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Taxe sur les superprofits: coup de pression sur le gouvernement, qui temporise toujours

Certains élus de la majorité réclamant désormais eux aussi une taxe exceptionnelle sur les entreprises qui dégagent des profits exceptionnels suite à la situation géopolitique.

La pression monte encore sur le gouvernement pour mettre à contribution les entreprises ayant réalisé d'importants bénéfices grâce à l'inflation, certains élus de la majorité réclamant désormais eux aussi une taxe exceptionnelle sur les "superprofits", une option écartée à ce stade par l'exécutif.

Une tribune de députés Renaissance (ex-LREM), des appels de deux présidents de commission de l'Assemblée, et un amendement déposé par douze députés au projet de budget rectificatif, au menu en fin de semaine au Palais Bourbon... la majorité entre dans le jeu pour obtenir davantage de "solidarité" des grands groupes.

"Nous ferons payer les profiteurs de la crise. Parce que je suis opposé aux rentes, j'affirme que les entreprises qui tirent de la crise des profits doivent payer plus", a ainsi lancé jeudi sur Twitter le président de la commission des Lois Sacha Houlié.

Contribution de 15%

L'amendement déposé lundi par douze députés Renaissance, à l'initiative de Stella Dupont, propose ainsi une "contribution exceptionnelle de solidarité" de 15% sur les bénéfices des "sociétés pétrolières et gazières, de transport maritime et de marchandises" qui "réalisent un chiffre d'affaires supérieur à 1 milliard d'euros".

Ils estiment que ces entreprises "n'ont pas répondu à la hauteur des besoins en dépit de la logique de solidarité et d'équité qui mériterait de prévaloir".

Cet amendement provient d'élus de l'aile gauche de la majorité, dont trois anciens ministres, mais il est le signe que le débat grandit dans le camp présidentiel, et au-delà.

LR pas contre

Les députés LR aussi ont avancé leur pions, leur président Olivier Marleix estimant que son parti n'avait "aucune hostilité à ce que l'Etat, par la loi, mette davantage à contribution les pétroliers si c'est nécessaire".

Jusqu'ici l'offensive venait surtout de l'alliance de gauche Nupes et dans une moindre mesure du RN. Chacun propose ses propres amendements, relativement proches.

En ligne de mire: essentiellement les énergéticiens, comme TotalEnergies, et le géant du transport maritime CMA CGM, qui profitent à plein de la flambée des cours du pétrole et du gaz et des coûts du transport par conteneurs.

Mais cette montée au front d'élus peut-elle aboutir au vote d'une taxe? "Il y a très peu de chances" que cela arrive, dit-on au groupe Renaissance, malgré la majorité relative des macronistes.

"On va voir", lâche prudemment une source gouvernementale qui estime que "c'est un débat qu'on doit avoir", dans la lignée du message passé mardi par la Première ministre à la majorité.

"Faire bouger" les entreprises

Cette mobilisation vise à "faire bouger les lignes et les énergéticiens", dit un député promoteur de la taxe, qui estime que le gouvernement n'est pas assez ferme.

Côté exécutif, on freine toujours des quatre fers. Depuis des semaines, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire défend plutôt l'idée de contributions volontaires des entreprises.

Celles-ci ont déjà annoncé des gestes - baisse des coûts de transport pour CMA CGM et remise à la pompe pour TotalEnergies.

"Doivent-elles faire plus ? Oui, certainement", a reconnu M. Le Maire dans Le Monde mercredi soir. "Nous ferons les comptes lors du projet de loi de finances 2023" à l'automne, a-t-il averti, en écho à Emmanuel Macron qui a promis le 14 juillet une "contribution" des entreprises mais "pas dans la démagogie".

En attendant à Bercy, on relativise la portée de l'action de "cas individuels" parmi les quelque 250 députés de la majorité.

Des annonces à la fin de la semaine

Dans une tribune jeudi dans Les Echos, une dizaine d'autres députés Renaissance, dont David Amiel, ancien conseiller d'Emmanuel Macron à l'Elysée, défendent plutôt la ligne de l'exécutif, demandant "solennellement aux entreprises d'hydrocarbures une nouvelle et urgente stratégie d'aide aux Français", sous peine de "défendre les mesures fiscales qui s'imposeraient".

Le porte-parole du gouvernement Olivier Véran "espère" des "annonces" d'ici la fin de semaine afin d'avoir "quelque chose qui soit immédiatement visible (...) pour les Français", a-t-il affirmé jeudi sur France info.

C'est l'angle de défense: affirmer qu'un geste des entreprises aura un effet immédiat sur le pouvoir d'achat, quand une taxe ira dans les caisses de l'Etat, plus tard. D'autant qu'un groupe comme TotalEnergies réalise l'essentiel de ses bénéfices à l'international, ce qui réduit l'impact d'un impôt prélevé en France.

OC avec AFP