BFM Business
Assurance Banque

Les IA pour vous aider à contester vos frais bancaires débarquent

Capture d'écran du site DoNotPay, prise le 9 octobre 2023

Capture d'écran du site DoNotPay, prise le 9 octobre 2023 - Donotpay.com

[AVIS D'EXPERT] Plusieurs start-up proposent des assistants virtuels prenant en charge automatiquement les contestations des consommateurs. Décryptage avec notre expert Guillaume Almeras, fondateur du site de veille et de conseils Score Advisor.

Parmi les types de clients que les conseillers bancaires voient avec une certaine appréhension pousser la porte de leur agence, il y a les professeurs de mathématiques à la retraite.

Ayant du temps, ceux-ci le consacrent assez souvent en effet à recalculer très précisément les intérêts et commissions que leur banque leur a facturés. Et comme les systèmes bancaires appliquent des arrondis, les écarts entre ce qui a été facturé et ce qui aurait dû exactement l’être peuvent, sur des années, représenter des sommes peu importantes mais pas tout à fait négligeables. Il faut donc les rétrocéder, sauf que rien n’est prévu dans les systèmes pour cela. Et tandis que le conseiller se demande comment il va bien pouvoir faire, son interlocuteur, fier de ses calculs, les refait sous ses yeux…

Très prochainement, nous pourrions tous disposer de ce genre de calculette, sous la forme d’assistants virtuels qui, scrutant nos opérations bancaires et relisant les contrats que nous avons signés, pointeraient la stricte exactitude des tarifications qui nous ont été appliquées mais aussi le respect des dispositions juridiques et réglementaires les plus variées. Et nous n’aurions rien à faire, le robot se chargeant également de lancer les réclamations, voire les plaintes.

Bien entendu, de tels dispositifs n’auraient aucune raison de se limiter à nos opérations bancaires. Il y a déjà presque vingt ans, dans son roman d’anticipation Accelerando (2005), Charles Stross imaginait notre monde régi, pour la plupart des rapports humains, de manière automatisée ; avec des bots lançant des actions judiciaires toutes les seize secondes en moyenne.

Rédaction automatique de réclamations

Au début de l’année, le cabinet Gartner alertait sur la montée en puissance prochaine de tels assistants ; auxquels des spécialistes de Gartner ont consacré un livre: When machines become customers.

Était ainsi notamment citée la start-up américaine DoNotPay, qui propose un assistant de ce type, un "AI Consumer Champion", prenant en charge automatiquement les contestations des consommateurs auprès des grandes marques et capable, par exemple, de renégocier, en ayant recours à ChatGPT (pour rédiger les réclamations), un contrat passé avec un fournisseur d’accès internet.

Bien sûr, cet assistant virtuel s’occupe également des frais bancaires. Il se connecte facilement à tous les comptes de ses utilisateurs (aux Etats-Unis, via l’agrégateur Plaid) et il scrute jusqu’aux courriels échangés avec leur(s) banque(s).

D’autres exemples pourraient être donnés de tels assistants, qui proposent notamment dès aujourd’hui la gestion de nos abonnements, que la start-up anglaise Nous veut étendre à tous nos paiements récurrents et même, plus généralement, à toutes nos factures.

Des robots face à d'autres robots?

On peut donc assez facilement suivre Gartner quand il prévoit à terme une déferlante de ce genre d’outils, avec des conséquences dont on peine encore à envisager l’ampleur. Car, en termes de service clients, il faudra, face aux robots, en déployer d’autres, la multiplication et la rapidité des traitements dépassant les capacités humaines. Des robots fournisseurs pour répondre aux robots clients et entre eux sans doute apparaitront rapidement des robots comparateurs, conciliateurs, judiciaires…

Mais il ne s’agit pas seulement de capacités de traitement. Car un assistant comme celui de DoNotPay n’entend pas se cantonner aux réclamations. Il peut comparer les offres et les négocier lors de leur souscription. Ce sont donc les dispositifs de ventes eux-mêmes qui seront touchés et, si cela concerne tous les secteurs, les banques sont particulièrement concernées. C’est qu’aux offres bancaires s’attache en effet une dimension de conseil. Un rôle de tiers de confiance qui, de plus en plus, pourrait bien être transféré aux assistants virtuels.

La question est donc de savoir qui développera ces derniers. Les banques elles-mêmes? Si c’est le cas, elles ne devraient surtout pas considérer de telles perspectives comme incertaines et lointaines. Car l’entrainement de robots comme ceux que l’on peut imaginer, sur la base des assistants qui sont déjà apparus, demanderait à être lancé dès aujourd’hui.

Par Guillaume Almeras, fondateur du site de veille et de conseils Score Advisor