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Les actifs quittent Paris et Toulouse pour Marseille, Montpellier et Rennes

Selon une étude de LinkedIn, entre janvier et mai, le nombre de départs reste supérieur à celui de 2019. Paris reste en tête des villes où les départs sont les plus nombreux.

Avec les confinements à répétition et la généralisation du télétravail, de nombreux salariés ont décidé de déménager, quitter les grandes villes et s'installer à la campagne. Et beaucoup ont décidé d'y rester mettant les directions des ressources humaines des entreprises devant une situation sans précédent.

En juin dernier, 30% des DRH ont ainsi découvert que des salariés avaient déménagé pendant la crise sanitaire, pointait la présidente de l'Association Nationale des DRH (ANDRH) Audrey Richard. "C’est un phénomène nouveau, nous n'étions pas confrontés à cela auparavant, on le prend de plein fouet", confirmait Audrey Richard à l'antenne de BFMTV.

Et malgré la levée des restrictions et l'amélioration de la situation sanitaire, il semble que cette tendance se poursuive.

Des départs importants également depuis Toulouse et Strasbourg

Selon une étude de LinkedIn publiée le 7 juillet, "la pandémie et l’essor du télétravail ont modifié la carte de France des professionnels en engendrant un fort processus de mobilité au sein de l’Hexagone".

Concrètement, "le taux de migration interne ne cesse d’augmenter depuis le début de la pandémie, avec un pic de déménagements en septembre 2020 (+126% par rapport à la moyenne sur la période pré-pandémie), où le nombre de départs a été supérieur aux déménagements habituels du début de la rentrée scolaire. Cette migration se poursuit en 2021, puisque le taux de départs entre janvier et mai surpasse celui de l’année 2019 (+38%) à la même période".

Précisions que pour évaluer ce phénomène, LinkedIn a étudié le nombre de membres ayant modifié leur ville sur leur profil.

Paris est la ville où le nombre de départs progresse le plus depuis le début de la crise (-17,6% sur le ratio arrivées/départs).

"Ses défauts, comme la surpopulation ou la difficulté de se loger, sont devenus encore plus apparents en situation de crise", commente le réseau social. "Cet exode des Parisiens peut en partie s’expliquer par la possibilité qu’ils ont de partir sans changer de poste. Selon le "think tank" Forum Vies Mobiles, 60% des Franciliens ont la possibilité de télétravailler, contre un tiers des professionnels sur l’ensemble du territoire", poursuit-il.

La capitale est suivie par Toulouse (-16%), et Strasbourg (-8,7%). "Mono-industrie, la Ville rose pâtit de la crise du secteur aéronautique. Le plan social chez Airbus, avec des centaines de départs volontaires à Toulouse et Blagnac, a sans doute pesé dans la balance. Le recul de l’attractivité de Strasbourg s’inscrit dans le contexte d’une région Est en crise", commente LinkedIn.

Marseille et Montpellier en tête des destinations

Côté destinations, Marseille (+8,2% sur le ratio arrivées/départs) est la ville dont l’attractivité a le plus accéléré durant la crise sanitaire, suivie par Montpellier (+7,8%) et Rennes (+7,2%).

"La cité phocéenne, réputée pour sa météo, se démarque dans le numérique, tout en ayant amélioré son offre culturelle cette dernière décennie. Quant à Montpellier et Rennes, elles sont aussi des "villes 15 minutes" où tous les lieux importants, du bureau à l’école, en passant par les espaces verts, sont accessibles en quelques minutes à pied ou en vélo", explique LinkedIn.

Quels types de salariés ont décidé de quitter leurs villes? Les professionnels de la grande distribution sont 16% plus nombreux à avoir opté pour une des villes les plus attractives du baromètre LinkedIn de l’emploi par rapport à la période pré-pandémie. Les secteurs de l’éducation (+10%), du tourisme (+8,3%) et des médias-communication (+3,7%) ont également observé une mobilité accrue.

Situation sans précédent pour les RH

"Les envies de nature et d’espace des professionnels étaient déjà de plus en plus fortes avant le Covid-19", explique le sociologue Jean Viard à LinkedIn Actualités. Selon l’auteur de La révolution que l’on attendait est arrivée (Editions de l’Aube), "ceux qui ont décidé de bouger la première année étaient déjà mûrs pour le faire. Mais le mouvement va se poursuivre, car la crise a amené davantage de professionnels à se poser des questions sur le sens de leur vie".

Un cauchemar en perspective pour les RH et les entreprises. "En tant que DRH, on se dit 'comment va-t-il faire?''s'il'il travaille à Paris et habite dans le sud de la France, il va devoir prendre le train, il va sans doute y avoir des retards régulièrement", s'inquiète Audrey Richard de l'ANDRH.

Elle appelle donc à la responsabilité des salariés. "On est face à quelque chose qui nous pose des difficultés. L’individuel ne doit pas prendre le pas sur le collectif", prévient-elle.

Vers des difficultés de recrutement?

Autre question: les possibles difficultés de recrutement avec un vivier de candidats qui se réduit dans les villes où l'exode est important comme Paris alors que la demande est en hausse.

"Notre baromètre confirme que les recrutements sont bien repartis à la hausse. En mai, notre taux de recrutement (qui se base sur le pourcentage de membres LinkedIn ayant ajouté un nouvel employeur à leur profil) a grimpé de 1,6% par rapport à avril, et de 72,6% par rapport à mai 2020", souligne l'expert.

Le bien-être (+37,6%), la santé (+16,3%) et l’immobilier (+15,7%) sont les secteurs les plus demandeurs. Selon les derniers chiffres de l’Unédic, 126.000 emplois devraient être créés cette année. De quoi conforter les salariés en quête de mobilité géographique dans leurs choix?

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business