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Ecologie : Emmanuel Macron s'engage dans la « bataille du réel »

Emmanuel Macron répond aux "gilets jaunes"

Emmanuel Macron répond aux "gilets jaunes" - Ian LANGSDON / POOL / AFP

Emmanuel Macron ne change pas de cap. Il ne renonce pas à la hausse de la fiscalité écologique. Mais en contrepartie, il promet plus d’accompagnement pour les Français qui subissent le prix de la transition écologique.

Ce sera tout l’enjeu de la concertation qu’il lance un peu partout en France. Edouard Philippe peaufine cette semaine les modalités exactes de ces « mini Grenelle », mais l’idée est de réunir élus locaux, syndicats, entreprises, et représentants des gilets jaunes. Ces discussions seront l’occasion pour l’exécutif de mieux faire connaitre, ou même revoir, les mesures déjà prises autour du chèque énergie, ou des primes et bonus automobiles. Ces conférences permettront aussi de faire émerger de nouvelles idées…

Edouard Philippe en a déjà évoqués plusieurs hier à l’Assemblée : des prêts à taux zéro, des primes, des prises en charges de diagnostiques énergétiques, des leasings sur les chaudières… Dans l'entourage d'Emmanuel Macron, on nous dit qu'un crédit d'impôt de 100 euros par fenêtre remplacée serait finalement une bonne idée. Les arbitrages seront donc pris dans trois mois… L’objectif de cette démarche est de rendre tangible auprès du plus grand nombre, des mesures qui jusqu’ici ont souvent été jugées hors sol. Le chef de l'Etat a fait un mea culpa hier, jugeant beaucoup de mesures trop technocratiques, admettant même qu'il ne comprenait pas le chèque énergie. Emmanuel Macron s'est donc engagé dans une bataille du réel, avec une stratégie qui vise à travers une multitude de mesures très concrètes, de répondre au mieux aux attentes du terrain. 

La taxe carbone finalement corrélée au prix du baril

A la surprise générale, Emmanuel Macron a annoncé qu’il allait finalement adapter la fiscalité des carburants aux fluctuations des prix. - Mais « rien à voir avec la TIPP flottante », nous assure Matignon. Ce mécanisme mis en place sous Lionel Jospin de 2000 à 2002 visait à se caler au jour le jour au prix du baril, avec des révisions de taxes à la hausse comme à la baisse. A l’arrivée, ce mécanisme s’était avéré inefficace, avec peu d’effets sur les prix à la pompe, pour un coût budgétaire très élevé (2.7 milliards d’euros pour seulement 2 centimes de baisse). Cette fois, l’idée est de faire un point une fois par trimestre, et non plus d’annuler, mais de mettre entre parenthèse tout ou partie d’une hausse de la taxe carbone. Cette suspension ne s’appliquera pas aux hausses des années précédentes, mais uniquement à celle de l’année en cours.

Par exemple, si au cours de l’année 2019, une surchauffe vient plomber les prix de l’essence, l’Etat pourra –le temps que le prix du baril baisse - annuler les hausses de 3 centimes sur l'essence et de 6 centimes sur le gazole qui auront eu lieu en début d’année. L’avantage de ce mécanisme, c’est qu’il permettrait de conserver la trajectoire carbone tout en déployant un mini filet de sécurité si les prix du baril venaient à s’envoler. Les modalités exactes (notamment le seuil du prix du baril à partir duquel on appliquerait cette mesure) seront discutées courant décembre lors de la deuxième partie de la loi de finances 2019.

A ce stade, un accueil plutôt froid…

Le discours d’Emmanuel Macron a plus suscité des attentes ou de la frustration, que de l’enthousiasme. « Nous aussi on garde le cap », clamaient hier des gilets jaunes. Les leaders syndicaux de FO et de la CFDT regrettent la faiblesse des mesures annoncées. « Il n’y a pas pour l’instant de réponses très concrète », estime Laurent Berger. Le numéro 1 de la CFDT avait proposé il y a 10 jours un grand pacte social autour de l’écologie.

Si la nouvelle méthode proposée par Emmanuel Macron s’en inspire, le chef de l’Etat n’a clairement pas mis non plus les syndicats au centre du jeu. Les partis d’opposition dénoncent une démarche qui va encore prendre du temps, alors que les Français ne veulent plus attendre. Au sein de la majorité, le député Mathieu Orphelin, proche de Nicolas Hulot, s’est dit déçu. Il attendait plus d’arbitrages concrets, lui qui a déjà formulé depuis plusieurs mois une série de mesures d’accompagnement social vis-à-vis des français qui subissent le plus la transition écologique.

Emmanuel Macron veut accélérer

Le chef de l’Etat se dit prêt à accélérer pour répondre au ras le bol fiscal des Français. « Si on dépense moins, on peut baisser plus rapidement les impôts » a-t-il rappelé. Plus d’économies, pour un meilleur service public…Emmanuel Macron met ainsi sur la table la réforme de l’Etat promise par en vain par ses prédécesseurs. Lui aussi en avait fait un axe fort de son début de quinquennat avec le Comité d’Action Publique CAP22, dont le rapport explosif avait finalement été mis de côté.

Mais aujourd’hui le chef de l’Etat dit entendre les français pour qui « ça ne va pas assez vite ». Cette réflexion sur le rythme des réformes va prendre quelques mois. Jusqu’ici ses objectifs se résument en 3 chiffres : 5 – 3 – 1. 5 points de baisses de la dette, 3 points de baisse de la dépense publique, un point de baisse des prélèvements obligatoires…Accélérer le rythme impliquerait des décisions sensibles. Car pour retrouver vite des marges de manœuvres budgétaires les deux postes d’économies significatifs sont la masse salariale de la fonction publique, et les dépenses sociales…