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Télétravail: le patron de Microsoft raille la "paranoïa" des managers sur la productivité

Interrogé par la BBC, Satya Nadella, directeur général du géant américain estime qu'il ne faut pas avoir peur du télétravail.

Si le télétravail s'est très vite imposé aux Etats-Unis au plus fort de la crise sanitaire du covid, beaucoup d'entreprises sonnent depuis plusieurs mois le rappel au bureau de manière assez agressive comme chez Apple, Tesla ou Google.

En cause, la question sensible de la productivité jugée par les managers moins bonne lorsque les salairés travaillent à domicile. Une vision balayée par le patron de Microsoft qui place sa confiance plutôt du côté des salariés que des directions.

Interrogé par la BBC, Satya Nadella, directeur général du géant américain est très clair: "Nous devons dépasser ce que nous décrivons comme une paranoïa de la productivité, car toutes les données dont nous disposons montrent que plus de 80% des individus estiment être très productifs, sauf que leur direction pense qu'ils ne le sont pas. Cela signifie qu'il y a un réel décalage entre les attentes et ce qu'ils ressentent".

9 salariés sur 10 se sentent plus productifs à domicile

Et en effet, selon une étude interne, 87% des salariés de Microsoft se sentent plus productifs lorsqu'ils travaillent à domicile, tandis que 80% des directeurs de Microsoft pensent que les télétravailleurs le sont moins.

Plusieurs études confirment le sentiment de Satya Nadella, notamment en France. "A la différence de beaucoup d'autres crises antérieures qui conduisaient à un ralentissement de la productivité tendancielle, l'accélération du recours au télétravail lié à la crise sanitaire pourrait finalement aboutir à un gain durable de productivité", avance le Conseil national de la productivité (CNP).

"Le passage de la proportion de télétravailleurs d'environ 5% dans la période pré-Covid (4% de télétravailleurs réguliers en 2019, NDLR) à 25% à plus long terme" engendrerait un gain moyen de productivité de 5 à 9%" poursuit l'organisme.

Une étude de l'Institut Sapiens évalue de son côté à 22% les gains de productivité réalisés grâce au télétravail, mais prévient qu'une généralisation sur le long terme pourrait avoir des effets pervers contre-productifs.

"A quoi sert un bureau?"

Mais alors que les salariés américains sont aujourd'hui en position de force, notamment dans la tech, les entreprises réfractaires comme Apple doivent mettre de l'eau dans leur vin. Refuser le télétravail c'est s'exposer à des fuites importantes de talents, à des démissions, qui dans un contexte de pénuries de talents sont catastrophiques pour les entreprises.

Point qu'a très bien compris Microsoft. Sa politique permet aux salariés d'être 50% de leur temps en télétravail, et même de demander plus avec l'approbation de la direction. Au contraire de son grand rival Apple qui doit subir une fronde de ses employés.

Dans un sondage mené en interne, 76% des salariés de la firme à la pomme se disent insatisfaits du plan de retour au bureau, et 56% envisageaient de quitter l'entreprise en raison de ces nouvelles règles.

Et puis il y a les entreprises qui ont renoncé à faire revenir qui que ce soit, estimant que travailler dans un bureau est une ineptie. C'est le cas de Brian Chesky, patron d'Airbnb. "Je pense que le bureau tel qu’on le connaît, c’est fini, affirme-t-il. C’est une sorte de forme anachronique. Il vient d’un âge pré-numérique. Il est évident que les gens continueront à se rendre dans les hôpitaux pour travailler, à se rendre dans les cafés pour travailler. Mais je pense que pour quelqu’un dont le travail se fait sur un ordinateur portable, la question est de savoir: à quoi sert un bureau?"

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business