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Inflation: hausse des prix de 3% en avril dans les grandes surfaces, du jamais vu depuis 14 ans

L'inflation signe son grand retour en grande distribution avec des hausses spectaculaires en avril. D'ici l'été la hausse pourrait même atteindre 5% selon Iri.

Cette fois l'inflation est bien là. Si on constatait des hausses de prix dans les grandes surfaces depuis quelques mois, elles étaient jusqu'à présent limitées à quelques produits premier prix (pâtes, surgelés, huiles...). Mais depuis quelques semaines, la hausse des prix s'est généralisée et les consommateurs commencent à sentir la différence dans leur chariot de courses.

De 0,58% en février, la hausse des prix des produits de grande consommation (alimentaire + hygiène) est passée 1,49% en mars et presque doublé en avril pour atteindre 2,89% sur un an, selon Iri. Il s'agit ici de l'inflation de la demande, c'est-à-dire la hausse moyenne des prix des produits réellement achetés par les clients des grandes surfaces et pas seulement des relevés de prix dans les magasins. Sur les seuls produits alimentaires, la hausse constatée dépasse même les 3% (3,01% précisément).

Evolution des prix des produits de grande consommation en grandes surfaces (Iri)
Evolution des prix des produits de grande consommation en grandes surfaces (Iri) © BFM Business

Des niveaux d'inflation qui n'avaient plus été constatés par Iri depuis 14 ans! Il faut remonter à mi-2008 pour observer des hausses supérieures à 3% en grande distribution. Cette années-là, les prix avaient grimpé de 4,7% tous produits confondus. Depuis la fin des années 2000 et sur l'ensemble des années 2010, la tendance était plutôt à la stabilisation voire à la déflation comme on peut le constater sur ce graphique.

L'évolution des prix depuis 2007.
L'évolution des prix depuis 2007. © Iri

Cette hausse concerne désormais tous les segments. Les grandes marques connues d'abord, qui depuis la fin des négociations commerciales ont pris en moyenne 2,64%, les marques de distributeurs ensuite avec une inflation constatée de 3,28% et surtout les premiers prix avec une flambée de 6,6%.

Si la hausse est plus importante sur les produits les moins coûteux c'est parce que ce sont des produits qui ne sont pas soutenus par du marketing et dont le poids des matières premières est plus important dans le prix final.

La flambée des pâtes

Par type de produits, ce sont les pâtes alimentaires qui connaissent la hausse la plus spectaculaire. +15,31% en moyenne sur un an devant les viandes surgelées (+11,34%), les farines (+10,93%), les huiles (+9,98%) et les moutardes (+9,26%).

"La hausse des prix touche à ce jour plus de 90% des catégories et atteint des niveaux très élevés sur de plus en plus de produits, constate Emily Mayer, directrice business Insight d’IRI dans LSA. Si l’inflation des pâtes ne progresse que faiblement par rapport à mars, elle atteint toutefois les +15% en avril. La viande, les huiles et la farine affichent désormais une inflation à 2 chiffres. La progression de l’inflation comparativement à mars est très forte sur la viande et le café. Les catégories de papier (essuie-tout, papier toilette, mouchoirs) sont sur des niveaux élevés de progression de prix autour de +6%."

Une hausse des prix qui devrait encore prendre de l'ampleur. Face à la hausse des coûts des matières premières, les industriels et les distributeurs ont rouvert un cycle de négociation qui s'étaient initialement achevé mi-mars. Les deux parties s'étaient mis d'accord sur une hausse moyenne de 3% mais la pression accrue sur les matières premières pourraient conduire à une hausse moyenne de 5% au début de l'été, anticipe Iri.

"Le conflit en Ukraine vient ajouter des pressions considérables (prix et approvisionnement) sur les sujets déjà très en tension que sont l’énergie et les matières premières agricoles de base de l’alimentation humaine et animale (blé, maïs, tournesol, orge, colza…), analyse Iri dans sa note mensuelle. La durée et la gravité de la guerre en Ukraine détermineront l’ampleur du pic d’inflation et la durée de l’épisode."

Le pastis en baisse

Dans ce contexte, certains produits sont pourtant étonnamment épargnés. Des produits sur lesquels les distributeurs consentent à des efforts de prix pour se démarquer de la concurrence. C'est le cas du jambon (-1,32% en avril), des couches culottes (-1,56%) et surtout des apéritifs anisés (-2,87%).

Initié par Leclerc en décembre, la "guerre du Ricard" touche désormais l'ensemble de la grande distribution qui propose en moyenne le litre de pastis à moins de 20 euros. Un effort permis par la nouvelle loi Egalim qui a revu son mode de calcul sur la majoration du seuil de revente à perte fixé à 10%. Dans l'ancienne mouture, ce seuil était calculé en incluant les droits de consommation, l'assiette de calcul se fait désormais avant la prise en compte de ces "taxes". Or sur les spiritueux, ces taxes sont très élevées et représentent 12% du prix final d'une bouteille de Ricard.

Frédéric Bianchi
https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco