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Réacteurs nucléaires: les problèmes de corrosion pourraient provoquer des mises à l'arrêt supplémentaires

Interrogé par les sénateurs, Bernard Doroszczuk, le président de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) affirme que le traitement de ces problèmes "prendra plusieurs années".

Auditionné ce mardi par les sénateurs pour la présentation du rapport de l’ASN (Autorité de sûreté nucléaire) sur l’état de la sûreté du parc français, Bernard Doroszczuk, son président n'a pas été franchement rassurant.

Il a ainsi estimé que le traitement des problèmes de corrosion sur les réacteurs d'EDF qui provoquent actuellement les mises à l'arrêt de 12 réacteurssur 56 "prendra plusieurs années". Craignant un défaut générique, l'entreprise publique a en effet prévu d’inspecter l’ensemble du parc de ses 56 réacteurs en France.

EDF a à ce jour examiné 35 soudures pour des défauts de corrosion et 105 seront contrôlées d'ici fin juin, annonce-t-il.

Pas un problème de vieillissement

Et s'il s'agit bien d'un problème générique, il y aura de nouvelles longues mises à l'arrêt qui finiront par peser sur la production d'énergie.

"Des mises à l'arrêt supplémentaires de réacteurs pourraient avoir lieu", prévient le responsable de l'ASN devant les parlementaires.

Les corrosions ne sont pas liées au vieillissement des réacteurs puisque les plus anciens sont les moins touchés. Ceux qui le sont le plus correspondent à "une technologie américaine de Westinghouse qui a été francisée", détaille le responsable. Les réacteurs N4 (Civaux et Chooz) sont "les plus affectés" par ces phénomènes de corrosion, ajoute-t-il.

Les analyses "semblent à ce stade privilégier une cause prépondérante, qui est liée à la géométrie des lignes des tuyauteries", a-t-il poursuivi.

29 réacteurs à l'arrêt sur 56

"A ce stade, au titre de la corrosion sous contrainte, EDF a procédé à la mise à l'arrêt ou à la prolongation d'arrêts programmés de 12 réacteurs pour expertise approfondie et le cas échéant réparation", a souligné Bernard Doroszczuk lors d'une audition devant des parlementaires.

Ces problèmes de corrosion ont été détectés ou soupçonnés au niveau de soudures des coudes des tuyauteries d'injection de sécurité - qui permettent de refroidir le réacteur en cas d'accident - reliées au circuit primaire. Cette corrosion dite "sous contrainte" se traduit par des petites fissures.

20% des réacteurs arrêtés
20% des réacteurs arrêtés © BFM Business

Dans le détail, il s'agit des quatre réacteurs les plus récents et les plus puissants (1.450 MW), dits du palier N4, de cinq des 20 réacteurs de 1.300 MW et de trois des 32 réacteurs de 900 MW.

La production nucléaire depuis 2015
La production nucléaire depuis 2015 © BFM Business

Sur son parc de 56 réacteurs, EDF en compte actuellement 29 à l'arrêt. Ce n'est donc qu'"une partie" qui est indisponible pour les problèmes de corrosion, a souligné le gendarme du nucléaire.

"Les réacteurs à l'arrêt ont fait l'objet de découpe de tuyauterie pour réaliser des expertises afin de comprendre le phénomène. La réparation sera assez complexe. On pourra récupérer les réacteurs N4 d'ici la fin de l'année, mais les expertises sur d'autres réacteurs pourraient nous faire découvrir d'autres problèmes, mais à ce stade nous ne pouvons pas affirmer qu'il n'y aura pas d'autres réacteurs qui pourraient être mis à l'arrêt par précaution", a expliqué sur BFM Business Bernard Doroszczuk en précisant que "des incertitudes portent sur les réacteurs de 1300 MW".
Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business