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Comment Kering compte relancer son joyau Gucci

Kering, qui publie ses ventes pour le premier trimestre, ce mardi, réunira son assemblée générale jeudi. Le groupe de luxe, en pleine transformation, entend rassurer ses actionnaires sur sa stratégie.

L'avertissement sur résultats publié le mois dernier a planté le décor: Kering ne va pas bien. La direction a prévenu que ses ventes pour le premier trimestre devraient être en baisse "de l'ordre de 10%" pour tout le groupe. Pour Gucci -qui représente la moitié de son chiffre d'affaires et les deux tiers de sa rentabilité opérationnelle- il faut s'attendre à une baisse "de près de 20%". En cause, notamment, le ralentissement chinois.

Depuis plusieurs mois déjà, Kering tente de relancer sa marque phare. Le créateur Sabato de Sarno a pris la place d'Alessandro Michele, qui a signé plusieurs années de succès de la maison italienne. Jean-François Palus, très proche du PDG François-Henri Pinault, en a pris les rênes en octobre dernier et il sera rejoint début mai par un directeur général adjoint, Stefano Cantino, en provenance de chez Louis Vuitton.

Tirer Gucci vers le très haut de gamme

Les premières pièces de Sabato de Sarno plaisent, selon une source proche du dossier, qui assure que "le groupe se montre très satisfait des retours des clients en boutiques." Mais il est encore tôt pour établir une tendance sur le long terme. Et puis le contexte économique et le ralentissement global du secteur n'aident pas.

"Quand on est en pleine transformation comme Kering, on a besoin d'une accélération plutôt que d'un ralentissement", explique un bon connaisseur du secteur.

Pour autant, le géant du luxe entend bien démontrer que la mue qu'il a engagée va finir par payer et il continue d'investir pour prendre la vague quand cela repartira. Il s'attelle à "élever" ses marques toujours plus vers le haut de gamme. Tout en essayant de faire repartir Gucci, "prunelle de ses yeux", nous dit une source, Kering mise en parallèle beaucoup sur sa division beauté, après le rachat du parfumeur Creed pour 3,5 milliards d'euros, ou encore sur Valentino, dont il a acquis 30% en fin d'année dernière et dont il espère être propriétaire d'ici 2028.

Un duo pour épauler François-Henri Pinault

Pour transformer l'essai, un binôme à la direction générale adjointe, Francesca Bellettini et Jean-Marc Duplaix, entoure désormais François-Henri Pinault, qui "reste capitaine à bord", martèle t-on en interne. Jean-Marc Duplaix connaît le groupe dans ses moindres recoins, pour en avoir été directeur financier entre 2012 et 2023. Désormais directeur général adjoint du groupe en charge des opérations et des finances, il dirige "à ce titre", "toutes les fonctions corporate du groupe et est chargé d’en renforcer l'efficacité et le contrôle".

Culture Bourse : « Faut-il avoir du Kering en portefeuille malgré la baisse ? » par Julie Cohen-Heurton – 04/04
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Francesa Bellettini est entrée chez Kering il y a 21 ans. Elle est PDG d'Yves Saint-Laurent depuis 2013, fonction qu'elle cumule aujourd'hui avec celle de directrice générale adjointe du groupe en charge du développement des maisons, qui lui sont toutes rattachées. "Elle a une vision globale et elle sait aussi beaucoup descendre sur le terrain au contact des équipes", salue un bon connaisseur du secteur. L'assemblée générale, jeudi, doit être l'occasion d'introniser ce binôme.

Faire preuve de patience

Le comité exécutif, mais aussi le conseil d'administration ont été musclés. Mi-mars ont été annoncées les arrivées dans ce dernier de trois nouveaux membres : Rachel Duan, spécialiste "du marché asiatique" et de la "gouvernance d'entreprise", selon le communiqué, mais aussi l'économiste et ancienne députée italienne Giovanna Melandri, et le français Dominique d'Hinnin, qui a fait une grande partie de sa carrière chez Lagardère, dont il a notamment assuré la co-gérance aux côtés d'Arnaud Lagardère, quand ce dernier a succédé à son père. Kering salue "son expertise financière et en matière de gouvernance d'entreprise."

"Les très belles marques de luxe, comme Gucci, cela ne meurt jamais. Il vont y arriver, c'est une certitude. La question c'est quand", note Olivier Abtan, partner et managing director chez Alix Partners.

Il fait néanmoins remarquer que "moins 20% sur les ventes de Gucci, c’est près de deux milliards d'euros, soit la taille d'une belle maison de luxe". "Il faut être patient", assure une source, qui explique que tout est en place chez Kering pour redresser la barre et qu'il faut parfois sacrifier temporairement du chiffre d’affaires pour des résultats au long cours.

Pauline Tattevin