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"Sanctuariser" des périodes sans grève: "Il y aura une réplique très forte" mettent en garde les syndicats

"Sanctuariser des périodes sans grève". C'est l'objet d'une proposition de loin LR/UDI. Pour la ministre des Relations avec le Parlement, c'est une demande légitime. Pour les syndicats, une "réplique très forte" serait à prévoir si ce texte était adopté.

Les petites phrases qui déclenchent de grandes colères. Celle de la ministre des Relations avec le Parlement, Marie Lebec en fait partie.

"Il y a des moments où on peut estimer qu'il faut sanctuariser ces périodes", a déclaré sur Sud-Radio la ministre.

Selon Marie Lebec, si la "protection du droit de grève est essentielle", elle propose de "s'interroger quand on a une mission de service public". Elle commente ainsi une demande des LR et des Centristes en reconnaissant ne pas encore avoir lu la proposition de loi.

"Est-ce que les modalités doivent forcément passer par la loi? Est-ce que ça peut faire l'objet d'un accord ou autre avec les représentants syndicaux? Je crois que toutes les options sont ouvertes", estime la ministre.

Il faut "sanctuariser le droit de grève"

En attendant ce débat, les réactions des syndicats ont été rapides et vives. Pour Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, s'il faut sanctuariser quelques chose, "c’est le droit de grève, droit fondamental inscrit dans la constitution et le droit international".

"En cette période de commémorations, j’invite le gouvernement à se pencher sur l’Histoire de l’interdiction du droit de grève", propose la patronne de la CGT en publiant sur X un lien vers Vie Publique, un site rattaché aux services du Premier ministre retraçant ce droit de 1791 à nos jours.

Pour Didier Mathis, secrétaire général Unsa Ferroviaire, interrogé par BFM Business, le gouvernement "ouvre une boite de Pandore". "Le terme 'sacraliser' pour détruire un droit à valeur constitutionnelle est un peu fort", a déclaré à BFM Business Didier Mathis, en ajoutant que "Marie Lebec réagit à chaud, ce qui est très mauvais pour le dialogue social".

"Si on touche au droit de grève, il y aura une réplique très forte des cheminotes et des cheminots", prévient le secrétaire général de l'Unsa qui menace ainsi d'une grève de grande ampleur.

Didier Mathis s'interroge aussi sur ce qu'il juge être un paradoxe.

"Le gouvernement reconnaît que nous sommes une société de droit privée, mais nous considère comme des fonctionnaires en brandissant notre mission de service public. Il faut savoir", réagit Didier Mathis.

Par ailleurs, il rappelle que lorsque les agriculteurs ont bloqué les routes restreignant la libre circulation des usagers, "personne n'a proposé d'interdire ces méthodes qui bloquent bien plus de monde qu'une grève à la SNCF".

La grève en Allemagne et en Italie

Le week-end dernier, au beau milieu des vacances scolaires, trois quarts des contrôleurs ont cessé le travail conduisant la SNCF a annuler de nombreux trains. Cette action a provoqué la colère de Gérard Larcher, président de la chambre haute.

"La grève doit être l'arme ultime", or elle est "devenue un instrument de la négociation", a réagi Gérad Larcher.

Mercredi, le sénateur UDI Didier Marseille a déposé un texte proposant d'octroyer au gouvernement un capital annuel de 60 jours d'interdiction de grève, réparti par décret dans une limite de quinze jours par période d'interdiction. Cette proposition s'inspire des règlements appliqués par plusieurs pays européens.

En Allemagne, la loi reconnaît aux salariés du privé le droit de grève. Par contre, les fonctionnaires, qui jouissent d'une garantie à vie de l'emploi, n'y ont pas accès. Mais depuis 1994, les nouveaux cheminots embauchés au sein de la Deutsche Bahn, la compagnie ferroviaire publique allemande, relèvent du droit privé et peuvent donc débrayer.

En Italie, impossible pour le service public, dont le transport ferroviaire, de faire grève pendant certaines périodes de l'année, liées notamment aux vacances scolaires et aux fêtes chrétiennes. Ainsi, du 19 décembre au 7 janvier, à Pâques, à la Toussaint, mais encore lors des premiers jours de départs en vacances l'été, fin juin et début juillet, les cheminots ne peuvent pas se mettre en grève. Cette loi, qui date de 1990, s'applique aussi aux heures de pointe, entre 7h et 10h le matin et 18h et 21h le soir, pour les employés de sociétés de transports locaux.

Pascal Samama
https://twitter.com/PascalSamama Pascal Samama Journaliste BFM Éco