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Ces artistes anglais ont désendetté leur ville avec de faux billets

Hilary Powell et Daniel Edelstyn, époux et artistes britanniques qui vivent dans une ville extrêmement pauvre de la banlieue de Londres, ont racheté la dette de leur voisinage grâce à de faux billets. Une pratique tout à fait légale.

Walthamstow, dans la grande banlieue de Londres, est tristement connue pour être l’une des villes les plus pauvres de Grande-Bretagne. Notamment parce que ses habitants restaient coincés dans une spirale de surendettement, avec des taux de crédit qui augmentent et qui serrent encore plus le nœud autour de leur cou. Cette situation scandalisait Hilary Powell et Daniel Edelstyn, eux-mêmes résidents à Walthamstow. Et plus globalement, ils s'insurgeaient du consumérisme prôné par nos sociétés et de la malhonnêteté de certains organismes de crédit.

Ainsi, ils se demandaient depuis des années comment utiliser leur art pour aider leurs voisins. L'été dernier, ils entendent parler du mouvement "la grève de la dette", apparu aux Etats-Unis après la crise des subprimes. Ce collectif rachetait les dettes des étudiants auprès des organismes de crédit, pour ensuite les annuler, et permettre aux jeunes Américains de commencer leur vie professionnelle dans le vert.

Cette initiative va donner au couple l’idée du projet "Bank Job": ils vont fabriquer des faux billets, les vendre comme des objets d'art, puis utiliser les recettes pour racheter la dette des habitants de leur ville.

Hilary et Daniel s’installent dans une ancienne manufacture de billets de la ville. Comme elle se situe dans la rue Hoe, ils appellent leur nouvel atelier "Hoe Street Central Bank". En raccourci, HSBC. Un pied-de-nez à la grande banque qui a, comme nombre de ses consoeurs, été condamnée à près de 800 millions de dollars d'amende pour son rôle dans la crise des subprimes.

Les deux artistes utilisent des chutes de papiers à monnaie, des tampons spéciaux, pour produire de la fausse monnaie de manière très professionnelle. Aucun risque néanmoins de confondre avec de vraies livres sterling. Notamment parce qu'à la place du visage de la reine Elizabeth, les artistes ont mis à l’honneur des figures locales du monde associatif et de l’encadrement des jeunes. Comme la directrice de l’école primaire, des animateurs de projets pour les jeunes, des gérants de soupe populaire.

BankJob - Hilary Powell - Daniel Edelstyn
BankJob - Hilary Powell - Daniel Edelstyn © BankJob - Hilary Powell - Daniel Edelstyn

Le succès de la vente de ces faux billets a été énorme. Des foules se sont pressées l’été dernier à l'atelier, assister au processus de création de Bank Job. Des responsables de musées ont également fait le déplacement, et acheté des faux billets pour les exposer au musée de la Banque centrale anglaise ou au prestigieux Victoria & Albert Museum.

Hilary et Daniel voulaient racheter 1 million de livres sterling de dettes de leur voisinage. Mais ils n’avaient pas besoin de gagner autant d’argent pour le faire, puisque racheter la dette d’un ménage surendetté ne coûte presque rien. Les banques considèrent en effet que ce sont des créances "douteuses", qui risquent de ne pas être remboursées, donc elles s’en débarrassent en les vendant à des organismes de recouvrement pour une bouchée de pain. En moyenne, les spécialistes estiment que si la dette vaut 20 euros, la banque la revend à 1 euro. Notre duo d’artistes a récolté quelque 40.000 livres avec ses faux billets. Ce qui leur a permis, affirment-ils, de racheter toute la dette de leur ville, et même de reverser un surplus aux associations locales.

BankJob - Hilary Powell - Daniel Edelstyn
BankJob - Hilary Powell - Daniel Edelstyn © BankJob - Hilary Powell - Daniel Edelstyn
Nina Godart
https://twitter.com/ninagodart Nina Godart Journaliste BFM Éco