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Carlos Ghosn: "j'ai, face à moi, une armée chez Nissan"

" Je n'ai pas de téléphone, pas d'ordinateur, mais comment puis-je me défendre ?" déplore Carlos Ghosn.

" Je n'ai pas de téléphone, pas d'ordinateur, mais comment puis-je me défendre ?" déplore Carlos Ghosn. - Toru Yamanaka-AFP

Depuis sa prison de Tokyo, Carlos Ghosn poursuit sa contre-attaque. "J'ai face à moi une armée chez Nissan" explique-t-il dans un entretien où il répond pour la première fois, en anglais, à des journalistes de médias non-japonais (AFP, Les Échos). Combatif, il déplore aussi la dureté de ses conditions de détention.

Carlos Ghosn a pu s'exprimer et se défendre pour la première fois dans des médias français, l'AFP et Les Échos. Il passe à la contre-attaque depuis sa prison dans un parloir du centre de détention de Kosuge à Tokyo, où il est détenu depuis le 19 novembre 2018. Combatif, Il réitère son accusation à propos d'un complot qui aurait été ourdi contre lui par la direction de Nissan tout en dénonçant ses conditions de détention.

"Le 19 novembre, je suis arrêté et, depuis, je suis soumis à des conditions très sévères face à une armée de gens qui ne cessent de me jeter des horreurs à la tête. Il y a non seulement des allégations des procureurs, mais également celles de Nissan. Ils prennent beaucoup de faits hors de leur contexte, c'est une distorsion de la réalité pour détruire ma réputation" explique l'ex-patron de Renault.

"Sans téléphone, ni ordinateur, comment puis-je me défendre?"

"J'ai face à moi une armée chez Nissan, des centaines de personnes se consacrent à cette affaire, 70 au bureau du procureur et je suis en prison depuis plus de 70 jours. Je n'ai pas de téléphone, pas d'ordinateur, mais comment puis-je me défendre ?" poursuit Carlos Ghosn.

"Chez Nissan, il y a beaucoup de gens dont le rôle est discutable, étrange" ajoute-t-il tout en tempérant sa critique vis-à-vis du constructeur automobile japonais: "j'aime le Japon, j'aime Nissan, j'ai consacré tant d'années à relancer l'entreprise, à la reconstruire, à la transformer. Je n'ai rien contre la compagnie".

"30 minutes par jour pour aller dehors sur le toit"

Puis l'ex-patron de Nissan témoigne sur ses conditions de détention au Japon qu'il dénonce pour leur dureté. "Ne sous-estimons pas les conditions dans lesquelles je suis. Quand je dors la nuit, j'ai une lumière en permanence. Je n'ai pas de montre, plus la notion du temps. Je n'ai que 30 minutes (par jour) pour aller dehors sur le toit, j'ai une soif d'air frais. Oui je suis fort mais, évidemment, je suis fatigué" témoigne-t-il.

L'ex-patron de l'alliance Renault-Nissan réitère ses accusations portant sur un complot qui aurait été ourdi par la direction de Nissan pour l'évincer. "Est-ce un complot, aucun piège? Il n'y a aucun doute là-dessus. C'est une affaire de trahison. Et il a plusieurs raisons pour cela. Il y avait beaucoup d'opposition et d'anxiété sur le projet d'intégrer les compagnies (Nissan, Renault, Mitsubishi Motors, NDLR)" commente-t-il.

"J'aurais voulu me présenter devant le conseil d'administration de Renault"

"J'avais dit à Hiroto Saikawa (patron de Nissan, NDLR): si je faisais un autre mandat à la tête de l'Alliance, nous allions devoir travailler beaucoup plus sur l'intégration. Nous en avons beaucoup parlé au début de l'année dernière, puis les discussions ont ralenti entre juillet et septembre, avant de reprendre. l'objectif était clair et il y avait des résistances dès le début" conclut-il pour justifier son éviction par ses projets d'une intégration plus forte des trois entreprises dans l'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi.

Enfin, à propos de sa démission de la tête de Renault: il justifie: "Il n'était pas possible de maintenir Renault dans une situation de gouvernance temporaire. Alors, quand j'ai appris que ma demande de liberté sous caution était refusée, j'ai décidé de démissionner, mais j'aurais voulu avoir la possibilité de me présenter devant le conseil d'administration de Renault".

Frédéric Bergé avec AFP