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Ces propositions chocs pour réduire les délais d'attente chez l'ophtalmologue

Les ophtalmologues et les autres professionnels de la filière visuelle
sont très inégalement répartis sur le territoire, selon la Cour des comptes.

Les ophtalmologues et les autres professionnels de la filière visuelle sont très inégalement répartis sur le territoire, selon la Cour des comptes. - Omar Haj Kadour-AFP

Pour pallier la pénurie d'ophtalmologues libéraux, la Cour des comptes propose de confier aux orthoptistes et aux opticiens: les examens de la vue, les consultations de premier recours et les prescriptions en première intention (au-delà du renouvellement) pour les verres correcteurs.

C'est un petit big bang dans le parcours des soins des yeux des Français que propose la Cour des comptes. Dans le rapport 2018 sur la sécurité sociale, les soins visuels sont l'objet de toute l'attention des auteurs qui préconisent un parcours de soins à réorganiser en profondeur.

"Contrairement à ce que l’on observe dans d’autres pays, les ophtalmologues constituent en France le premier recours, et les autres professions de la filière des soins visuels – orthoptistes et opticiens – y ont un rôle limité. Du fait de l’inégale répartition sur le territoire des ophtalmologues et de leurs pratiques de dépassements d’honoraires, les besoins de la population sont inégalement couverts", justifie le document à l'appui de sa volonté de bousculer les pratiques actuelles.

Une formation de niveau master pour les orthoptistes?

Partant de ce constat de l'accès dégradé des patients aux soins visuels sous l’effet de la démographie et de la mauvaise répartition des ophtalmologues sur le territoire, la Cour des comptes suggère deux mesures structurantes.

1. Rôle accru pour les orthoptistes dans les bilans visuels. Son rapport préconise que "les bilans visuels et les consultations simples de premier recours soient confiés aux orthoptistes, qu’ils exercent dans un cabinet d’ophtalmologue en tant que salarié ou dans leur propre cabinet en libéral. "Pour faire passer la pilule de cette mesure auprès des ophtalmologistes, jaloux de leur prérogative et de leur monopole actuel, cette extension du champ de compétences des orthoptistes serait réservée à ceux qui entreprendraient une formation complémentaire de niveau master (bac + 5). Aujourd'hui, un bilan visuel ne peut être réalisé par les orthoptistes que dans une structure où est présent un médecin et non dans leur propre cabinet libéral.

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- © Entre 2005 et 2014, le revenu moyen d’activité des ophtalmologues a augmenté de 1,9 % par an en euros constants, contre 0,9 % pour les médecins spécialistes pris dans leur ensemble.

2. Les opticiens habilités à prescrire des verres correcteurs. "Le rôle des opticiens-lunetiers devrait être élargi à la prescription en première intention des équipements d’optique médicale", préconise la Cour des comptes. Actuellement, ces professionnels sont habilités à renouveler et à adapter les ordonnances de verres correcteurs et de lentilles de contact pendant un certain temps, en fonction de l’âge du patient (un an pour les moins 16 ans). Mais, l’ophtalmologue conserve la faculté de s’opposer au renouvellement et à l’adaptation par l’opticien-lunetier ou d’en limiter la durée, par la voie d’une mention sur l’ordonnance.

Un opticien ne pourra prescrire et vendre au même patient

Ce rôle plus important des opticiens dans le parcours de soin serait conditionné au suivi "d'une formation complémentaire de niveau master leur permettant d’acquérir des compétences en optométrie et en diagnostic clinique des troubles de la réfraction". Afin de prévenir des conflits d’intérêt, un patient ne pourrait acquérir un équipement d’optique dans le point de vente où il lui a été prescrit, préconise le rapport.

Pour éviter par avance une levée de bouclier des ophtalmologues, la Cour des compte suggère que ces extensions des champs de compétences des orthoptistes et des opticiens soient limitées à la prise en charge de situations simples. "En cas de présomption de situations excédant leur champ de compétences ainsi élargi, ils devraient obligatoirement adresser les patients concernés à un ophtalmologue", souligne le rapport.

Frédéric Bergé