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Qui est Jean-Dominique Senard, le nouveau président de Renault?

Le conseil d'administration de Renault vient de nommer Jean-Dominique Senard au poste de président en remplacement de Carlos Ghosn. Patron de Michelin depuis 2012, ce sexagénaire devra reprendre les dossiers chauds concernant l'avenir du groupe français et son alliance avec Nissan et Mitsubishi.

Renault tourne la page Carlos Ghosn. Incarcéré depuis plus de deux mois au Japon, celui qui dirigeait Renault depuis 2005 a accepté de démissionner juste avant la tenue d'un conseil d'administration chargée de nommer ses successeurs. 

Comme attendu, le groupe français a choisi l'actuel patron de Michelin en tant que nouveau président du conseil d'administration. Thierry Bolloré, qui avait repris les rênes de l'entreprise après l'arrestation de Carlos Ghosn le 19 novembre dernier, a été, de son côté, confirmé au poste de directeur général de l'entreprise.

Jean-Dominique Senard, un patron expérimenté

A 65 ans, Jean-Dominique Senard devient donc le onzième président dans l'histoire de Renault. Réputé élégant et affable, l'ancien élève d'HEC avait reçu fin janvier un hommage appuyé: celui du président de la République Emmanuel Macron, qui avait qualifié Michelin d'"entreprise modèle" lors d'une visite du centre de technologie de Ladoux, près de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme).

Point fort de ce candidat pour succéder à Carlos Ghosn: son départ était programmé pour mai 2019 avec une succession à la tête du deuxième fabricant mondial déjà fixée. Le directeur général exécutif, Florent Menegaux, va lui succéder. Chez Michelin, Jean-Dominique Senard restera comme le premier patron non membre de la famille fondatrice. Ce natif de Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine) y a mis en pratique son credo: négocier des assouplissements dans l'organisation du travail, pour préserver en France des sites menacés par l'arrivée de produits à moindre coûts en provenance d'Asie.

Il avait commencé chez Michelin en 2005 en tant que directeur financier, avant de prendre la présidence du groupe en 2012. Auparavant, il avait été responsable des opérations de gestion des risques financiers chez Total (de 1979 à 1987), a travaillé à direction de la trésorerie chez Saint-Gobain (1987 à 1996) avant de rejoindre Pechiney (directeur financier de 1996 à 2003 puis président).

Un "patron social"?

Fils de diplomate, Jean-Dominique Senard plaide depuis longtemps pour pouvoir négocier le temps de travail avec les salariés au niveau de l'entreprise. Il expliquait en décembre 2015, dans un entretien avec l'AFP, vouloir que "l'accord d'entreprise prenne le pas sur la convention collective, voire la législation". Michel Chevalier, délégué syndical de la CGT au sein du groupe Michelin reste plus nuancé sur sa réputation de "patron social":

"Le dialogue social... à condition d'être d'accord avec la direction (...) C'est quelqu'un qui passe bien, qui a une facilité à parler, qui parle de capitalisme raisonné... On ne peut pas dire que cela se passe comme ça dans l'entreprise", estime le syndicaliste.

Longtemps considéré comme un des favoris pour succéder au printemps 2017 à Pierre Gattaz à la tête du Medef, l'organisation patronale française, Jean-Dominique Senard avait finalement jeté l'éponge en raison de la limite d'âge pour être candidat, fixée statutairement à 65 ans. Au poste de président du conseil d'administration de Renault, l'âge limite est de 72 ans.

un duo pour remplacer carlos ghosn

Aux côtés de Jean-Dominique Senard, président non-exécutif, Thierry Bolloré a été nomme directeur général du groupe. Les deux fonctions sont donc désormais séparées, comme le souhaitait l'Etat, principal actionnaire de Renault avec 15% du capital et 22% des droits de vote. Pour résumer, charge à Thierry Bolloré d'assurer la gestion au quotidien. Jean-Dominique Senard pourra lui se concentrer sur les grandes orientations pour le groupe et reprendre la présidence de l'alliance Renault-Nissan, poste qu'occupait également Carlos Ghosn.

Sur ce dossier de l'alliance, la succession s'annonce comme un casse-tête, même si les statuts prévoient que le PDG de l'entité enregistrée aux Pays-Bas soit nommé par Renault, alors que Nissan choisit le vice-président. Les tentions mises au jour suite à l'arrestation de Carlos Ghosn montrent en effet la volonté des Japonais de renforcer leur poids dans l'alliance, un rééquilibrage qui n'est pas vraiment souhaité coté français.

Toutefois, premier signe de détente entre les deux groupes, Nissan a annoncé ce jeudi la tenue d'une assemblée générale extraordinaire mi-avril. La réunion devra entériner la révocation de Carlos Ghosn et nommer un nouveau dirigeant, une demande de Renault que son allié japonais repoussait jusque-là.

De son côté, Renault indique dans son communiqué que "le président du conseil d’administration de Renault sera l’interlocuteur principal du partenaire japonais et des autres partenaires de l’Alliance pour toute discussion sur l’organisation et l’évolution de l’Alliance".

Julien Bonnet, avec AFP