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La police pour lutter contre le chômage des jeunes

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par Grégory Blachier LES MUREAUX, Yvelines (Reuters) - Charline Belardi a 17 ans et, dans quelques jours, elle fera ses premiers pas sous l'uniforme...

par Grégory Blachier

LES MUREAUX, Yvelines (Reuters) - Charline Belardi a 17 ans et, dans quelques jours, elle fera ses premiers pas sous l'uniforme de la police municipale des Mureaux.

Comme quatre autres adolescents de cette commune des Yvelines proche de Paris et affectée par un taux de chômage des jeunes important, un phénomène particulièrement sévère en France, elle fait partie de la première promotion des "cadets".

"J'étais au lycée, en première STG (gestion), mais ça ne me plaisait pas du tout. Là, je vais être en alternance à la police municipale et ça me permettra peut-être d'y accéder", dit-elle.

A partir de lundi, elle se lance dans une formation inédite, créée par la municipalité pour tenter d'apporter une réponse aux problèmes d'emploi, de civisme, et de prévention et sécurité.

Parti du constat que les "adulescents" de 16 à 18 ans sont les plus exposés au risque de décrochage, tant sur le plan de la vie active que de la vie en société, le maire divers gauche, François Garay, a voulu "faire un travail sur ce temps".

Des passeports citoyens ont été mis en place et chaque été, 250 jeunes de moins de 18 ans sont accueillis dans les services municipaux. Il voit aujourd'hui un peu plus loin.

"Si, à 16 ans, on sort du système éducatif, on doit disposer d'un ensemble de voies de sortie (...) On ne regarde pas aujourd'hui le coût induit du fait de ne pas mettre les gens dans des voies positives", souligne-t-il.

Dans cette commune de 32.000 habitants, qui compte cinq quartiers en Zone urbaine sensible (Zus), le taux de chômage était de 15,5% en 2007, nettement plus que la moyenne nationale.

Les jeunes, dont le taux de chômage des actifs de 15 à 24 ans est plus de deux fois supérieur au taux général en France, à quelque 25% contre une moyenne de 20% en Europe mais seulement 10% en Allemagne, sont en difficulté.

Fin 2008, les moins de 26 ans représentaient 20% du total des chômeurs aux Mureaux et 23,3% dans les Zus, contre 11,8% pour l'ensemble de la région.

"SUR LE TERRAIN MAIS PAS EXPOSÉS"

Pendant deux ans, cinq adolescents - filles et garçons, issus de tous les quartiers et d'origines socio-culturelles diverses - vont suivre un certificat d'aptitude professionnelle (CAP) d'"agent de prévention et de médiation" en apprentissage, avec l'objectif de passer le concours de la police municipale.

Ils partageront leur temps entre le lycée Vaucanson et le terrain aux côtés de leurs probables futurs collègues - dans des uniformes semblables mais dotés d'un signe distinctif, précise l'adjoint au maire chargé de la sécurité, Bruno Le Guillou.

"Ils ne seront pas sur des dispositifs sensibles, on doit les protéger. Ils seront sur l'événementiel, pourquoi pas la sécurité routière, sur de l'accompagnement. Ils seront sur le terrain, mais pas exposés", explique-t-il.

Leur travail s'inscrira ainsi dans le cadre de la mission de "prévention" de la police municipale, sur laquelle il insiste.

Ce projet colle avec les ambitions de Charline Belardi et avec la conception que le maire dit avoir de sa police.

"La police municipale, c'est déjà être là pour les gens, pour assurer la sécurité mais en même temps pour prévenir. J'ai toujours eu besoin d'aller aider, d'être à l'écoute des gens", dit la jeune fille, dont le père pompier a nourri la vocation.

François Garay abonde: "On demande à notre police d'être à pied, de parler, discuter. S'il y a des délits, il faut intervenir, bien sûr. Mais la police, c'est à tous les instants, à tous les endroits, près du citoyen."

Un citoyen qui, en suivant cette formation, sera lui aussi plus à même de connaître la règle et de l'appliquer.

La Ville, confrontée ces derniers mois directement ou tout près, à des faits divers qui ont alimenté les journaux - dont une rixe mortelle sur l'A13 - mise donc sur l'exemplarité de ses adolescents et de ses enfants.

"La question est de savoir si on est dans une société qui distribue des cartons rouges ? Il y aura toujours des gens qui se mettront en marge. Mais souvent, quand on parle de sécurité, c'est parce qu'on n'a pas su travailler sur la règle. Et la règle, ça commence tout petit", dit François Garay.

Cette exigence n'effraie pas Charline Belardi.

"Pour faire ce métier et cette formation, il faut avoir du cran et du courage parce qu'il n'y a pas beaucoup de jeunes qui se mettraient à ma place", dit celle qui a dû faire face à l'incrédulité de ses amis: "Ils me disent que je suis folle."

Quant à sa mère, Patricia, elle dit n'avoir que des "craintes de maman" et savoir, aussi, que sa fille "grandit".

"C'est une jeune adulte, il faut qu'elle apprenne à être autonome", dit-elle.

Elle rejoint ainsi l'esprit de ce projet qui veut ouvrir un peu plus la société et le monde du travail à la jeunesse, et que la mairie des Mureaux espère décliner dans beaucoup de corps de métier - pompiers, médiateurs ou autres - puis voir être copié.

Edité par Yves Clarisse