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Economie et Social

Pourquoi la consommation des ménages reste molle malgré la hausse du pouvoir d'achat

D'après l'Insee, le pouvoir d'achat des ménages a augmenté de 0,9% au premier trimestre. Mais dans le même temps, leur consommation n'a crû que de 0,4% et les sommes épargnées ne cessent de grimper.

Du jamais vu depuis plus de dix ans. Après une hausse de 1,1% au quatrième trimestre 2018, le pouvoir d’achat des Français a encore bondi de 0,9% sur les trois premiers mois de l’année. Cette forte hausse s’explique notamment par la résistance de la croissance française, moins exposée aux turbulences du commerce international, et par les mesures d’urgence économique et sociale accordées par Emmanuel Macron pour répondre à la crise des gilets jaunes.

"La masse salariale reçue par les ménages accélère nettement (+1,1% après +0,6%) du fait de primes exceptionnelles versées par des certaines entreprises à la suite de l'instauration d'une prime de fin d'année défiscalisée", a relevé l'Insee mercredi.

La consommation en manque de vigueur

Dans le même temps, le gouvernement a annoncé fin 2018 la hausse de la prime d’activité de 90 euros, la défiscalisation des heures supplémentaires, la suppression de la taxe carbone et l’annulation de la hausse de CSG pour les retraités touchant moins de 2000 euros par mois. Autant d’éléments qui vont renforcer le pouvoir d’achat des ménages sur l'année 2019.

Pourtant, ce gain ne s’est pas traduit par une forte hausse de la consommation puisque celle-ci n’a augmenté que de 0,4% au premier trimestre selon l’Insee qui souligne que la "hausse du pouvoir d’achat ne s’est que partiellement répercutée sur la consommation des ménages". Ces derniers ont visiblement préféré mettre une partie de leurs gains de côté, les volumes d’épargne ayant augmenté de 3,7% au premier trimestre. L'exemple le plus frappant est le niveau des dépôts sur les livrets A et LDDS bien supérieur à celui des retraits. Le solde moyen par livret a progressé de 220 euros sur les quatre premiers mois de l'année. En tout logique, le taux d’épargne est lui aussi en augmentation, à 15,3% après 15,2% au dernier trimestre 2018 et 14,3% trois mois plus tôt.

Des gains programmés sur l'année

Alors comment expliquer que les Français continuent de mettre autant de côté, malgré d'importants gains de pouvoir d’achat? D’abord, on peut penser que les ménages ont repoussé leurs achats en raison des manifestations des gilets jaunes le samedi et qu'ils restent sur leur garde face à un climat social perturbé.

Ensuite, il est possible que la hausse de pouvoir d’achat ne soit pas encore perceptible par tous les Français qui en ont bénéficié. Et pour cause, si certains gains majeurs ont été immédiats pour le portefeuille d’une partie des ménages (prime défiscalisée, suppression de la taxe carbone), d’autres, moins spectaculaires, sont suivis d’effets plus progressifs et programmés dans le temps. C’est par exemple le cas de la prime d’activité qui a été augmenté de 90 euros par mois. Par ailleurs, le remboursement de la CSG aux retraités concernés n’est intervenu qu’en mai.

Le moral des ménages en hausse

Dans ces conditions, certains ménages n’ont probablement pas encore perçu un gain de pouvoir d’achat majeur. Mais le moral des ménages reparti à la hausse en mai et revenu à son niveau d’il y a un an laisse penser que la consommation reprendra de la vigueur au second semestre 2019.

Une note de la Commission européenne sur la France publiée au début de mois de mai estime même que "la consommation des ménages devrait accélérer progressivement au-delà de 2019 grâce à l’augmentation des salaires nominaux qui devraient booster le revenu disponible et au ralentissement de l’inflation".

D’après l’OFCE, le gain moyen de pouvoir d’achat des ménages français sera de 850 euros en 2019. Sur cette somme, 440 euros proviendraient directement des mesures décidées par Emmanuel Macron pour répondre à la colère des gilets jaunes.

Paul Louis