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Emploi

Faut-il obliger les détenus à travailler en prison?

En France plus de 64 000 personnes sont incarcérées, pour 56 000 places disponibles.

En France plus de 64 000 personnes sont incarcérées, pour 56 000 places disponibles. - -

Des députés de la majorité veulent rendre à nouveau obligatoire le travail ou la formation en prison, pour une meilleure « réinsertion sociale et professionnelle ». Leurs opposants arguent notamment de la surpopulation carcérale. Donnez votre avis sur ce débat dans ce forum.

139 députés de la majorité veulent rendre obligatoire le travail ou la formation en prison. A l'initiative de leur collègue UMP des Bouches-du-Rhône Richard Mallié, ils ont déposé ce jeudi une proposition de loi en ce sens, pour « mettre fin à l'oisiveté en prison ».

Depuis 1987, le travail en prison ou la formation se fait sur la base du volontariat. Mais les volontaires se font de plus en plus rares. D'après ces députés, ils étaient 48% en 2001, contre seulement 32,6% en 2007.
Ils soulignent que l’exercice d’une « activité "utile" [travail, formation professionnelle] en prison, rémunérée à un juste niveau, ouvre des perspectives en matière de réinsertion sociale et professionnelle ».

« Respecter l’égalité avec les autres citoyens »

Le député du Nord Christian Vanneste, signataire de cette proposition de loi, avance comme argument « le principe de l’égalité » : « ça devrait être un devoir, parce que c’est d’une part payer son hébergement, c’est d’autre part préparer sa sortie, c’est enfin respecter l’égalité avec les autres citoyens. Si je suis en liberté, pour vivre je dois travailler. Et par là même, la personne qui en plus est en prison parce qu’elle a commis un délit ou un crime, doit aussi travailler. »

Pour travailler, les détenus s’inscrivent sur des listes d’attente

Aujourd’hui, pour travailler en prison, il faut être volontaire. Mais ça ne suffit pas, encore faut-il avoir une place de disponible dans les différents ateliers. Exemple au centre pénitencier de Versailles : sur 80 détenus, 15 travaillent à la chaîne, dans un atelier d’assemblage. Mais ils sont beaucoup plus à vouloir y travailler. A tel point que les détenus s’inscrivent sur des listes d’attente… Mais faute de place, c’est la direction de la prison qui « sélectionne » les détenus.

Pourquoi une telle situation ? D’abord à cause de la surpopulation carcérale : en France, plus de 64 000 personnes sont incarcérées, pour 56 000 places disponibles. Dans les prisons, c’est donc la chasse au mètre carré. Dans la maison d’arrêt de Nantes par exemple, il arrive que les gardiens ne trouvent plus de place pour poser des matelas supplémentaires.

« Obliger un détenu à travailler c’est illégal »

Ce que confirme Patrick Marest, porte-parole de l’Observatoire International des prisons, opposé à ce projet de rendre obligatoire le travail en prison : « Je suis contre, parce que les prisons sont pleines à craquer. Et si on veut des ateliers, il faut des mètres carrés. Ils sont récupérés désespérément centimètre par centimètre, par l’administration pénitentiaire, pour essayer de caser des cellules pour y mettre des matelas en plus, pour accueillir tous les gens qu’on envoie en prison. Et en plus, obliger un détenu à travailler c’est illégal, comme obliger quelqu’un à travailler dehors est illégal. »

La Rédaction, avec Thibault Delachaux