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Inflation: les géants de l'agroalimentaire pas encore rattrapés par les prix

Les grandes firmes spécialistes de l'alimentaire ont enregistré de bons chiffres au premier trimestre, en répercutant les hausses des coûts sur leurs clients. Mais la baisse des ventes guette.

L'orage couve, mais n'éclate pas encore. Les grandes compagnies agroalimentaires ont beau subir de plein fouet la hausse des prix, flashée à 4,8% en rythme annuel en France en avril, elles n'en souffrent pas encore: en répercutant l'inflation sur les prix finaux, elles ont continué à enregistrer de bonnes performances au premier trimestre.

Unilever a par exemple vendu 7,3% de plus que l'année passée, bien au-dessus des 4,4% prédits par les analystes. Nestlé a également performé, avec une croissance organique de 7,6%. Danone a de son côté obtenu une croissance en rythme annuel de 7,1%.

Mais ces chiffres masquent l'importance de "l'effet-prix" dans les bonnes performances des mastodontes de nos assiettes: c'est parce que les prix ont augmenté qu'elles ont pu croître, pas en vendant plus. Autrement dit, c'est en répercutant le poids de l'inflation sur les consommateurs finaux.

Danone annonce avoir vendu à peine 2,2% de plus que l'année dernière, et être portée par un effet prix de 4,9%. Un chiffre proche de celui de Nestlé, qui émarge à +2,4% en croissance réelle, et un pricing à 5,2%.

15% d'inflation en 2022

Une stratégie assumée du côté de Danone, qui explique se tenir prête à des nouvelles augmentations sur les étiquettes, pour tenir ses promesses financières.

"Nous réitérons nos objectifs pour l’exercice: une croissance du chiffre d’affaires comprise entre +3 et +5% en données comparables, portée par l’effet prix", a commenté Juergen Esser, Directeur Général Finances, Technologie & Data de Danone.

Il faut dire que la spécialiste des produits laitiers ou de l'eau se projette en 2022 dans un "environnement opérationnel toujours très volatil, marqué par des difficultés d’approvisionnement et une inflation généralisée attendue autour de 15% en 2022".

Ce niveau d'inflation rendra de toute façon nécessaire de nouvelles répercussions sur les prix finaux, comme l'a confirmé Mark Schneider, CEO de Nestlé, lors de l'annonce des résultats le 20 avril:

"L'inflation des coûts continue d'augmenter fortement, ce qui nécessitera de nouvelles mesures de tarification et d'atténuation au cours de l'année."

Unilever chiffre de son côté l'impact de l'inflation à 2,1 milliards d'euros au premier semestre, et à plus de 2,7 milliards au second semestre, lorsque la firme réalisait environ 52 milliards d'euros de chiffre d'affaires annuel en 2021.

Déjà des volumes en baisse

Face à l'augmentation des prix de l'énergie et des matières premières, et aux difficultés logistiques, les grands groupes de l'alimentaire sont pris en tenaille entre la baisse de leurs marges - en maintenant des prix stables - ou la baisse de la consommation que pourrait induire une hausse des prix affichés.

Quelques signes inquiétants viennent accréditer ce second scénario. Unilever a vu ses volumes baisser d'1% au premier trimestre. La firme britannique, qui détient Cadbury, Magnum, Knorr ou encore Ben & Jerry's, ne doit sa croissance qu'à la hausse de ses prix.

D'autres acteurs perdent du terrain et pourraient eux aussi basculer dans le rouge rapidement : Danone est en recul sur la région "reste du monde", et ne tient au global que grâce aux marchés asiatiques très dynamiques (+13,2% des ventes), et alors que les difficultés logistiques se multiplient en Chine.

Mondelez, autre géant du secteur (détenteur de LU, Oréo, Côte d'Or ou Hollywood), donne lui aussi une tendance baissière: aux États-Unis, où l'inflation a dépassé les 8,5% en mars et atteint des record vieux de 40 ans, le groupe ne gagne plus de clients (0,2% de hausse en volume au premier trimestre).

Valentin Grille