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Télétravail: la surveillance accrue des salariés donne des envies de démission

Les directions cherchent de nouvelles solutions pour mesurer la productivité des salariés en télétravail. Mais en allant trop loin, elles risquent néanmoins de provoquer des départs, selon une étude.

Si le télétravail a profondément changé les habitudes des salariés, il a également fallu adapter les méthodes des managers à cette nouvelle donne. Notamment mettre en place des outils de surveillance afin de contrôler l'activité et la productivité de ces salariés délocalisés.

Selon une étude* réalisée par Vanson Bourne pour VMware, 63% des entreprises françaises de plus de 500 salariés prévoient ou ont déjà adopté des outils dans le but de renforcer la supervision de leurs employés en situation de télétravail tandis que 71% ont dû trouver de nouvelles façons de mesurer la productivité de leur personnel.

Et la palette de ces outils de surveillance est de plus en plus large, des plus classiques comme l'utilisation de logiciels de surveillance des e-mails (37%), de la navigation sur Internet (36%) et des outils de collaboration (45%).

63% des entreprises françaises de plus de 500 salariés ont mis en place des outils de surveillance

Aux plus intrusifs avec des systèmes de vidéosurveillance (24%), des webcams dotées de technologies de suivi du regard (25%), ainsi que des logiciels d’enregistrement de frappes au clavier (20%).

Les salariés sont plutôt dans l'acceptation, la surveillance étant un des pendants du télétravail qui est jugé positif. 76% s’accordent à dire que le passage à un environnement de travail distribué a poussé leurs employeurs à mettre davantage l’accent sur leurs performances (au lieu de s’appuyer sur des indicateurs traditionnels tels que le temps passé au bureau) et 53% acceptent que leur organisation ait dû développer ces nouvelles solutions.

Pour autant, 33% d’entre eux ignorent si leur organisation a mis en place des systèmes de surveillance sur leurs appareils...

Mais cette acceptabilité a ses limites. Plus les outils sont nombreux et/ou intrusifs, plus les envies de démission augmentent, souligne l'étude. Respectivement 48% et 45% des entreprises françaises ayant mis en place ou utilisant actuellement des systèmes de surveillance, enregistrent un taux de turnover "plus élevé" ou "nettement plus élevé".

Equilibre délicat

"En manquant de transparence et en mesurant leur productivité de façon aléatoire et uniquement à l’aide de chiffres, les employeurs peuvent rapidement miner la confiance de leurs salariés, et risquent de voir leurs meilleurs talents partir, alors que nous sommes dans un marché extrêmement complexe et compétitif", commente Shanker Iyer, vice-président sénior et directeur général, End-User Computing, VMware.

Cette situation est en effet renforcée par les pénuries de compétences sur le marché du travail qui mettent les salariés en position de force. La surveillance accrue est ainsi perçue comme un argument supplémentaire au départ.

"Les résultats de l’enquête montrent à quel point il sera délicat pour les entreprises de trouver le bon équilibre afin d’évaluer les performances de leurs employés", peut-on lire.

Rappelons qu'en France, par son pouvoir de direction, l’employeur a le droit de contrôler et surveiller l’activité des salariés pendant le temps de travail, à condition de respecter leurs droits fondamentaux et libertés individuelles.

Néanmoins, l'employeur doit être attentif au respect de la vie privée des salariés quand il met en place ces dispositifs. Et dans le cas d'un système de contrôle spécifique, il doit en informer préalablement les salariés concernés. En effet, aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance.

*: L’enquête a été réalisée par le cabinet de recherche indépendant Vanson Bourne pour le compte de VMware entre juillet et août 2021. 7600 dirigeants, responsables de services RH et informatiques et employés d’entreprises d’une variété de secteurs ont été interrogés à travers le monde. L’enquête a été menée exclusivement auprès d’entreprises d’au moins 500 employés. 

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business