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Du costume à la sardine: comment Pierre Cardin a construit un empire financier avec son nom

Le Palais Bulles appartenant au couturier Pierre Cardin offre une vue exceptionnelle sur la baie de Cannes.

Le Palais Bulles appartenant au couturier Pierre Cardin offre une vue exceptionnelle sur la baie de Cannes. - Valery Hache - AFP

Le couturier, mort ce mardi à l'âge de 98 ans, était une célébrité mondiale. D'abord pour son rôle dans la mode, mais aussi grâce aux centaines de licences qui portent son nom, distribuées dans la plupart des pays du monde.

Quel est le rapport entre le restaurant chic des Champs-Elysées Maxim's et des tupperwares? Entre des couteaux de cuisine et un chauffe-mug? Pierre Cardin. Le coutier français, né en Italie en 1922 et arrivé à Saint-Etienne deux ans plus tard, a fait de son nom une marque international présente dans presque tous les pays du monde, "hormis quelques pays d'Afrique et la Corée du Nord" confiait-il à Challenges en 2012.

Visionnaire de génie, il est l'un des premiers créateurs à faire le pari de la licence dans les années 1960: vendre son nom à des entreprises chargées de le faire fructifier. Aujourd'hui, toutes les maisons de couture proposent leur parfum mais peu d'entre elles s'occupent de la création, laissant les groupes spécialisés s'en occuper.

Pierre Cardin a poussé cette logique à l'extrême avec des centaines de licences allant du costume à la sardine! En réalité, on peut presque tout trouver estampillé Pierre Cardin même si le nonagénaire assurait suivre de près tous les produits et préférait signer des contrats de licence de trois ans (renouvelables) à l'exception d'une trentaine de licences vendues à des groupes chinois en 2008 pour se renflouer.

En 1981, il rachète le restaurant Maxim's et tire encore sur la corde en multipliant les ouvertures de restaurant, en créant un service traiteur, en proposant des grille-pain ou des cafetières. Malgré le prestige du nom, le restaurant n'a plus la renommée gastronomique des année 1960 où il affichait encore trois étoiles au Michelin.

Une politique de licences à double tranchant. Contrairement aux autres marques de luxe, qui ont fait le choix de rester dans le haut de gamme, Cardin a mécaniquement dilué son prestige. Les costumes siglés du couturier sont désormais classés en entrée ou, au mieux, milieu de gamme.

Mais Cardin a réussi son pari industriel. A sa mort, sa fortune était évaluée à plus de 500 millions d'euros par Challenges même si le magazine reconnaissait qu'il était difficile d'estimer la valeur de sa marque. Le couturier possédait surtout un patrimoine immobilier impressionnant, une cinquantaine d'adresses en Europe, dont des lieux prestigieux à Paris ou Venise.

Quel avenir pour l'empire?

L'homme d'affaires espérait revendre son empire avant sa mort. Il l'avait évalué à un milliard d'euros mais n'a finalement jamais trouvé preneur à ce prix. Sans enfants, son héritier le plus proche est l'architecte Rodrigo Basilicati, son neveu. Mais Pierre Cardin a pu choisir de confier les rênes de son empire à quelqu'un d'autre.

"Si j'ai fait de l'argent avec mes licences, c'est pour être libre, faire autre chose que de la mode. Changer de métier me divertit. Il n'y aurait pas de plus grande punition que de m'obliger à jouer aux cartes", disait Cardin. A voir si le ou les héritiers persévèrent sur cette voie.

Thomas Leroy Journaliste BFM Business