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Le PDG d’EDF, absent remarqué des obsèques de son prédécesseur

Luc Rémont, devant la centrale nucléaire de Penly à Petit-Caux le 9 décembre 2022

Luc Rémont, devant la centrale nucléaire de Penly à Petit-Caux le 9 décembre 2022 - LOU BENOIST / AFP

L’ancien PDG d’EDF, François Roussely a été inhumé mercredi aux Invalides. Le tout-Paris assistait à la cérémonie à l’exception du nouveau PDG, Luc Rémont.

Ils étaient tous là, sauf un. Le petit monde politico-économique français s’est rendu mercredi après-midi aux obsèques de François Roussely. L’ancien PDG d’EDF (1998-2004), également ancien directeur de cabinet des ministres de l’Intérieur (1984-1986, 1988-1989) et de la Défense (1997-1998), a eu droit à une cérémonie en l’église Saint-Louis des Invalides, réservée aux militaires et aux obsèques nationales.

Hormis ceux qui étaient au forum économique de Davos, en Suisse, tous étaient réunis pour un "dernier adieu à notre frère François" selon les propos de Monseigneur Antoine de Romanet de Beaune qui officiait. Lui aussi faisait partie des "people": il est le frère cadet d’Augustin de Romanet, PDG d’Aéroports de Paris et ancien secrétaire général de l’Elysée sous Jacques Chirac. La liste des politiques est sans fin: Lionel Jospin, Manuel Valls, Pierre Joxe, Alain Richard, Jean-Yves Le Drian, Florence Parly... Tous les ministres des Armées de gouvernement de gauche depuis 25 ans.

Certains ont prononcé quelques mots d’hommage. Comme Pierre-René Lemas, ancien secrétaire général de l’Elysée de François Hollande qui a croisé François Roussely au cabinet de Gaston Defferre au début des années 1980. Mais aussi Louis Gallois, ancien patron de la SNCF et président de Peugeot. "L’ami de 50 ans", s’est amusé à raconter qu’ils "apaisaient la rivalité entre gendarmes et policiers" alors qu’ils étaient directeur de cabinet à l’Intérieur et à la Défense. Les militaires en uniforme étaient aussi nombreux.

Jean-Bernard Levy représentait Luc Rémont

L’autre grande vie de François Roussely, EDF, était aussi très présente. Tous ses successeurs étaient là, même Pierre Gadonneix avec qui les relations n’ont pourtant jamais été bonnes. Évidemment Henri Proglio, son "poulain", et Jean-Bernard Levy qui vient de quitter ses fonctions. Mais toute l’industrie nucléaire a remarqué l’absence d’un homme de poids: le nouveau PDG d’EDF, Luc Rémont. Comme si Emmanuel Macron avait boudé les obsèques de Jacques Chirac.

Luc Rémont était aux Emirats Arabes unis à un sommet sur l’énergie. Un déplacement "prévu depuis longtemps et avec des enjeux", explique-t-on timidement chez EDF. "Le message envoyé est clair, persifle un ancien cadre de la maison. Luc Rémont n’est pas de 'l’école Roussely'". "Pas de rupture", promet-on chez EDF qui justifie que le nouveau PDG était représenté par... Jean-Bernard Levy. Son prédécesseur était bel et bien présent à Saint-Louis des Invalides. Mais les bons connaisseurs de la "maison EDF" ont noté que le nouveau PDG ne s’est pas fait remplacer par le patron actuel du parc nucléaire qui était présent.

Un désaveu pour Cédric Lewandowski ?

Sorte de "numéro deux", Cédric Lewandowski, affiche depuis 25 ans une proximité très forte avec François Roussely. Homme de réseaux, il a été son chef de cabinet au ministère de la Défense, directeur de cabinet quand il dirigeait EDF puis a suivi sa voie d’homme d’influence dans l’Armée notamment comme directeur de cabinet de Jean-Yves Le Drian de 2012 à 2017. Même constat pour l’actuel directeur financier Xavier Girre, lui aussi proche de François Roussely. Les cadres d’EDF voient dans ce double désaveu des changements à venir dans la gouvernance du groupe sous la houlette de Luc Rémont. D’autant que le nouveau PDG s’est en revanche rendu aux obsèques d’Eric Molinié, l’ancien secrétaire général de Dalkia, une filiale d’EDF, la semaine dernière. Un contraste qui tranche dans le vif.

Mais les "réseaux Roussely", Emmanuel Macron y goutte peu. Lorsqu’il devient président de la République, il promeut Jean-Yves Le Drian au ministère des Affaires étrangères mais évince son "dir cab" Cédric Lewandowski. Deux ans plus tôt, il avait fait barrage à Henri Proglio qui visait la présidence de Thales. Lui aussi proche de François Roussely et de ses réseaux... L’absence du nouveau PDG d’EDF, Luc Rémont, fait écho à cette nouvelle prise de distance d’Emmanuel Macron. "L’Elysée a dû donner la consigne de n’envoyer aucun représentant de l’Etat", décrypte un pilier de l’industrie nucléaire. L’absence de Sébastien Lecornu, actuel ministre des Armées, a, elle aussi, été remarquée. Il s’est contenté de livrer une gerbe de fleurs flanquée de son nom.

Matthieu Pechberty