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Symbole de la déflation chronique du Japon, les magasins à "100 yen" souffrent désormais de l'inflation

Le pays compte plusieurs milliers de magasins où toutes les marchandises coûtent 100 yen, soit 70 centimes d'euros. Après avoir profité des décennies de déflation dans le pays, ces institutions sont désormais frappées par l'inflation et la chute du Yen.

Seiji Yano entre dans une ère de turbulences inédite pour lui. Le patron Daiso Industries fait face à des vents contraires à ceux qui avaient porté son entreprise pendant des années.

Car Daiso est un des plus importants réseaux de magasins à 100 yen (100-yen shop), une institution au Japon. L'entreprise est même la première à avoir lancé cette mode en 1991 avant que de nombreux candidats ne s'engouffrent dans la brèche. On compte aujourd'hui plus de 8400 de ces magasins dans l'archipel, selon Teikoku Databank.

Les magasins à 100 yen ont connu un succès phénoménal à mesure que le Japon s'enfonçait dans la déflation. Contrairement à l'inflation, la déflation est une baisse chronique des prix, redoutable pour l'économie d'un pays car les consommateurs ont tendance à reporter leurs achats s'attendant à payer moins plus tard. Une situation qui paralyse l'économie et brise l'investissement et dont le Japon a mis des années à se relever.

Forcément, dans une économie de déflation, les magasins où tout se vend à 100 yen ont eu un succès considérable. Véritable symbole de cette époque qui semble s'être terminée en 2013 avec le retour de l'inflation, Daiso fait désormais face à une crise hors-norme.

Chute du yen

Car la hausse des prix, qui frappe aussi le Japon, rend le business model du groupe particulièrement fragile. Son patron n'entend pourtant pas répercuter l'inflation sur les consommateurs. "Bien sûr, nos bénéfices sont réduits" explique Seiji Yano au Financial Times. "Mais nous n'avons pas augmenté nos prix. Nous protégerons le prix de 100 yen".

L'inflation n'est pas la seule cause des déboires des magasins à 100 yen. La monnaie a aussi lourdement chuté depuis le début de la guerre en Ukraine, notamment en raison de l'inertie de sa banque centrale face à l'inflation. Le dollar valait encore 115 yen début mars, il en vaut désormais 135.

Pour Daiso, qui importe les trois-quarts de sa marchandise, le taux de change est particulièrement douloureux. Ajoutez à cela les difficultés de fret qui ont augmenté les prix des transports depuis la crise du Covid-19...

Mais de la même façon que Daiso a parié sur la déflation, l'entreprise parie aussi sur l'inflation avec des magasins à 300 yen qui se multiplient déjà dans l'archipel. Elle cherche aussi à produire davantage au Japon pour réduire les coûts de transports et de logistique.

En réalité, Daiso est en première ligne face à un phénomène que beaucoup de Japonais avaient oublié: l'inflation. Cette fois, elle est bien de retour.

Thomas Leroy Journaliste BFM Business