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Emissions de gaz à effet de serre: la France proche de ses objectifs en 2030?

Les émissions de gaz à effet de serre devraient atteindre

Les émissions de gaz à effet de serre devraient atteindre - STR - AFP

En retenant une hypothèse de croissance de 0,9% par an à partir de 2023 et en tenant compte des mesures "anti-émissions" de la loi Climat, du plan de relance ou du plan d'investissement, l'institut Rexecode estime que les émissions de gaz à effet de serre dépasseraient d'un peu plus de 3% l'objectif fixé en 2030.

Inscrit dans la loi "Climat et Résilience", l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre à hauteur de 40% d’ici 2030 peut-il encore être atteint? Probablement pas, estime un rapport de Rexecode, même si la France devrait tout de même s’en rapprocher fortement.

Sur la base d’une croissance économique de 6,3% en 2021, de 3,5% en 2022 et d'un retour à une croissance tendancielle de 0,9% par an en moyenne à partir de 2023, l’institut prévoit que les émissions françaises passeront de 406 millions de tonnes équivalent CO2 en 2021 à 342 millions de tonnes en 2030, soit un peu plus de 10% de plus que l’objectif de 310 millions de tonnes à cette date.

Mesures "anti-émissions"

Mais pour mieux appréhender l’évolution des émissions de gaz à effet de serre, il est indispensable de prendre en compte l’impact des dernières mesures annoncées récemment dans le cadre du projet de loi de finances 2022, du plan de relance, de la loi "Climat et Résilience" et du plan d’investissement France 2030. En reprenant également les hypothèses de croissance évoquées plus haut, il en résulte une baisse plus prononcée des émissions qui atteindraient 321 millions de tonnes équivalent CO2 en 2030. La France dépasserait alors de 3,4% "seulement" l’objectif visé.

Cela suppose néanmoins que les crédits accordés en faveur de la transition écologique dans le cadre du plan de relance (aide à la conversion du parc automobile, soutien aux opérations de rénovation énergétique des logements, décarbonations de l’industrie, plan hydrogène, etc.) soient maintenus au-delà de 2022 et même tout au long de la décennie.

Si tel était le cas, cela représenterait une dépense supplémentaire de 5,2 milliards d’euros par an entre 2022 et 2030 pour une baisse des émissions de 11,6 millions de tonnes équivalent CO2.

Il y a ensuite les effets de la "loi Climat et Résilience" qui devraient permettre de réduire les émissions de 4,1 millions de tonnes en 2030. Parmi les mesures contenues dans le texte figurent notamment l’obligation d’installer des dispositifs de production d’énergie renouvelable ou des toits végétalisés sur certains bâtiments, l’interdiction de la vente des véhicules particuliers neufs les plus émetteurs, l’obligation d’instaurer des zones à faible émissions mais aussi d’autres mesures sur la mobilité dans les grandes métropoles, les vols aériens et l’artificialisation des sols. Le coût, essentiellement supporté par le secteur privé, devrait être de 40 milliards d’euros entre 2022 et 2030.

Sur le plan d’investissement France 2030, Rexecode identifie cinq mesures susceptibles "d’avoir des retombées en termes de réduction des émissions". Elles concernent des développements industriels et technologiques dans le nucléaire, l’hydrogène, la décarbonation de l’industrie, les véhicules électriques et l’avion bas carbone. Leur concrétisation représentera un investissement de 12 milliards d’euros, soit 1,3 milliard d’euros par an d’ici 2030, et une diminution des émissions évaluée à 5,6 millions de tonnes.

Comment sortir du dilemme entre croissance et émissions?

Dans ses prévisions, le gouvernement se montre plus optimiste que Rexecode en tablant sur une croissance tendancielle de 1,4% à partir de 2023 (contre 0,9% par an). Si un tel scénario serait positif pour le pouvoir d’achat, l’emploi ou les finances publiques, la France s’éloignerait de son objectif de réduction d’émissions de gaz à effet de serre.

Toujours en tenant compte des mesures du plan de relance, du Budget 2022, du plan d’investissement et de la loi Climat, les émissions de gaz à effet de serre s’établiraient à 333 millions de tonnes de CO2 en 2030 avec l’hypothèse de croissance du gouvernement. C’est 7,4% de plus que l’objectif de 310 millions de tonnes.

Et pour cause, plus de croissance signifie plus d’émissions de gaz à effet de serre. Pour rendre la croissance davantage compatible avec la lutte contre la pollution, Rexecode suggère donc, comme dans ses prévisions, de reconduire jusqu’en 2030 les crédits budgétaires "anti-émissions" du plan de relance, mais aussi de "centrer l’effort budgétaire sur une politique d’offre pour le climat" et de "développer des alternatives aux crédits publics par des mesures d’orientation de l’épargne privée vers l’investissement productif".

"Rexecode rappelle ainsi à cet égard sa proposition de créer des fonds à capital garanti afin d’attirer l’épargne vers l’investissement et l’innovation nécessaires pour stimuler la croissance tout en respectant les objectifs climatiques", conclut l’institut.
https://twitter.com/paul_louis_ Paul Louis Journaliste BFM Eco