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Des commerçants parisiens réveillent leur quartier avec des nounours géants

Depuis trois mois, des énormes ours en peluche ont colonisé le quartier des Gobelins. Cette invasion qui part d'une initiative tout sauf commerciale a réchauffé le cœur des habitants et fait se presser des chasseurs de nounours dans le 13ème.

Si vous vivez dans le 13e à Paris, vous n’avez pas pu les rater: depuis trois mois, des nounours géants ont envahi le quartier des Gobelins. Des dizaines de plantigrades en mousse d’1,40 mètre pour presque 5 kilos paradent aux terrasses des cafés, dans la vitrine du caviste, au comptoir du pharmacien, aux fenêtres des immeubles, accrochés au panneau du métro des Gobelins.

Depuis le début du mois d’octobre, tout le 13e conjecturait. D'où viennent-ils? Que veulent-ils? Quels sont leurs réseaux? Certains habitants du quartier croyaient savoir qu’il s’agissait d’une opération pour le retour de l’ours dans les Pyrénées, ou d’une nouvelle décoration de Noël.

Les nounours des Gobelins
Les nounours des Gobelins © Les nounours des Gobelins

Sur la page Facebook "Les nounours des Gobelins", qui compte déjà près de 18.000 abonnés, on peut lire que "chassés par la cupidité des hommes qui ont détruit leur habitat sur les contreforts de l'Himalaya, ils sont arrivés un beau matin au carrefour de Gobelins". En réalité, tout a commencé chez le libraire du quartier, Philippe. Pour faire sourire les flâneurs, il avait installé trois gros nounours dans sa librairie du 25, avenue des Gobelins.

Michel, son voisin le pharmacien, raconte qu’il les trouvait mignons, alors Philippe lui en a prêté un. Puis le café d’en face a voulu le sien, et ainsi de suite, jusqu’à ce que tous les commerces de l’avenue des Gobelins aient le leur. Et puis les habitants du quartier en ont voulu aussi. Même les policiers en ont récupéré deux pour les former à la sécurité. Ils les ont baptisés Starsky et Hutch.

Les nounours des Gobelins
Les nounours des Gobelins © Les nounours des Gobelins

C’est là l’une des seules conditions pour se faire prêter gratuitement un ours que Philippe achète avec ses propres deniers: lui faire faire des activités, comme aller au travail avec lui, lui faire préparer les repas. L’autre condition, c’est de prendre des photos qui vont alimenter les comptes Facebook et Instagram des Nounours, un peu à la façon du nain de jardin globe-trotter d’Amélie Poulain, dont plusieurs milliers de personnes suivent désormais les aventures trépidantes.

"Un Gobelinien a même emmené un ours avec lui à New York", rigole Michel, le pharmacien, devenu complice de Philippe dans cette opération qui a pris une ampleur qu’ils n’auraient jamais imaginée. "Il a voyagé avec les hôtesses et a fini avec des traces de rouge à lèvres", confie-t-il.

Les nounours des Gobelins
Les nounours des Gobelins © Les nounours des Gobelins

Aucun but commercial

Cette histoire, insiste le pharmacien, n’a aucun but commercial. Philippe et ses compères refusent de dire où ils achètent les nounours ou combien ils coûtent pour ne pas faire de publicité à un distributeur. Ils ont déposé à l’Inpi la marque "nounours des Gobelins" pour éviter son utilisation commerciale. Ils ont bataillé avec une agence de photos qui vendaient des clichés avec les grosses peluches pour 14 euros pièce.

Leur but initial: juste faire sourire Paris, qui en a besoin après avoir "beaucoup pleuré ces dernières années", explique le pharmacien. Et rendre le quartier plus jovial. Philippe raconte ainsi au Parisien que, depuis 25 ans qu’il tenait sa librairie aux Gobelins, "il y avait encore des gens à qui je n’avais jamais parlé. Aujourd’hui, ils m’appellent par mon prénom".

Les nounours des Gobelins
Les nounours des Gobelins © Les nounours des Gobelins

Un mariage de nounours

Autre effet inattendu: le débarquement en masse de touristes pour un "safari nounours" dans le 13ème arrondissement, venu "de toute la France, et même du Canada, d’Écosse ou d’Italie", s’enthousiasme Jérôme Coumet, le maire de l’arrondissement. Alors que jusqu’à présent, le quartier dépourvu de musée et de parc attirait peu, en dépit des initiatives de la municipalité, comme ouvrir ses rues aux street-artistes pour en faire un musée à ciel ouvert.

Le maire est tellement ravi, et tombé comme ses administrés sous le charme des nounours géants, qu’il va en marier deux, samedi 12 janvier à l’hôtel de ville. Ensuite, les nounours feront leurs adieux provisoires au quartier, "le temps d’hiberner", explique Michel. Mais il promet qu'ils reviendront au printemps pour de nouvelles aventures.

Nina Godart