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Un testing de grande ampleur révèle la réalité des discriminations à l'embauche selon le sexe

Les femmes sont défavorisées à l'embauche pour les métiers peu qualifiés.

Les femmes sont défavorisées à l'embauche pour les métiers peu qualifiés. - rawpixel - AFP

Si les candidatures féminines ne subissent pas en moyenne de discrimination à l'embauche par rapport aux candidatures masculines, elles sont défavorisées dans les métiers peu qualifiés. A l'inverse, elles semblent davantage retenir l'attention des recruteurs dans les métiers de "cadres avec encadrement", selon une large expérimentation menée par la Dares.

Salaires inférieurs de 17% en moyenne à volume de travail égal, taux d’activité plus faible, trajectoires professionnelles moins ascendantes… Si elles tendent progressivement à s’atténuer, les inégalités entre les femmes et les hommes sur le marché du travail persistent. Pour mieux comprendre cette situation au-delà de ses "origines économiques, culturelles, sociales", une étude de la Dares publiée ce mardi tente de savoir si ce traitement différencié s’observe dès le début de la carrière, à savoir dès l’étape de recrutement.

Dit autrement, existe-t-il une discrimination à l’embauche selon le sexe? Pour y répondre, ISM Corum et l’Institut des politiques publiques ont mené, sous l’égide de la Dares, une vaste expérimentation en envoyant quelque 4800 CV fictifs (2400 candidatures féminines, 2400 candidatures masculines) en réponse à 240 offres d’emploi dans 11 métiers différents. Ces derniers ont été sélectionnés en fonction de trois critères: le niveau de qualification requis, le degré de féminisation du métier et les difficultés de recrutement auxquels les employeurs sont confrontés.

"Pas d’inégalité de traitement significative" sur l'ensemble des candidatures

Pour éviter tout soupçon, une offre donnée a pu recevoir un CV masculin "de meilleure qualité que la candidature féminine", auquel cas c’est la logique inverse qui a été appliquée pour l’offre suivante. De sorte que les éventuelles différences de traitement ne puissent trouver leur origine que dans le prénom des candidats. Aussi, pour ne pas "confondre les discriminations liées au sexe et à l’origine perçue", la Dares se "concentre uniquement sur les candidatures portant un prénom d’origine française".

Et le résultat est encourageant puisque la proportion de femmes rappelées par les recruteurs (33,4%) est équivalente à celle des hommes (33,2%). Les écarts de taux de refus (17,5% pour les femmes, 16,6% pour les hommes) et d’absence de réponse (49% contre 50,2%) sont également faibles. "On ne constate pas d’écarts significatifs selon le sexe suggéré par le prénom des candidats. Ainsi, sur l’ensemble des candidatures envoyées, il n’y a pas d’inégalité de traitement significative entre les candidatures féminines et masculines", affirme la Dares.

De la même manière, le service statistique du ministère du Travail ne perçoit pas de différence notable si l’on regarde uniquement le critère du degré de féminisation des métiers. Dans les professions masculinisées, le taux de rappel des candidatures féminines est de 39%, contre 38,3% pour les CV masculins. A l’inverse, les hommes sont autant rappelés (21,9%) que les femmes (22,3%) dans les métiers féminisés.

Les femmes défavorisées pour les métiers peu qualifiés

Les résultats sont en revanche plus hétérogènes selon le critère du niveau de qualification requis par chaque métier. Avec un taux de rappel de 30,3% contre 35,6% pour les hommes, les femmes sont défavorisées à l’embauche pour les métiers peu qualifiés. Elles sont en revanche favorisées par rapport aux hommes pour les métiers de cadres encadrants (28,5%, contre 20,4%).

Même constat avec le critère de l’âge: parmi les candidats âgés de 48 à 55 ans, les candidatures féminines suscitent davantage l’intérêt des recruteurs (17,1%) que les candidatures masculines (10,8%). Au contraire chez les 23-30 ans, les hommes affichent un taux de rappel (40,5%) plus élevé que les femmes (37,5%).

Faut-il détailler sa situation personnelle sur le CV?

Dernier enseignement principal de ce testing à grande échelle, la présence sur le CV d’informations relatives à sa situation matrimoniale ou à des périodes d’inactivité affecte moins les chances d’un candidat d’être contacté par le recruteur que l'on ne pourrait croire. En témoignent les taux de rappel sensiblement équivalents puisqu’ils varient de 29,7% pour les inactifs en couple avec deux enfants à 35,6% pour les célibataires avec deux enfants. Tandis que le taux de rappel est 34,2% pour les candidats qui ne mentionnent aucune de ces informations.

L’écart des taux de rappel entre les candidats hommes qui mentionnent une information de ce type (33,2%) et celui des femmes (32,2%) n’est pas non plus statistiquement significatif. En revanche, "pour les jeunes, l’indication d’une période d’inactivité ou de présence d’enfants réduit systématiquement les chances d’être contacté par un recruteur", souligne la Dares.

https://twitter.com/paul_louis_ Paul Louis Journaliste BFM Eco