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Effondrement du pont de Baltimore: existe-t-il un risque similaire en France?

Un porte-conteneurs a dévié de son cap et heurté une pile du pont Francis Scott Key, faisant s'écrouler plusieurs des arches de l'ouvrage dans le port. Un tel accident est-il possible en France?

Rarissime et spectaculaire. Le pont autoroutier Francis Scott Key à Baltimore, sur la côte Est des États-Unis, s'est effondré comme un château de cartes après avoir été percuté par un porte-conteneurs victime d'une avarie technique le rendant impossible à manoeuvrer.

Pour les experts, cet effondrement n'est pas une surprise compte tenu du choc observé, même à très faible allure. "C'est tout à fait normal, le porte-conteneurs faisait 300 mètres de long, 110.000 tonnes, c'est beaucoup plus lourd que le pont lui même. Le pont ne pouvait pas résister à un tel choc sur une de ses piles, sa chute était inéluctable", souligne sur BFMTV, Michel Virlogeux, ingénieur en pont et chaussées, professeur à l'École nationale des Ponts et Chaussées.

Baltimore : l'incroyable effondrement d'un pont – 26/03
Baltimore : l'incroyable effondrement d'un pont – 26/03
17:31

Risques multipliés en quelques décennies

La question est de savoir si la présence de ce pont au-dessus d'un axe si important de transit maritime de porte-containeurs était raisonnable. "On a besoin de passer d'une rive à l'autre", résume l'expert.

"Le pont date des années 1970, à l'époque on n'était pas aussi conscient qu'aujourd'hui des risques que représentent un choc de bateau sur un ouvrage. La distance entre les piles principales (la portée, NDLR) était assez courte, aujourd'hui on aurait une portée beaucoup plus grande."

D'autant plus que les facteurs de risques se sont multipliés ces dernières années. "Le trafic maritime a considérablement augmenté, 95% des marchandises dans le monde transitent par voie maritime et les bateaux sont de plus en plus grands, de plus en plus hauts, certains sont aussi hauts qu'un immeuble de 10 étages", explique Gérard Feldzer, consultant transports de BFMTV.

Par exemple, en 1980, le cargo Summit Venture percute la pile du Sunshine Skyway Bridge, en Floride. Bilan: 35 morts.

Des précédents sans gravité en France

Pour autant, ce risque de choc est depuis quelques décennies pris en compte dans la conception des ponts enjambant une zone de transit maritime ou au voisinage d’embouchures, notamment en France.

"Quand on a conçu le pont de Normandie dans les années 80, on a tenu compte du risque d'accident de bateau et c'est la raison pour laquelle il n'y a pas de pile dans la Seine. La conception des ouvrages tient compte de ces risques même si le risque zéro n'existe pas", souligne Michel Virlogeux.

Un avis partagé par Jacques Combault, également de l’École des Ponts et Chaussées. "Nous avons quelques grands ponts en milieu aquatique où passent des porte-conteneurs, comme le pont de Normandie, de Bretonne ou de Tancarville, mais leurs piles ont toutes été implantées sur les berges des fleuves. Donc le risque qu’un navire entre en collision avec ces appuis est écarté", assure-t-il auprès de Libération.

Pour autant, deux accidents de moindre importance ont été observés avec des bateaux plus petits, percutant des piliers de ponts sur le Rhône.

En 2019, l'Aramis percutait le pilier d’un pont routier en béton sur un canal de dérivation à Donzère-Mondragon (Vaucluse) sans faire de dégâts majeurs. En 2021, quasiment au même endroit, l'André-Michel 1 heurte la pile d'un pont. Si le navire est endommagé, les dégâts sur le pont sont là encore mineurs.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business