BFM Business
Emploi

Indemnités prud'homales: la Cour de cassation valide le barème Macron

La cour de cassation, à Paris.

La cour de cassation, à Paris. - Siren-Com - Wikimedia - CC

Pour la plus haute juridiction française, le barème plafonnant les indemnités prud'homales prévu par les ordonnances loi travail ne contrevient pas aux traités internationaux signés par la France.

La Cour de cassation a validé ce mercredi la conformité du barème des indemnités prud'homales avec les traités internationaux dont la France est signataire.

La plus haute juridiction du pays avait été sollicitée, pour avis, par les conseils de prud'hommes de Toulouse et de Louviers sur la conformité du barème. Plusieurs juridictions ont refusé d'appliquer le barème en invoquant notamment soit un article de l'Organisation internationale du travail (OIT), soit un article de la Charte sociale européenne. 

Dans les deux avis qu'elle a rendus ce mercredi en assemblée plénière, la Cour estime que les dispositions de l'article du code du travail fixant les modalités du barème "sont compatibles avec les stipulations de l’article 10 de la Convention n°158 de l’OIT". Les juges ont également considéré que "les dispositions de l’article 24 de la Charte sociale européenne révisée ne sont pas d’effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers". Autrement dit, les conseils de prud'hommes ne peuvent pas, en principe, s'appuyer sur ce texte pour réfuter l'application du barème.

Par ailleurs, la plus haute juridiction du pays a acté que le barème "n'entr[e] pas dans le champ d’application de l’article 6, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales".

"Rassurer" les employeurs

Auparavant, les juges prud'homaux fixaient librement le montant des indemnités accordées aux victimes d'un licenciement abusif. Emmanuel Macron considérait que c'était un frein à l'embauche et qu'il fallait rendre les sanctions plus "prévisibles" afin de "rassurer" les employeurs. 

Alors ministre de l'Économie, il avait déjà tenté d'inscrire ce dispositif dans la loi Macron de 2015, mais le Conseil constitutionnel l'avait retoqué. Devenu président de la République, il a finalement fait inscrire le barème dans les ordonnances réformant le Code du travail de 2017.

Désormais, un salarié licencié sans motif -ou du moins sans cause dite "réelle et sérieuse"- peut obtenir au mieux une indemnité équivalente à un mois de salaire si son ancienneté est inférieure à un an. Au-delà de dix années d'ancienneté, le barème devient de plus en plus désavantageux. Un employé ayant 20 ans de boîte peut prétendre à une indemnité maximale de 15 mois et demi de salaire par exemple.

Une atteinte à la liberté des juges?

Cette mesure est impopulaire chez les juges prud'homaux, dont certains considèrent qu'elle porte atteinte à leur liberté d'évaluer la gravité d'un préjudice et de fixer une indemnité adéquate pour le réparer. Plusieurs conseils de prud'hommes ont donc choisi de ne pas l'appliquer, motivant leurs décisions en brandissant les deux textes supranationaux de l'OIT et de la Charte sociale européenne. Le parquet avait commencé à contre-attaquer en recensant les décisions afin de donner sa position. 

L'avis de la Cour de cassation n'est pas contraignant mais devrait être suivi par la plupart des cours d'appel. Dans le cas contraire, les personnes mises en causes peuvent se pourvoir en cassation et "on voit mal la chambre sociale de la Cour de cassation ne pas s'incliner devant l'assemblée plénière, qui a rendu l'avis", précise à Reuters l'avocat Jean-Jacques Gatineau.

Jean-Christophe Catalon