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Le lien unissant un chauffeur et Uber reconnu "contrat de travail" en appel

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C'est une décision historique que vient de prendre la cour d'appel de Paris en reconnaissant que les chauffeurs Uber sont bien liés par un "contrat de travail". La compagnie a annoncé vendredi qu'elle allait se pourvoir en cassation.

Le lien qui unissait un ancien chauffeur à la plateforme de réservation en ligne Uber est bien un "contrat de travail", a estimé la cour d'appel de Paris dans un arrêt rendu jeudi, une "première" concernant le géant américain en France.

Dans cette décision, la cour d'appel estime que le contrat "ayant lié" un ancien chauffeur à "la société de droit néerlandais Uber BV est un contrat de travail". Elle détaille "un faisceau suffisant d'indices" qui caractérise selon elle "le lien de subordination" liant le chauffeur à la plate-forme.

"Nous allons former un pourvoi contre cet arrêt", a indiqué vendredi à l'AFP une porte-parole d'Uber. "Les chauffeurs choisissent d'utiliser l'application Uber pour l'indépendance et la liberté de s'y connecter si, quand et où ils le souhaitent", a affirmé la porte-parole. "Concrètement, les chauffeurs peuvent décider de se connecter en temps réel et sans aucune condition d'exclusivité", a-t-elle insisté, expliquant le pourvoi par la volonté que "cette flexibilité" soit "préservée".

Le chauffeur avait saisi la justice en juin 2017, deux mois après qu'Uber avait "désactivé son compte", le "privant de la possibilité de recevoir de nouvelles demandes de réservation", rappelle la cour. A l'époque, il lui avait été expliqué que la décision avait été "prise après une étude approfondie de son cas".

L'affaire avait été renvoyée en juin dernier au tribunal de commerce de Paris, les prud'hommes s'étant estimés incompétents. Il s'agit de la "première fois" que la cour d'appel de Paris juge que la relation de travail entre un chauffeur VTC et Uber est un contrat de travail, a souligné Me Fabien Masson, du cabinet BNR, défendeur du plaignant. 

Pas de libre choix

La cour justifie notamment sa décision parce qu'"une condition essentielle de l'entreprise individuelle indépendante est le libre choix que son auteur fait de la créer (...), la maîtrise de l'organisation de ses tâches, sa recherche de clientèle et de fournisseurs".

Or, le plaignant n'a pu se "constituer aucune clientèle propre", possibilité interdite par Uber, et ne fixait "pas librement ses tarifs ni les conditions d'exercice de sa prestation de transport", relève la cour. 

En outre, argumente-t-elle, Uber exerçait bien un "contrôle" sur lui puisque "au bout de trois refus de sollicitations, (le chauffeur reçoit) le message: Êtes-vous encore là ?". 

Si un chauffeur décide de se déconnecter, la plate-forme "se réserve le droit de désactiver ou autrement restreindre l'accès ou l'utilisation" de l'application. Cette pratique a "pour effet d'inciter les chauffeurs à rester connectés pour espérer effectuer une course et, ainsi, à se tenir constamment, pendant la durée de la connexion, à la disposition de la société Uber BV, sans pouvoir réellement choisir librement, comme le ferait un chauffeur indépendant, la course qui leur convient ou non", détaille la cour.

Frédéric Bianchi avec AFP