BFM Business
Emploi

L'exécutif conjugue le bâton et la carotte sur les retraites

Des salariés de la ville de Villejuif rejoignent les grévistes bloquant l'entrée de la raffinerie de Grandpuits, en Seine-et-Marne. Le gouvernement a continué jeudi à agiter le bâton contre les opposants à la réforme des retraites qui bloquent les dépôts

Des salariés de la ville de Villejuif rejoignent les grévistes bloquant l'entrée de la raffinerie de Grandpuits, en Seine-et-Marne. Le gouvernement a continué jeudi à agiter le bâton contre les opposants à la réforme des retraites qui bloquent les dépôts - -

par Emmanuel Jarry PARIS (Reuters) - Le gouvernement a continué jeudi à agiter le bâton contre les opposants à la réforme des retraites qui bloquent...

par Emmanuel Jarry

PARIS (Reuters) - Le gouvernement a continué jeudi à agiter le bâton contre les opposants à la réforme des retraites qui bloquent les dépôts de carburant mais tendu une carotte aux syndicats sous forme d'un amendement sénatorial.

Le président Nicolas Sarkozy, en déplacement en province, a haussé le ton. Il a dénoncé la "prise en otage" des Français, de leur économie et de leurs entreprises par une "minorité" et les violences des casseurs en marge de manifestations.

Le gouvernement, qui campe sur sa réforme, a demandé aux sénateurs d'accélérer l'examen du projet de loi pour le voter vendredi, a-t-on appris de source parlementaire.

Il a néanmoins donné son feu vert au vote par le Sénat, dans la nuit de mercredi à jeudi, d'un amendement qui ouvre la porte à un nouveau débat après l'élection présidentielle de 2012.

Ce texte, présenté par le rapporteur UMP de la commission des Affaires sociales du Sénat Dominique Leclerc, le groupe de l'Union centriste (UC) et le patron du groupe UMP, Gérard Longuet, est un compromis entre plusieurs textes similaires proposés par des sénateurs de la majorité.

Il prévoit l'organisation, "à compter du premier semestre 2013", d'une réflexion nationale sur une réforme "systémique" des régimes de retraite français.

"INESPÉRÉ"

Il propose que cette réflexion porte sur les conditions de la mise en place d'un "régime universel par points ou en comptes notionnels" et sur les moyens de "faciliter le libre choix des assurés" sur les modalités de leur cessation d'activité.

"Ce qui a été voté était inespéré il y a trois semaines", commente le président de la commission des finances du Sénat, Jean Arthuis. "Fin septembre, le gouvernement ne voulait pas entendre parler de l'évocation d'une réforme systémique parce que c'était reconnaître les faiblesses de sa propre réforme."

Le sénateur centriste avait lui-même déposé, avec l'UC, un amendement détaillant les modalités d'un système de retraite par points à mettre en place à l'horizon 2020.

"Le gouvernement est obligé de reconnaître que sa réforme est une réforme de colmatage et ne répond pas à l'exigence de mettre les Français à égalité devant la retraite", estime-t-il.

Pour le porte-parole de l'UMP Dominique Paillé, le vote de l'amendement sénatorial "est la confirmation que le sujet des retraites ne sera pas clos avec le vote de la réforme" - une tonalité qui tranche avec le ton définitif des déclarations de l'Elysée, du gouvernement et de l'UMP ces dernières semaines.

La réforme systémique évoquée s'inspire de ce qui existe dans d'autres pays européens, comme la Suède, et rejoint les propositions de syndicats comme la CFDT.

A quelques heures d'une nouvelle réunion de l'intersyndicale sur la suite du mouvement de protestation, le geste a cependant été jugé insuffisant par le négociateur de la CGT.

"LE PIÈGE DE LA RADICALISATION"

"Le gouvernement propose de rouvrir le débat en 2013 une fois votées les mesures d'âge. Ce n'est pas sérieux", a dit à Reuters Eric Aubin, membre de la direction de la CGT. "Ce n'est pas de nature à modifier quoi que ce soit à notre appréciation de la réforme, à notre mobilisation et à notre état d'esprit."

Le recul de 60 à 62 ans l'âge légal de la retraite et de 65 à 67 ans pour une pension à taux plein, quel que soit le nombre de trimestres cotisés, ont déjà été votées par le Parlement.

Eric Aubin, dont le syndicat est opposé à une réforme systémique et à un régime des retraites à points, voit dans l'amendement sénatorial une tentative "évidente" de diviser le front syndical. "Mais cette tentative va échouer", assure-t-il.

Son homologue de la CFDT, Jean-Louis Malys, assure lui aussi que le vote de l'amendement ne "change absolument rien".

"On est depuis le début dans la contestation de cette réforme et on le reste", a-t-il déclaré à Reuters.

La CFDT a cependant lancé jeudi matin, dans un communiqué, une mise en garde contre le risque de tomber dans le piège de la radicalisation, selon la formule de Jean-Louis Malys.

"Nous avons jusqu'ici gagné la bataille de l'opinion", estime le syndicat. "Cet élan de sympathie, pour être conservé, exige une prise de distance avec toutes formes de radicalité."

Edité par Yves Clarisse