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Après Airbnb, New York déclare la guerre à Uber

La ville de New York va imposer un salaire minimum pour les chauffeurs VTC. Celui-ci pourrait atteindre l'équivalent de 15 euros de l'heure. Par ailleurs, la municipalité a décidé de geler les permis VTC pendant un an.

Après avoir pris des mesures drastiques pour limiter l'activité d'Airbnb, New York s'attaque aux plateformes de VTC. En effet, la municipalité a gelé mercredi pour un an les nouvelles licences pour les VTC et imposé un salaire minimum pour les chauffeurs, deux mesures inédites aux États-Unis qui constituent un camouflet pour Uber et ses concurrents.

Cette suspension des nouveaux permis accordés aux voitures avec chauffeur (VTC) vise à donner le temps à l'autorité new-yorkaise de supervision des véhicules avec chauffeur (TLC) de réaliser une étude d'impact pour mesurer les effets de cette industrie sur la ville. Quant au salaire minimum, selon le texte adopté mercredi, il appartiendra à la TLC d'en déterminer le montant, mais un rapport que l'autorité a commandé et validé recommande un salaire horaire de 17,22 dollars, soit près de 15 euros.

Ce montant correspond au salaire minimum qui sera en vigueur fin 2018 dans l'Etat de New York, soit 15 dollars, augmenté d'une somme considérée comme nécessaire pour couvrir les frais des chauffeurs. Selon le rapport commandé par la TLC, 85% des chauffeurs de VTC gagnent moins que ce salaire horaire. La mise en place de revenu minimum horaire net entraînerait une hausse moyenne de 22,5% pour les chauffeurs de VTC, toujours selon l'étude.

Une hausse du coût de la course attendue

Concernant les répercussions pour les usagers de la création d'un salaire minimum, le document estime que le coût d'une course pourrait augmenter, en moyenne, de 3 à 5% et le temps d'attente de 12 à 15 secondes seulement.

C'est un double revers pour les grands acteurs des VTC, Uber en premier lieu, mais aussi Lyft, Juno et Via, qui ont mené campagne durant des semaines pour mobiliser les usagers sur le sujet. Pour Uber, cette pause d'un an "menace l'une des rares solutions de transport (à New York) sans rien faire pour améliorer le métro ou décongestionner la circulation", selon une réaction transmise à l'AFP.

"Ne laissez pas tomber les New-Yorkais", disait un spot publicitaire de la célèbre plateforme, laissant entendre que contrairement à ses chauffeurs, les taxis traditionnels refusaient parfois de prendre des clients issus de minorités ethniques, notamment noirs. "Bientôt, des prix plus élevés et plus d'attente", avait annoncé Uber dans un message envoyé à ses usagers, les invitant à contacter leurs élus locaux pour s'opposer au texte.

Le nombre de VTC a plus que doublé en sept ans

En 2015, le maire de New York Bill de Blasio avait déjà tenté, en vain, de limiter le nombre des VTC. "Plus de 100.000 travailleurs vont constater le bénéfice immédiat de cette loi", a réagi le maire, dans un communiqué. "Et cette décision va stopper l'afflux de voitures qui contribue à la congestion qui paralyse nos rues."

En 2010, avant l'installation d'Uber l'année suivante, la ville comptait environ 37.000 VTC et quelque 13.500 taxis. L'an dernier, le nombre de taxis, fixé par la TLC, n'avait pas changé, mais les VTC, eux avaient plus que doublé, passant à plus de 83.000. Le sud de Manhattan est désormais en proie à une circulation d'une densité inédite et ininterrompue du matin au soir.

La situation a amené le gouverneur Andrew Cuomo à évoquer la création d'une taxe (congestion pricing) dont devraient s'acquitter les véhicules circulant dans les zones les plus encombrées. Une proposition soutenue par Uber, mais à laquelle Bill de Blasio s'est dit plutôt opposé. Par ailleurs, l'explosion du marché des VTC a mis les taxis sous pression et fait plonger la valeur de leur licence ou médaillon, qui se négociait, il y a quelques années encore, au-delà du million de dollars.

En moins d'un an, six chauffeurs de taxi ont mis fin à leurs jours en laissant clairement entendre que leur geste était lié à leur métier. "Il n'est pas facile de s'en prendre aux géants de la Silicon Valley, mais nous avons continué à nous battre pour ce que nous savions être juste et aujourd'hui, les travailleurs ont gagné", a réagi l'Independent Drivers Guild, syndicat apparu en 2016 pour représenter les chauffeurs de VTC.

P.L avec AFP