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Formation: Muriel Pénicaud demande au gouvernement de ne pas détruire le CPF

L'ancienne ministre du travail demande au gouvernement de ne pas publier le décret qui risque de dénaturer le CPF en fermant l'accès aux formations aux catégories populaires, aux femmes et aux séniors.

CPF, la parole est à la défense avec pour avocate est Muriel Pénicaud, ex-ministre du Travail qui a créé le compte personnel de formation (CPF). Mercredi, sur BFM Business, elle a réagi sur l'amendement qui vise à dénaturer ce programme en demandant aux salariés de participer financièrement à leur formation. Elle demande de ne pas publier le décret qui conduira à "assécher" le CPF pour n'en faire bénéficier que les cadres.

"Si le gouvernement ne revient pas sur sa décision, le CPF va disparaitre pour ceux qui en ont le plus besoin, c'est-à-dire les catégories populaires. Aujourd'hui, 80% des bénéficiaires sont des ouvriers et des employés, la moitié sont des femmes et 20% sont des plus de 50 ans", a déclaré Muriel Pénicaud en rappelant que "ce sont les trois catégories" qui avant sa création "n'accédaient pas à la formation".

Améliorer l'employabilité

Parmi les bénéficiaires les demandeurs d'emplois sont les utilisateurs les plus nombreux avec plus de 300.000 personnes, suivis des employés (200.000 personnes formées). Parmi les formations les plus demandées, le transport/logistique (permis de conduire, manutention ou magasinage), les langues étrangères, l'orientation (bilans de compétence ou insertion) et l'informatique.

L'ancienne ministre a donc vivement répliqué aux critiques de ceux qui affirment que le CPF a surtout permis aux salariés à se faire plaisir en se faisant financer des formations peu indispensables, comme le permis de conduire ou l'apprentissage des langues.

"Ceux qui disent ça ne sont pas allés sur le terrain dans les entreprises", lance-t-elle en soulignant "le nombre d'emplois qu'on ne peut pas pourvoir parce que les gens n'ont pas le permis. L'entreprise ne va pas payer le permis B".

Pour Muriel Pénicaud, l'accès au permis facilite l'accès aux emplois, tout comme les langues.

"On est très bon en tourisme et restauration, mais on serait meilleur si on était bon en langue".

Réduire la voilure

Au lieu de réviser la demande de formation, Muriel Pénicaud conseille de revoir l'offre "où il y a des choses à dire". Mais selon elle, l'amendement est surtout "une mesure prise dans la précipitation et sans concertation" et dévoilant qu'elle a "essayé de convaincre" le gouvernement, notamment Elisabeth Borne, Première ministre qui a également été ministre du Travail et du Transport.

"J'appelle à ne pas publier ce décret, mais aussi les entreprises à se mobiliser. La formation leur donne un vivier de nouvelles qualifications et nous ne sommes pas bons là-dessus. La France est à la 25e place sur les niveaux de compétences".

Jusqu'à lors, le CPF est financé par l'Etat grâce à une taxe sur les entreprises. Il est donc gratuit pour les utilisateurs. Mais la forte demande et certainement les abus des démarcheurs par téléphone, SMS ou mails, ont incité le gouvernement à réduire la voilure.

L'amendement "propose d'instaurer une participation du titulaire, quel que soit le montant de droits disponible sur son compte". Près d'un tiers de la formation devra être payée par l'utilisateur. Le budget du CPF passerait à 2,37 milliards d'euros, soit une baisse de 385 millions sous le seul effet de ces mesures.

Depuis sa création, le nombre de formations a été multiplié par 4 passant de 517.000 en 2019 à 2.1 millions en 2021. En près de trois ans cinq millions de personnes ont été formées pour un montant de 1400 euros en moyenne. Le coût total du programme s'élève à sept milliards d'euros, selon la Caisse des Dépôts qui gère le dispositif.

Pascal Samama
https://twitter.com/PascalSamama Pascal Samama Journaliste BFM Éco