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Réforme de l'assurance chômage: d'accord sur le fond, les syndicats contre-attaquent en ordre dispersé

De gauche à droite, le patron de la CGT Philippe Martinez et celui de la CFDT Laurent Berger.

De gauche à droite, le patron de la CGT Philippe Martinez et celui de la CFDT Laurent Berger. - AFP

Les syndicats dénoncent à l'unisson les mesures décidées par le gouvernement dans sa réforme de l'assurance chômage. Pourtant, la CGT ne participera pas à la première mobilisation lancée ce mardi par plusieurs organisations dont la CFDT.

Devant les micros, tous expriment leur "colère" contre le gouvernement et sa réforme de l'assurance chômage, mais dans la rue ils font bande à part. Ce mardi un rassemblement aura lieu à 12h devant le ministère du Travail à l'appel de la CFDT, le syndicat des cadres la CFE-CGC, la CFTC, l'Unsa et l'organisation étudiante Fage. Cette première mobilisation sera "symbolique", selon le leader de la CFDT Laurent Berger, qui ne s'attend pas à des centaines de milliers de participants. 

Cette première riposte se fera sans FO et Solidaires, et surtout sans la CGT. Cette dernière n'a pas été invitée par le premier syndicat de France, affirme sa secrétaire confédérale Catherine Perret. La centrale a annoncé de son côté un rassemblement mercredi devant l'Unédic, qui tiendra son conseil d'administration. "Nous avons proposé à la CFDT de manifester avec nous. Ils n'ont pas voulu. Nous le regrettons", assure Catherine Perret.

Pour Laurent Berger (CFDT), la CGT se trompe de cible

Pour Laurent Berger, la CGT "se trompe de cible" en allant manifester devant l'Unédic. Dans une interview à Libération parue vendredi, il fustige l'attitude de la confédération dirigée par Philippe Martinez. "Rappelons quand même qu’ils (la CGT) n’ont jamais signé un accord sur l’assurance chômage et ont toujours considéré que c’était à l'État de faire. Eh bien voilà, c’est la fin de l’histoire: l'État gère". Sur France Inter ce lundi, le secrétaire général de la CFDT en a rajouté une couche dans une attaque à peine dissimulée: 

"Lorsqu'on nie la place de la négociation collective, c'est vrai de la part du gouvernement, c'est vrai aussi de la part de certaines organisations syndicales ou patronales, et bien finalement on est face à des décisions unilatérales [du gouvernement] qui sont extrêmement dures et qui ont des conséquences très graves."

Laurent Berger n'est pas le seul à formuler cette critique envers la CGT. "On aurait pu s'unir", reconnaît Philippe Louis, le président de la CFTC, "Mais on ne veut pas de convergence des luttes: la CGT est contre toutes les réformes, pas nous."

Des discussions avancées entre les leaders syndicaux

Cette division syndicale peut paraître étrange, car leurs discours sont peu ou prou identiques. "Sur l'assurance chômage, il n'y a pas l'épaisseur d'une feuille de papier à cigarette entre la CGT et la CFDT. Mais ça donne deux rassemblements", se désole Eric Beynel, porte-parole de Solidaires.

Tous dénoncent "une réforme budgétaire" qui "sanctionne les chômeurs". Le texte dévoilé par le gouvernement le 19 juin, prévoit une modification des règles d'indemnisation. Désormais, il faudra avoir travaillé six mois sur les 24 derniers mois, au lieu de quatre sur les 28, pour avoir droit à une allocation chômage. Avec ce nouveau système, 300.000 chômeurs selon la CGT, 240.000 selon la CFDT, ne seront plus éligibles. Ils pointent également la "stigmatisation" des cadres, qui verront leur indemnité diminuer de 30% à partir du septième mois de chômage. Sans parler du bonus-malus contre l'abus des contrats courts qu'ils réclamaient et qui sera instauré, mais dont la formule retenue, avec seulement sept secteurs concernés, est insuffisante à leurs yeux. 

La CGT discute avec d'autres organisations syndicales

Sur France 2 vendredi 21 juin, Philippe Martinez (CGT) a dit vouloir "discuter avec d'autres organisations syndicales" pour que "face à une telle attaque" du gouvernement, il y ait "une riposte importante et massive du mouvement social". Les leaders syndicaux sont "en train de travailler à une mobilisation commune", confie François Hommeril de la CFE-CGC. "On se téléphone, on se voit. En deux jours, j'ai rarement eu autant de contacts avec les numéros uns."

Solidaires a envoyé mardi une lettre à toutes les organisations syndicales pour les inviter à "échanger". Et "dépasser les divisions" qui "n'incitent pas le gouvernement à ralentir ou changer de pied", souligne Éric Beynel. "Nous devons nous poser une question: est-ce que les divisions profitent au monde du travail?", ajoute-t-il. "Il faut analyser ce qu'on a pu faire au cours des deux dernières années et arrêter une stratégie commune", invite-t-il. Les "gilets jaunes" en tête: "si on continue dans la division, il y aura encore des mouvements à côté des syndicats".

Jean-Christophe Catalon