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Sur quels critères un métier peut-il être défini comme "en tension"?

Le ministre de l'Intérieur souhaite créer un titre de séjour spécifique pour les travailleurs irréguliers exerçant dans un secteur qui manque de main-d'œuvre.

Gérald Darmanin, le ministre de l'Intérieur, et le ministre du Travail Olivier Dussopt ont fait part de leur souhait de créer un titre de séjour spécifique pour les travailleurs irréguliers dans un secteur en manque de main-d'œuvre.

"Chaque année nous régularisons 30.000 personnes qui sont sans-papiers mais qu'on ne peut pas expulser parce que ces personnes, depuis de nombreuses années, travaillent dans des restaurants, conduisent des VTC ou délivrent des repas", explique le locataire de Beauvau.

"Demain, si un étranger en situation irrégulière dit 'je veux travailler dans un métier en tension', le ministre du Travail propose de créer un titre de séjour 'métier en tension' à définir. Il aura ainsi une protection sociale adéquate." ajoute-t-il.

Comment déterminer si un métier peut être considéré comme "en tension"? Schématiquement, il s'agit d'un métier où le nombre de postes à pourvoir est plus important que le nombre de candidats. De quoi provoquer d'importantes difficultés de recrutement. Des critères plus précis permettent d'évaluer chaque branche professionnelle.

Manque de ressources ou manque d'attractivité

En septembre 2020, la Dares et Pôle emploi ont en effet rénové la grille d’analyse des tensions sur le marché du travail en se basant sur plusieurs indicateurs:

  • le rapport entre le flux d’offres d’emploi en ligne, sur un champ étendu au-delà des seules offres collectées par Pôle emploi, et le flux de demandeurs d’emploi inscrits à Pôle emploi en catégorie A (sans emploi, tenus de rechercher activement un emploi).
    Traduction, l'indicateur observe le rapport entre le volume d'offres au-delà du périmètre de Pôle Emploi afin d'avoir une meilleure vision des besoins des entreprises, et le flux d'inscrits à Pôle Emploi.
  • le taux d’écoulement de la demande d’emploi, qui mesure le taux de sortie des listes des demandeurs d’emploi de catégories A, B, C (sans emploi ou en activité réduite, tenus de rechercher activement un emploi).
    Il s'agit ainsi simplement d'évaluer la proportion de demandeurs d'emploi qui sortent des listes de Pôle Emploi sur une période donnée.
  • la part des projets de recrutements anticipés comme difficiles par les employeurs.
    Cet indicateur s'appuie sur les enquêtes d'opinion menée auprès des chefs d'entreprise.

Ces indicateurs principaux sont complétés par des indicateurs complémentaires:

  • l'intensité d’embauches: plus les employeurs recrutent, plus ils ont à rechercher des candidats et à réitérer le processus, ce qui joue potentiellement sur les tensions, détaille la Dares.
  • les conditions de travail contraignantes: lorsqu’elles sont contraignantes, les conditions de travail peuvent accroître la difficulté qu’éprouvent les employeurs à attirer des candidats.
  • la non-durabilité de l’emploi: le type d’emploi proposé peut avoir une incidence sur son attractivité et donc sur l’apparition de tension.
  • la main-d’œuvre disponible: une main-d’œuvre disponible trop réduite contribue à accroître les tensions.
  • le lien entre la spécialité de formation et le métier. Soit un décalage entre les compétences requises par les employeurs et celles dont disposent les personnes en recherche d’emploi peut être l’une des causes des tensions, explique la Dares.

7 métiers sur 10 en tension en 2021

Fort de ces indicateurs, la Dares estime dans sa dernière note sur la question (septembre 2022 pour l'année 2021) qu'"après une diminution en 2020, les tensions sur le marché du travail remontent et atteignent en 2021 leur plus haut niveau depuis 2011". Cette situation a été largement décrite par les professionnels tout au long de l'année.

"Ces tensions augmentent dans pratiquement tous les métiers et sont particulièrement fortes dans ceux du bâtiment, de l’industrie, de l’informatique et des télécommunications, ainsi que chez les infirmiers, précise la Dares. Au total, 7 métiers sur 10 sont en tension forte ou très forte en 2021".

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business