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Un exécutif fragilisé à l'épreuve de la rue sur les retraites

Lors de la précédente journée de mobilisation contre la réforme des retraites, le 24 juin dernier, à Nantes. Des autorités françaises fragilisées affronteront mardi des syndicats et une opposition revigorés lors d'une journée de grèves et manifestations c

Lors de la précédente journée de mobilisation contre la réforme des retraites, le 24 juin dernier, à Nantes. Des autorités françaises fragilisées affronteront mardi des syndicats et une opposition revigorés lors d'une journée de grèves et manifestations c - -

par Jean-Baptiste Vey PARIS (Reuters) - Des autorités françaises fragilisées affronteront mardi des syndicats et une opposition revigorés lors d'une...

par Jean-Baptiste Vey

PARIS (Reuters) - Des autorités françaises fragilisées affronteront mardi des syndicats et une opposition revigorés lors d'une journée de grèves et manifestations contre la réforme des retraites que tous annoncent très suivie.

L'Assemblée nationale commencera le même jour à examiner ce projet de loi qui vise à juguler les déficits croissant des régimes de retraites pour atteindre l'équilibre en 2018.

Le sort de cette réforme, dont Nicolas Sarkozy a fait une priorité de son quinquennat, sera scruté par les opérateurs financiers qui la considèrent comme un baromètre de la capacité de la France à tenir ses engagements de réduction des déficits dans un contexte de grande tension sur les dettes des Etats.

"Je ne serai pas le président de la République qui partira sans avoir réglé la question de l'équilibre des régimes de retraite. C'est clair, je suis extrêmement déterminé", a dit vendredi le chef de l'Etat. "Chaque Français va devoir bien réfléchir à quel est son intérêt."

Le refus des syndicats s'est cristallisé d'emblée sur la principale mesure, le report de 60 à 62 ans de l'âge légal de départ en retraite, encore loin des 67 ans en vigueur en Allemagne, une solution inévitable selon l'exécutif pour sauver un système par répartition menacé d'insolvabilité.

Les syndicats n'ont pas désarmé malgré la disponibilité du gouvernement à lâcher du lest sur trois sujets périphériques : la pénibilité, les carrières longues et les polypensionnés.

CLIMAT DÉLÉTÈRE

Ils se réuniront dès mercredi pour décider des suites du mouvement et soulignent l'urgence de la mobilisation, la réforme du règlement de l'Assemblée intervenue l'année dernière limitant pour ce texte la durée des débats à 50 heures.

Le vote solennel du texte par les députés pourrait avoir lieu le 15 septembre, l'examen au Sénat étant prévu en octobre.

L'objectif du gouvernement, qui a choisi, contre le souhait de l'opposition, d'utiliser la procédure "accélérée" limitant le nombre de navettes entre les assemblées, est de voir le texte adopté définitivement fin octobre ou début novembre.

Il y a quelques mois, le bras de fer avec les syndicats pouvait sembler une simple formalité pour un gouvernement conforté par des sondages montrant des Français plutôt résignés à des efforts pour redresser les comptes des retraites.

Mais le climat s'est fortement dégradé depuis.

Le débat sur la réforme a d'abord été pollué par la mise en cause de son artisan, le ministre du Travail, Eric Woerth, ancien ministre du Budget et ancien trésorier de l'UMP, dans l'affaire politico-judiciaire entourant la milliardaire Liliane Bettencourt, soupçonnée d'évasion fiscale.

A quelques jours de la journée d'action, les chefs des deux plus grands syndicats ont même porté une attaque surprise contre Eric Woerth, alors qu'ils expliquaient jusqu'alors que la réforme était pilotée par la présidence et que l'identité du ministre qui la portait importait peu.

"Ce n'est plus possible de travailler avec Eric Woerth", a ainsi déclaré le secrétaire général de la CFDT, François Chérèque, vendredi sur Europe 1.

Le numéro un de la CGT, Bernard Thibault, estime pour sa part dans un entretien au quotidien Les Echos qu'"Eric Woerth est objectivement plus occupé et préoccupé par autre chose que par le sujet qui nous, nous intéresse", les retraites.

SARKOZY MAINTIENT SA CONFIANCE À WOERTH

"Je suis mobilisé, disons à 120%", leur a répondu Eric Woerth vendredi. "Je suis évidemment totalement concentré sur le dossier des retraites, je le suis depuis le mois d'avril et il n'y a aucune raison que ca change", a-t-il ajouté.

Nicolas Sarkozy, dont la popularité reste faible et qui a déjà annoncé un futur remaniement ministériel, a renouvelé vendredi son soutien à Eric Woerth, dont une partie du Parti socialiste demande la démission.

Outre les problèmes d'Eric Woerth, l'offensive sécuritaire menée cet été par le président et son gouvernement, qui ont fait le lien entre immigration et délinquance, a suscité des réactions hostiles en France, et jusqu'au pape Benoît XVI.

Des dizaines de milliers de personnes - 100.000 selon les organisateurs - sont descendues dans la rue samedi pour protester contre ces déclarations et dénoncer la politique sécuritaire du gouvernement, accusé de répression et de xénophobie.

Mardi, les syndicats espèrent mobiliser plus de monde que lors de la précédente journée d'action, le 24 juin, qui avait rassemblé quelque deux millions de personnes selon eux et environ 800.000 selon la police.

"Ce sera une manifestation évidemment certainement très importante", a déclaré Eric Woerth jeudi, tout en expliquant que "c'est pas ca qui peut faire changer la réforme des retraites".

Si aucune réforme n'est menée, les déficits des différents régimes de retraite atteindront 40 milliards d'euros par an dès 2015, selon le Conseil d'orientation des retraites, une instance associant partenaires sociaux, parlementaires, représentants de l'Etat et experts, ce qui représenterait quelque 1.300 euros par actif chaque année.

Edité par Yves Clarisse