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Comment la charge mentale des salariés et l'épuisement ont explosé depuis la crise Covid

Entre télétravail, retour au bureau et pression interne, 60% des salariés se considèrent comme stressés. C'est deux fois plus qu'avant la crise, souligne une étude. Les cas de burn-out sévères explosent.

Sans surprise, les conséquences psychologiques de la crise du Covid sur les salariés français sont lourdes et protéiformes. Selon une étude* menée pour Dynamic Workplace et Speak & Act en partenariat avec Herman Miller, la Région Ile-de-France, l’Hôpital Européen de Paris et l’INSEEC MSc & MBA et Bachelor, 60% des salariés se considérent comme stressés, c'est deux fois plus qu'avant la crise.

Ce stress s'illustre par le poids de la charge mentale, soit l’ensemble des sollicitations du cerveau pendant l’exécution du travail. "Déjà présente en pré-crise, elle s’est vue propulsée sur le devant de la scène suite au télétravail forcé des confinements de 2020", soulignent les auteurs. Le retour au bureau et la pression interne pour accélérer l'activité constituent également des sources de stress supplémentaires.

Les outils numériques sources de stress

Cette charge mentale se caractérise par exemple par le fait que de plus en plus de salariés déclarent travailler le week-end (73% contre 60% avant la crise) ou à penser au travail (61% contre 46%) ou lire ses mails pros (49% contre 19%) avant d’aller dormir. 46% des collaborateurs attestent que les situations et mails "urgents" se sont multipliés par rapport à l’avant crise.

La baguette magique des outils technologiques censés faciliter le télétravail est perçue comme à double tranchant. Si 92% des collaborateurs interrogés percevaient ces outils comme une solution de facilitation de leur quotidien, ils ne sont plus que 60% à le penser après le confinement.

"De nombreuses entreprises n’étaient pas préparées au télétravail soudain et forcé, c’est pourquoi la mise en place d’outils de travail à distance a souvent été stressante et compliquée. Aussi, on note le côté intrusif des outils numériques professionnels à la maison, qui a été difficile à gérer pour les collaborateurs en ce début de crise sanitaire", peut-on lire.

À cela s’ajoute également une perte de motivation significative avec 43% des sondés qui déclarent une baisse d’engagement envers leurs employeurs.

Les femmes plus touchées

Résultat, les salariés français sont épuisés et aspirent à changer de vie. Selon le baromètre** OpinionWay pour Empreinte Humaine, si 38% des salariés sont en "détresse psychologique", soit un recul de six points par rapport à l'étude précédente (44%), réalisée au printemps, le nombre de cas de burn-out sévère "continue d'exploser", bondissant de 25% par rapport à mai, deux managers sur dix (18%) sont en burn-out sévère. Selon l'étude, 2,5 millions de salariés sont concernés.

Ces "niveaux élevés de burn-out s'expliquent par l'épuisement de 18 mois de crise" qui ont conduit les salariés "au bout de leurs ressources personnelles", considère le cabinet franco-québécois, spécialisé dans la prévention des risques psychosociaux (burn-out, dépressions, suicides...).

"Toujours les plus touchées", 44% des femmes sont en détresse psychologique, contre 33% des hommes. Les jeunes en souffrent également davantage avec la moitié des moins de 39 ans concernés. Et 20% de l'ensemble des salariés ont été en arrêt maladie pour raisons psychologiques, tandis qu'un tiers (33%) sont en dépression nécessitant un traitement.

Conséquence, depuis le début de la crise sanitaire, 19% du total des salariés et 35% des télétravailleurs ont déménagé. Un changement qui a pu avoir un effet positif. Le taux de détresse psychologique des télétravailleurs qui ont déménagé est inférieur de 15 points à celui des autres (28% contre 43%).

Déménagements et changements de vie

Parmi les 20% des salariés déclarant avoir été en arrêt maladie pour des raisons psychologiques, 69% d’entre eux déclarent avoir déménagé. "Ce qui confirme le lien entre santé mentale et volonté de changement de vie", peut-on lire.

D'ailleurs, 16% des salariés ont quitté leur entreprise "par choix" depuis le début de la crise et un tiers (31%) souhaitent chercher "activement" un autre emploi "après la crise". Parmi eux, 55% sont en détresse psychologique.

Pour les autres, la sortie de crise semble avoir encore renforcé les attentes des salariés envers leur entreprise: 82% (+12 points) veulent que les politiques de qualité de vie au travail de leur entreprise évoluent.

*Les questionnaires ont été menés de janvier 2020 à mars 2021 auprès d’un panel de 1000 répondants (collaborateurs et managers d’entreprises sur le territoire français).

**La 8ème vague du Baromètre "Santé psychologique des salariés en période de crise" OpinionWay pour Empreinte Humaine, a été réalisée en ligne. Le recueil a été fait du 28 septembre au 7 octobre 2021 auprès d’un panel représentatif de 2016 salariés représentatif et constitué selon la méthode des quotas, au regard des critères de sexe, d’âge, de secteurs d’activités, de nature d’employeur et de taille d’entreprises.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business