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Les questions que pose l'éventuelle suppression de la redevance TV

Le ministre de l'Action et des Comptes publics Gérald Darmanin a proposé ce vendredi du supprimer la redevance télévisuelle. En 2018, cette contribution imposée aux détenteurs de téléviseurs a rapporté près de 3,9 milliards d'euros aux groupes audiovisuels publics.

Favorable a un allègement de la fiscalité à l'issue du grand débat, Gérald Darmanin a suggéré ce vendredi matin sur notre antenne de supprimer la redevance audiovisuelle, impôt payé par les foyers possédant un téléviseur.

Outre le gain de pouvoir d'achat que cela offrirait aux ménages, la suppression de la redevance aurait l'avantage de régler le problème à venir de sa perception par l'État. Et pour cause, la contribution pour l'audiovisuel public se paie via la taxe d'habitation... qui doit disparaître en 2022. S'il souhaitait maintenir cette redevance, le fisc n'aurait d'autre choix que de trouver un nouveau moyen de prélèvement. 

Quel manque à gagner?

En 2018, le montant de la redevance a été fixé à 139 euros par foyer. Selon le projet de loi finances 2018, elle permet de distribuer 3,865 milliards d'euros (dont 600 millions de dégrèvements compensés par l'État) aux groupes audiovisuels. Dans le détail, 27,7 millions de foyers déclarent posséder un téléviseur mais près de 5 millions d'entre eux sont exonérés de redevance en raison de la faiblesse de leurs revenus. La collecte se limite donc à 3,2 milliards d'euros. Mais l'Etat compense financièrement les exonérations qu'il accorde.

Ces 3,865 milliards d’euros permettent de financer une grande partie des programmes et des salaires des groupes audiovisuels. France Télévisions touche ainsi les deux tiers de cette manne, Radio France 15% , Arte près de 7,5%, France Médias Monde près de 7%, l'Institut national de l'audiovisuel et TV5 Monde 2% chacun.

Si la redevance était supprimée, les chaînes de service public continueraient à être financées mais plus uniquement par ceux qui disposent d'un téléviseur. Tous ceux qui paient des impôts seraient mis à contribution. Cela permettrait de régler le problème de ceux qui regardent la télé avec leur PC sans payer de redevance. Mais cela nécessiterait de trouver 3,2 milliards d'euros de recettes en plus ou bien de réduire d'autant d’autres dépenses.

Répartition de la redevance
Répartition de la redevance © -

Et chez nos voisins? 

Les grands pays européens dotés d'un vrai service public de l'audiovisuel s'appuient tous sur un système de contribution financière obligatoire. En Allemagne par exemple, tous les foyers, qu'ils disposent ou non d'une télévision ou d'un ordinateur, doivent payer une redevance. Et son montant est plus élevé qu'en France: 210 euros. Mais cette contribution est directement réglé aux chaînes de service public sans passer par les services de l'État. Le paiement se fait par virement, tous les mois.

Le système britannique est proche de celui qui prévaut outre-Rhin. À la différence que seules les personnes possédant une télévision, un ordinateur ou un smartphone sont soumis à la redevance. En 2018, son montant était fixé à 150,50 livres, soit environ 175 euros. Là encore, la perception est assurée directement par le service public de l'audiovisuel et non par le fisc. L'an passé, les frais générés par cette collecte (salaires, frais postaux, etc...) ont à peine dépassé la centaine de millions de livres, soit 2,6% de la somme récupérée (3,83 milliards de livres).

Comme en France, l'Italie ne fait payer leur contribution à l'audiovisuel public qu'aux foyers déclarant un téléviseur. En revanche, ce n'est pas le fisc qui se charge de la collecte. La redevance est directement payée via la facture d'électricité. Une méthode efficace pour identifier facilement tous les foyers potentiellement concernés par le paiement de cette contribution.

Pierre Kupferman