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Préparation, argumentation: comment demander une augmentation de salaire?

Les négociations annuelles dans les entreprises (NAO) sur les hausses de salaire pour l'an prochain débutent dans les entreprises. Mais à titre individuel, comment bien argumenter face à son manager?

Entre 3 et 4%: tel devrait être le niveau moyen des augmentations accordées par les entreprises l'année prochaine pour compenser l'inflation. Évidemment, certains métiers en tension ou profils stratégiques seront certainement mieux lotis. À l'inverse, d'autres devront être un peu plus persuasifs compte tenu du ralentissement économique.

"Les entreprises pourraient concentrer les augmentations sur les populations stratégiques, ceux qu'on ne veut pas perdre, ceux sur lesquels on veut investir. Ce n'est pas équitable mais vu le contexte, il faudra faire des choix", nous explique Yamina Moukah, chasseuse de têtes et fondatrice de l'agence Cherche Susan.

Comment alors mettre toutes les chances de son côté dans le cadre d'une négociation individuelle?

• Évitez les arguments personnels, avancez des critères objectifs

"Souvent, on me dit: j'ai une formation qui justifie un salaire plus important ou mon voisin gagne plus que moi, c'est injuste, ou la vie est chère, j'ai besoin d'une augmentation. Ce sont des critères qu'il faut absolument bannir", souligne Yamina Moukah. Face à son manager ou à la direction, le maître-mot est l'objectivité.

"Ce qui est important, c'est quand vous allez voir votre patron, c'est d'apporter des preuves", poursuit la spécialiste. Il s'agit donc de bien préparer à l'avance son argumentation avec des "éléments tangibles issus de deux types d'objectifs".

Rappelons que chaque année, lors des entretiens annuels, le manager fixe des objectifs au collaborateur. Les atteindre, voire les dépasser, constitue un argument de poids pour justifier une augmentation.

"Il peut y avoir deux types d'objectifs", explique Yamina Moukah. "Les premiers sont évidemment quantitatifs: objectifs business, de performance, de ventes etc". Affirmer ne suffit pas: mettez en avant des chiffres précis et vérifiables, des progressions quantifiables…

Les seconds objectifs sont d'ordre qualitatifs. "On pourra effectivement vous juger sur des éléments qualitatifs. Il peut s'agir de la satisfaction des clients, de votre capacité à avoir mené un projet de façon optimale, de la votre qualité managériale si vous manager des équipes, de votre capacité à mettre en place des processs, de votre capacité organisationnelle, ou votre capacité à structurer les équipes", détaille la chasseuse de tête.

"C'est ce type d'arguments qui vont vous permettre de négocier, c'est une discussion qui doit être ouverte avec votre employeur, c'est un échange qui doit se faire de professionnel à professionnel" résume-t-elle. Le principe est bien de prouver la valeur de votre contribution positive à l’entreprise.

D'autant plus si vous travaillez dans un secteur en tension. Le rapport de force est favorable au salarié car si l'entreprise rechigne ou propose une augmentation trop faible, le risque est de voir partir le collaborateur. Il lui faudra alors recruter dans l'urgence et c'est souvent plus cher.

• Offrez des perspectives

Outre la réussite d'objectifs, obtenir une augmentation peut également être associé à la prise de nouvelles responsabilités.

L'idée: mettre en avant sa volonté de prendre en charge des missions plus complexes. Si cette évolution repose sur vos succès passée, elle justifie dans le même temps une meilleure rémunération.

• Savoir quantifier sa demande

Une augmentation d'accord, mais de combien? La question peut-être posée lors de la négociation. Là encore, un travail préparatoire s'impose.

Pour être pertinent, il s'agit d'abord de se renseigner (voire enquêter) sur les salaires de référence dans son secteur et pour sa profession compte tenu se son expérience. Pour se faire, il est toujours utile de se plonger dans les études annuelles des cabinets de recrutement ou encore se renseigner auprès de l'Apec, l'agence pour l'emploi des cadres. L'objectif est d'être réaliste.

Voila pour le contexte général mais il est également très utile de connaître les fourchettes de rémunérations appliquées dans sa propre entreprise. Histoire ne pas être à côté de la plaque lors de la négociation.

Pour autant, étant donné le secret entourant les salaires et le fait que cette question est souvent tabou, il est parfois difficile de faire cette évaluation.

Enfin, une connaissance de la santé financière de son employeur est indispensable avant d'envisager une demande. Il sera toujours difficile pour l'employeur de refuser un geste si les caisses sont pleine.

La menace d'une démission de l'entreprise n'est pas le meilleur argument même en période de tension. Revenir à la charge dans les six mois est toujours possible.

Demander les arguments qui motivent le refus du manager permet de mettre en place des actions spécifiques pour infléchir à terme sa décision. Essayez de fixer une date, une perspective pour en reparler.

Surtout, le salarié peut mettre en avant des alternatives: prime, actions de l'entreprise, aménagement du télétravail, horaires, congés, prise en charge de moyens de transport propres…

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business