villebon risque d'être très difficile à l'avenir, concède Gary Swindells. Les maires nous disent de reprendre des friches plutôt que de construire de nouveaux magasins. Il va falloir qu'on soit à l'affût des fermetures de magasins."

C'est ce qui s'est passé à Pontault-Combault. Le groupe a repris les murs d'un Leclerc qui a fermé ses portes les 31 décembre dernier. En 10 mois, Costco a transformé le magasin, recruté près de 300 personnes via notamment des sessions de job dating à la mairie de Pontault-Combault et fait une demande d'extension pour agrandir le magasin (ce magasin Leclerc faisait 8000 m² alors que Costco en a besoin de 10.000 pour déployer son offre). Avant même son ouverture, Costco assure que 3000 futurs clients de la zone ont déjà pris leur carte.

Une ouverture en régions d'ici 2024

Alors que l'enseigne compte 29 magasins au Royaume-Uni et bientôt quatre en Espagne, elle ne désespère pas de s'imposer en France et dans le reste de l'Europe comme elle l'a fait en Amérique du nord où elle compte 700 magasins. En France, elle vise toujours l'ouverture d'une quinzaine de magasins à terme. Quatre à six en Ile-de-France et le reste dans les grandes villes du pays. Le groupe souhaiterait être présent à Lyon, Nice, Toulouse ou Marseille.

"Nous avons quelques pistes avancées en province, assure Gary Swindells. Une ouverture hors d'Ile-de-France pourrait être envisageable d'ici la fin d'année 2024."

D'ici là, l'enseigne qui se présente comme le "Ikea de la grande consommation" va continuer son opération séduction auprès des élus locaux et des groupes de distribution français qui ne voient pas d'un bon oeil l'arrivée du géant américain sur leur zone.

"Nous ne sommes pas en concurrence avec les hypers, d'ailleurs moi je fais mes courses au Auchan voisin pour la plupart des produits, confie le patron de Costco. C'est vrai que lorsqu'on s'implante, il y a un effet curiosité qui fait perdre les premiers mois un peu d'activité aux hypers de la zone. Mais nous attirons un flux important de clients (15.000 par semaine) qui leur est profitable au final. Le Auchan de Villebon-Sur-Yvette est en train de s'agrandir, c'est que ça ne doit pas aller si mal pour eux."
Frédéric Bianchi
https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco