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Union européenne

Paolo Gentiloni: comment l'Union européenne va répondre massivement aux subventions américaines

Invité de BFM Business, le commissaire européen à l'Economie détaille la réponse européenne à l'Inflation Reduction Act (IRA) mis en place outre-Atlantique qui irrite profondément la France notamment.

Comment l'Union européenne va-t-elle agir face à l'Inflation Reduction Act (IRA) déployé par l'administration Biden? Rappelons que cette loi, perçue par l'UE comme un nouveau "protectionnisme" américain, prévoit notamment une pluie de subventions pour les entreprises implantées dans le pays dans le secteur des véhicules électriques ou des énergies renouvelables.

Pour la France, la réponse doit être "forte" et "équivalente" et il semble que la Commission soit sur la même longueur d'onde.

Invité de Good Evening Business sur BFM Business ce vendredi, Paolo Gentiloni, le commissaire européen à l'Economie explique: "je partage l'idée qu'une réponse est nécessaire et pas seulement à l'Inflation Reduction Act américain. Le sujet, c'est de s'occuper de notre compétitivité. Ce sujet n'est pas nouveau, et il est amplifié par les prix de l'énergie".

Soutenir le solaire, le véhicule électrique

"Les prix ont beaucoup baissé par rapport à leur niveau de l'été dernier, mais ils sont toujours deux à trois fois supérieurs à ceux des États-Unis, ou dans d'autres zones économiques importantes. Il faut s'occuper de ce décalage. En soi, l'initiative des Américains est bonne, parce qu'ils font de la transition verte une priorité. Mais leur but est aussi d'attirer sur leur territoire les entreprises d'avant-garde, de pointe, du monde entier, et notamment européennes. Et notre réponse, ce sera donc un soutien à ces industries, un nouveau fonds européen en commun, et une simplification des règles" explique-t-il.

Avec quels outils? Faut-il mettre en place un "copier-coller" de l'IRA en Europe?

"Je ne dirai pas qu'il faut copier l'IRA américain. La Commission présentera sa proposition mercredi prochain, le 1er février. Et nous travaillons à identifier les secteurs et les projets de pointe qu'il faut soutenir" ajoute le commissaire.

Sans surprise, les secteurs du solaire et des véhicules électriques devraient être choyés. "Nous avons démontré dans certains domaines, comme l'éolien, que l'Europe peut être un leader mondial. Mais nous devons maintenant le faire dans plusieurs autres secteurs, en ayant en tête que l'échelle européenne est très importante. Pour la voiture électrique par exemple, il y a beaucoup de subventions dans chacun des pays, mais aucun n'a l'échelle suffisante. Il faut absolument mettre nos forces en commun si nous voulons être réellement compétitif".

"Le principe, c'est un fonds dédié aux projets d'avant-garde, qui ne peuvent réussir qu'à l'échelle européenne" répète-t-il.

Une fourchette de 300 à 750 milliards d'euros

Reste la question du financement. Quand les Etats-Unis mettent 369 milliards de dollars sur la table, jusqu'où sera prête à aller l'UE?

"Si on regarde froidement cette somme, on peut se dire que ce n'est pas si impressionnant. C'est équivalent aux subventions du plan de relance européen NextGenerationEU. Et on a beaucoup d'autres dispositifs maintenant. Sont-ils suffisants? Ma réponse est non. Il faut faire d'autres efforts. Il s'agit d'intérêts communs, de projets communs, qu'il faut financer à l'échelle européenne" souligne Paolo Gentiloni, qui confirme la fourchette de 300 à 750 milliards d'euros évoquée par le commissaire européen au Marché intérieur Thierry Breton.

Enfin, la Commission entend dans le même temps obtenir des exemptions de la part des Américains. "Il y a un groupe de travail entre l'Union Européenne et les Etats-Unis, qui se penche particulièrement sur les véhicules électriques. L'Europe demande à bénéficier des mêmes avantages que les pays qui ont un accord commercial avec les Etats-Unis, comme le Mexique ou le Canada. Je pense qu'entre partenaires alliés, et bons amis, il est normal d'avoir des exemptions, notamment pour les voitures électriques".

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business