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Vinci quitte le conseil d'administration d'ADP et pourrait bouleverser les équilibres

Vinci a annoncé sa sortie du conseil d'administration d'Aéroports de Paris.

Vinci a annoncé sa sortie du conseil d'administration d'Aéroports de Paris. - Dominique Faget - AFP

Vinci vient d'annoncer sa sortie du conseil d'administration d'Aéroport de Paris. Sa décision, a priori sans conséquence, risque de déteindre sur la relation franco-néerlandaise dans le secteur aérien.

Vinci risque de provoquer un effet papillon lourd de conséquence chez ADP. En annonçant qu'il quittait le conseil d'administration d'Aéroports de Paris (ADP), dont il détient 8%, le géant français de la concession et du BTP veut calmer le jeu.

Ces derniers mois, la pression montait entre les deux groupes – Vinci est le premier actionnaire privé de Roissy et d'Orly, après l'Etat français – en raison de la présence de son patron, Xavier Huillard, au conseil d'administration d'ADP. Sa position l'exposait depuis plusieurs années à des risques de conflits d'intérêt, notamment en cas d'appels d'offres où les deux entreprises seraient concurrentes.

Une décision étonnante, alors que Vinci n'a jamais caché son intérêt pour racheter le gestionnaire des aéroports parisiens quand sa privatisation était envisagée l'an passé – sa privatisation devrait revenir sur la table après la présidentielle de 2022 et lorsque le trafic aérien aura repris.

Le groupe ne lâche pas pour autant ses intérêts dans ADP et son ambition de racheter un jour le groupe, reste intacte. Vinci espère, en quittant le conseil d'administration, mettre la pression sur l'aéroport d'Amsterdam, Schiphol, qui détient lui aussi 8% du capital d'ADP. Car sa présence au conseil d'administration l'expose, de fait, aux mêmes conflits d'intérêts que Vinci.

"C'est compliqué" selon le patron d'ADP

Vinci n'a guère apprécié qu'en coulisse, l'aéroport d'Amsterdam se soit opposé à la privatisation des aéroports parisiens que le groupe lorgne depuis de longues années, et veut que la question de sa présence au conseil d'administration soit elle aussi posée. Mais les aéroports de Paris et Amsterdam étant davantage partenaires que concurrents – ADP est aussi actionnaire de Schiphol – c'est l'ensemble de leurs liens, et toute la relation franco-néerlandaise entre les deux aéroports, qui serait remis à plat.

Nos amis de Schiphol nous font sortir du conseil de surveillance où nous sommes représentés dès qu'il y a le moindre problème un peu sensible, et nous ne nous privons pas de les faire sortir [de notre conseil d'administration] lorsque l'on parle de tarifs ou de politique commerciale par exemple", a réagi ce mardi matin Augustin de Romanet, patron d'ADP, sur le plateau de BFM Business. Mais "c'est compliqué", a-t-il néanmoins reconnu.

La sortie complète de Schiphol du conseil d'administration d'ADP "est un sujet qui est à l'ordre du jour de prochaines discussions avec les Pays-Bas", a précisé le dirigeant. Or, le sujet est épineux car la relation franco-néerlandaise tangue déjà au sein de l'alliance entre Air France et KLM. "Même si la connexion du lien avec les Pays-Bas existe, ce n'est pas tout à fait pareil", a commenté le PDG d'ADP, même s'il est "possible qu'il y ait un miroitement" entre les deux dossiers.

Bras de fer franco-néerlandais

De quoi rompre définitivement les liens entre les deux pays dans le secteur aérien? L'Etat français et l'Etat néerlandais se livrent à un important bras de fer depuis bientôt deux ans: alors qu'ils sont tous les deux actionnaires d'Air France-KLM, l'Etat néerlandais était monté à la surprise générale en février 2019 au capital de KLM, invoquant la défense des intérêts néerlandais et du "flagship" KLM, dont Schiphol est le grand hub. Les relations sur la question aérienne sont depuis extrêmement tendues entre Paris et La Haye, et cela pourrait déteindre sur la relation entre les deux aéroports.

Matthieu Pechberty avec Jérémy Bruno